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CHANSON


ACTEURS, ACTRICES ET CHANSONS BIDES

En chanson, personne n’est à l’abri d’un bide, pas même les grandes stars du grand écran. Jeanne Moreau, Catherine Deneuve, Alain Delon, Isabelle Adjani, Brigitte Bardot, Sandrine Kiberlain, Richard Berry, Daniel Auteuil … la liste serait longue s’il fallait citer tous ceux qui ont tenté l’aventure. Depuis que la télévision a apporté sa part d’ombre au cinéma et que les stars ont été obligées de trouver d’autres moyens pour redorer leur image et leur popularité, la chanson est devenue le miroir aux alouettes, un allié de circonstance qui se transforme hélas le plus souvent en ennemi redoutable !


QUAND LES CHANSONS BIDES S’EXPLIQUENT…

S’ils brillent déjà sur les écrans, les acteurs et actrices osent parfois se lancer dans la chanson dans l’espoir caché d’un nouveau rayonnement médiatique… Enfin, c’est ce qu’ils se disent, car si chanter rime parfois avec plaisir, c'est également un métier avec ses propres exigences. Ce n’est pas qu’une affaire de promotion et de business. Des vedettes de cinéma qui chantent, cela ne répond certainement pas à une demande du public, mais bel et bien à un caprice de star souhaitant se faire plaisir ! Il n’est pas exagéré de dire qu’entre un filet de voix à peine audible et un chant à la limite de la justesse, la chanson française mérite mieux que ça !

Derrière des excuses toutes trouvées du genre : « J’ai rencontré un compositeur ou un auteur génial. C’était super, je me suis glissé dans ses mots, dans sa musique. » ou encore « J’ai eu de la chance, Goldman a bien voulu m’écrire quelques chansons et je n’ai pas pu résister. », et en jouant de leur charme, les vedettes de l'écran appliquent d’une certaine façon les recettes qu’elles connaissent bien, celles du cinéma ou de la télévision, en misant sur un clip promotionnel plutôt flatteur suivi de quelques passages télévisés.

Artistiquement, les projets sont tantôt intimistes, tantôt prétentieux où au contraire désinvoltes, parfois même non dénué d’un certain humour. L’encadrement professionnel est souvent là et la production sonore à la hauteur. Alors pourquoi diable existe-t-il autant d’échecs ?

Si la chanson bide n’est pas une denrée rare, chez les acteurs, elle s’explique fréquemment par l’image renvoyée : une esthétique cinématographique trop appuyée, un contenu musical manquant d’originalité, des paroles trop lisses, trop convenues. D’autre part, en France, contrairement à d’autres pays, les artistes ont du mal à exister en dehors de l’image qu’ils se sont construites. Les comédiens n’y échappent pas. Relayés par les médias, affublés d’étiquettes et placés dans les cases préformatées du star-system, de nombreuses vedettes de cinéma existent et ne survivent de façon pérenne qu’à travers les prisons « dorées » de la com.


Tout à l’air si facile !

Avec son ego généralement surdimensionné, la star de l'écran doit tout faire pour exister médiatiquement. Le domaine artistique étant une grande famille et la célébrité offrant quelques avantages non négligeables, il n'est pas rare d’avoir quelques « amis » dans le domaine musical prêt à vous rendre service... Il ou elle aime la musique, assiste à des concerts, fait son premier galop d’essai aux « Enfoirés » ou devient « l’invité surprise » lors d'un concert d’une grande vedette de la chanson française... Le tour est joué ! Tout concorde pour que le passage à la chanson semble normal, sans difficulté particulière. Tout a l’air si facile ! Sauf qu'une chanson doit faire rêver ou vous distraire dès les premières secondes, en un instant ou presque, et que son succès est rarement dû à une question d’image, de plastique ou de notoriété, aussi justifiée soit-elle (la chanson Tout changer interprétée par Mimi Mathy, actrice populaire auprès des téléspectateurs avec la série Joséphine, ange gardien est le parfait exemple de ce qu’il ne faut pas faire).

