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CHANSON

BIOGRAPHIE BING CROSBY, PORTRAIT DU CHANTEUR 'CROONER'

Chanteur et comédien, Bing Crosby s’illustra avec le même bonheur dans la chanson et le cinéma. L’homme le plus admiré du monde devant Jackie Robinson et le pape Pie XII aura influencé dans son style caractéristique de crooner toute une génération de chanteur populaire comme Dean Martin, Dick Haymes, Perry Como ou Frank Sinatra.


LES JEUNES ANNÉES

C’est à Tacoma, dans l’état de Washington, que naît au sein d’une famille modeste, Harris Lillis Crosby, le 2 mai 1903. Dès le plus jeune âge, on le surnomme « Bing » à cause de sa passion pour les bandes dessinées du journal local, le « Bing-ville Bugle ». Tout comme ses quatre autres frères, le benjamin de la famille doit trouver un emploi en dehors de ses heures de classe. C'est ainsi qu'à 14 ans, occupant un poste de saisonnier à l'auditorium de Spokane, il assiste amusé aux représentations d’Al Jolson parodiant des chansons hawaïennes.

Après une adolescence studieuse et sans histoire, il rentre à l’université Gonzaga et se destine à la carrière d’avocat, tout en pratiquant très assidûment des activités artistiques. Il y reste durant 3 ans, mais n’obtient aucun diplôme. Toutefois, bien des années plus tard, l'université lui décernera un doctorat honorifique en 1937 (aujourd'hui, l'université abrite une vaste collection de photographies, de correspondance et d'autres documents relatifs à Bing Crosby).

© El Daniel Santiago - Bing Crosby (1946)

En 1923, sans jamais avoir étudié la musique, Bing Crosby se retrouve batteur des Musicalaiders, un orchestre composé d’étudiants plus jeunes que lui. Parmi eux, le pianiste Al Rinker et sa sœur Mildred (Bailey) qui deviendra plus tard une célèbre chanteuse de jazz d’avant-guerre. Le groupe se produit lors de fêtes et pour la KHQ, la station de radio de Spokane.

En 1925, Crosby et Rinker, après quelques mois passés au ‘Clemmer Theatre’ de la ville, décident de rechercher la gloire en Californie. Délaissant leurs études, ils quittent Spokane pour se retrouver dans des engagements de petite envergure. Mildred Bailey, qui habite depuis un certain temps à Los Angeles, les présente à quelques personnalités du showbiz, ce qui leur permet d’être embauchés dans la revue ‘The Syncopation Idea’ durant plusieurs semaines, puis auprès de la revue ‘Will Morrissey Music Hall’ où ils perfectionnent leurs compétences réciproques.


L’AVENTURE DES « RHYTM BOYS »

En 1926, Bing et Rinker entrent dans l’orchestre de Paul Whitheman pour 150 $ par semaine, puis ils forment parallèlement avec le pianiste auteur-compositeur Harry Barris, le groupe des Rhythm Boys. Crosby devient rapidement l'attraction vedette. En 1928, il obtient son premier hit grâce à son interprétation du standard Ol' Man River. L’année suivante, les Rhythm Boys apparaissent dans le film King of Jazz. Durant trois ans, le trio se produit aux quatre coins des USA.

Très souvent programmé à l’hôtel Ambassador de Los Angeles, le groupe devient la coqueluche du public, surtout Bing qui vole la vedette à tout le monde. Son ami Harry Barris lui écrit plusieurs chansons à succès dont At Your Command, I Surrender Dear et Wrap Your Troubles in Dreams. En septembre 1930, Crosby épouse sa première femme Dixie Lee, mais après une menace de divorce en mars 1931, le chanteur s’applique à suivre sa carrière avec plus de détermination, et lorsqu'en 1931 Mack Sennett signe un contrat d’enregistrement solo avec Crosby, la rupture avec les Rhythm Boys devient inévitable.


LA CARRIÈRE SOLO

Bing Crosby fait désormais cavalier seul. Il signe alors un contrat avec Brunswick et la radio CBS en 1931, puis pour la firme Decca trois ans plus tard. Le chanteur passe sur toutes les ondes du pays, pulvérise tous les records d’audition et remplit le 'Paramount Theatre' de New York pendant 20 semaines consécutives. Dix des 50 chansons les plus populaires de 1931 voit le nom de Crosby s’afficher !

Parallèlement à la chanson, le chanteur entame une carrière d’acteur. Crosby joue le rôle principal dans une série de courts métrages sur les comédies musicales pour Mack Sennett, signe avec Paramount, et apparait en 1932 dans le long métrage, The Big Broadcast ; le premier des 55 films dans lesquels il se distinguera, s’offrant même le luxe de se voir décerner en 1944 un Oscar pour son rôle dans Going My Way (La route semée d’étoiles).

Ses différentes apparitions scéniques, ses disques et son travail à la radio impactent en même temps sa destinée d’homme d’affaires. Le succès de son premier film lui vaut un contrat avec Paramount. Il commence à produire des films, dirige ses émissions de radio, travaille pour les produits de soins 'Woodbury Soap', tandis que ses apparitions publiques se font plus rares. Paradoxalement, ses disques produisent des succès pendant la Dépression, lorsque les ventes sont en baisse. L’ingénieur du son Steve Hoffman déclarait en 2016 : « Bing a sauvé l'industrie du disque en 1934 lorsqu'il a accepté de soutenir la folle idée du fondateur de Decca, Jack Kapp, d'abaisser le prix des singles et d'obtenir une redevance pour les disques vendus à la place. Le nom de Bing et son talent artistique ont sauvé l'industrie du disque. Tous les autres artistes ont signé avec Decca après Bing. » (stevehoffman.tv – 2016).