AUTRES CAS : LE DUO ET LA CHANSON D’HUMOUR


Une rencontre inattendue : Isabelle Huppert et Jean-Louis Murat.

Certains artistes de cinéma misent aussi sur des chansons chantées en duo. En coulisses ou lors d'une soirée, le projet prend corps... Coup de folie ou coup de génie, allez savoir ! Je ne veux qu’elle, chantée en duo par Claire Keim et Marc Lavoine, de même que Dieu est un fumeur de Havane par Catherine Deneuve et Serge Gainsbourg, sont plutôt des réussites, tout en étant dans des registres différents. Certes, les notoriétés médiatiques de Lavoine et Gainsbourg ont apporté une plus grande crédibilité à ces chansons. Sans eux, le succès n'aurait pas été au rendez-vous.

Dans un tout autre registre, aux antipodes d'une démarche commerciale, citons l'expérience conduite entre Jean-Louis Murat et Isabelle Huppert entourés de musique aux allures dépouillées (Mme Deshoulières) et celle de Jeanne Moreau avec Etienne Daho (Le condamné à mort de Jean Genet) sur une mise en musique d'Hélène Martin, figure légendaire de la rive gauche dans les années 60. Ces cohabitations musicales misent sur le décalage pour fonctionner : âge, style, voix, carrière... permettent de créer le choc salutaire. Mais est-ce suffisant ?

Contrairement au passé, le public est mieux informé et adhère beaucoup moins au « coup médiatique ». Il faut de plus en plus de trésors d’ingéniosité pour vraiment créer la surprise, de celle qu’on n’attendait pas et qui reste dans les annales. Aujourd’hui, grâce à l’information relayée par les réseaux sociaux, films et chansons sont annoncés avant même d’exister. Des avis négatifs peuvent même voir le jour bien avant la sortie du produit. Difficile alors d'être dans les premiers rangs !


Une chanson d'humour bien dans l'axe du comédien d'alors.

D’autres comédiens, moins nombreux, misent leur ambition sur la chanson d’humour. Le second degré est par nature un moyen de ne pas être ridicule au cas où la chanson serait un plantage monumental. Si la filiation semble naturelle pour un acteur de comédie, cela prend une tout autre tournure face à un comédien dont le registre s’est forgé autour de rôles dramatiques. Une fois de plus, l’étiquette collée à l’acteur ou à l’actrice fera son œuvre, le public rejetant le produit et saluant la mauvaise interprétation par avance. Au regard de ces échecs, ce sont surtout les auteurs des chansons qui subiront la sentence. Ce sont eux qui auront commis l'irréparable et qui subiront les railleries sur les réseaux sociaux.

La plupart du temps, les gens sont en mesure d’accepter de la part d’un comédien une chanson, voire deux, comme une parenthèse, un jeu, mais pas d'emblée un album sous son propre nom et comprenant 10, 12 titres ou plus. Très souvent, à l'album suivant, c'est la sanction qui tombe. Dans ce contexte, la locution « C’est en forgeant que l’on devient forgeron » prend tout son sens. Se lancer dans la production d’un album, cela nécessite d’avoir un potentiel artistique et musical d’une grande envergure. Outre une esthétique musicale à la tonalité personnelle et des chansons originales et de qualité, il est important que l'interprète puisse faire oublier, ne serait-ce qu’un instant, les traces qu'il a laissées sur grand écran.

Pour conclure, n’oublions pas qu’il existe un bon nombre de chanteurs et de chanteuses, autrefois populaires, qui finissent leur carrière dans les bacs de quelques disquaires indépendants : les artistes des années 70/80, qui essayent perpétuellement de réussir leur come-back (Garou, Jeanne Mas…), les chanteuses à voix qui ont fait leur temps, les lolitas qui n’ont pas réussi à vieillir, sans oublier les anciens candidats de télé-réalité, telle Amandine Bourgeois !

Par Elian Jougla (Cadence Info - 09/2014)

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