Bing Crosby était un être généreux qui contribua au moral des troupes au cours de la seconde guerre mondiale. Défendant aussi l'oppression dont était victime les Noirs, il se battra pour que son ami Louis Armstrong apparaisse dans le film Pennies from Heaven (1936) adapté du roman The Peacock Feather. Armstrong, qui a joué dans de nombreux autres films, a toujours salué l’attitude de Crosby face à la ségrégation.

En 1940, il s’associe avec Bob Hope er Dorothy Lamour pour former un trio comique. La série de films ‘Road to…’ qu’ils tournent ensemble connaît aux États-Unis un immense succès : Road to Singapore (1940), Road to Zanzibar (1941), Road to Morocco (1942), Road to Utopia (1946), Road to Rio (1947), Road to Bali (1952) et The Road to Hong Kong (1962). Bing Crosby et Bob Hope jouent ensemble d'innombrables fois sur scène, à la radio, au cinéma, à la télévision et font également de multiples apparitions dans des films en dehors de la série des ‘Road to…’. Peu de temps avant sa mort en 1977, Bing Crosby avait prévu un autre road movie dans lequel Hope, Lamour et lui-même cherchaient la fontaine de la jeunesse.

Dans les années 40/50, l’artiste est à la tête d’un vaste empire qui, en dehors des émissions de radio et de télévision, de ses enregistrements, de ses films, s’occupe aussi de différents produits manufacturés sous l’étiquette Crosby, d’une équipe de football californienne, d’un team de base-ball de Pittsburg et d’un club de golf situé à Pebble Beach. Bing continue d’attirer un public toujours plus vaste. Pour l’Amérique, il est une sorte de symbole, un aimable et humoristique concitoyen d'un pays qui revendique sa liberté et son indépendance. Bing Crosby contemplait rarement son avenir, Il savait déjà que du jour où le public se lasserait de lui, il continuerait de se produire comme au premier jour, animé par la seule passion du spectacle, du music-hall.

Si Bing Crosby parvient à surmonter ses mauvaises habitudes de buveur invétéré, il aura bien plus de mal avec le tabac, ce qui entraînera un cancer du poumon en 1974. Toutefois, il s'en sort miraculeusement et n'a alors qu'une seule envie : remonter sur scène et enregistrer de nouvelles chansons, ce qu'il fera en compagnie de Fred Astaire. Mais le mauvais sort s'acharne... Au cours d'un concert, il fait une mauvaise chute et s'abîme une vertèbre. À la sortie de l'hôpital, loin de se sentir condamner, Bing renoue avec le monde du spectacle. Il enregistre un nouvel album, Seasons et se confronte à la nouvelle génération dans une énième émission de télévision avec David Bowie. Ce sera là, sa dernière apparition médiatique.

Le 13 octobre 1977, Crosby se rend seul à Madrid (Espagne) pour jouer au golf. Le lendemain, participant à un 18 trous en compagnie du champion de la Coupe du monde, Manuel Piñero, Bing Crosby, tout en se dirigeant vers le pavillon d’entrée, est pris d'un malaise, s’effondre et décède instantanément d’une crise cardiaque.

© Flickr.com - De g. à dr. : Louis Armstrong, Frank Sinatra, Peggy Lee et Bing Crosby


L’HÉRITAGE BING CROSBY

Grâce à sa version de White Christmas, Bing Crosby demeure encore à ce jour le recordman absolu en nombre de disques vendu pour un seul titre (selon le ‘Guiness World Records’, près de cent millions d’exemplaires !). Aux États-Unis, l'artiste a joué un grand rôle dans le domaine de l’industrie musicale, comme le jour où, assistant à une démonstration d’un magnétophone de marque allemande, il investira 50 000 dollars dans une entreprise californienne du secteur de l'électronique qui deviendra célèbre sous le nom d'Ampex. C’est d’ailleurs par le biais de l’enregistrement qu’il a construit ses propres programmes radiophoniques en utilisant la même approche qu’un metteur en scène de cinéma : montage, répétition, décalage temporel, etc.

En plus de son travail dans le domaine de l’audio, Bing Crosby a contribué au développement de la bande vidéo en achetant des stations de télévision, convainquant ABC de filmer ses émissions, à préenregistrer ses émissions de radio et à maîtriser ses enregistrements commerciaux sur bande magnétique.

Le roi des crooners, à l’instar de Frank Sinatra, se retrouvera à plusieurs reprises entouré des meilleurs jazzmen : Duke Ellington, Count Basie ou Nat King Cole... ce qui ne l’empêchera nullement d’aborder d'autres registres au cours de sa longue carrière : la musique country, irlandaise et française, le rhythm and blues, les ballades ou les chants de Noël.

L’apport de Bing Crosby dans le domaine de la chanson est indiscutable. Grâce à lui, quelque chose de nouveau était entré dans les songs. Outre le fait d’avoir su faire passer la chanson populaire à un niveau supérieur, il lui avait donné une identité et un style majeur grâce à ses interprétations toutes personnelles.

Crosby savait exploiter l'intimité du microphone. Sa chaude et tendre voix de baryton, sa façon inimitable d’aérer chaque syllabe, d’implorer, la manière qu’il avait de coller les mots à la mélodie, ont fait de lui un chanteur d’exception, particulièrement dans le registre « crooner » dont il fut et reste, encore aujourd’hui, l’un des meilleurs représentants.

Par Elian Jougla (Cadence Info - 04/2019)


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