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CHANSON

MARILYN MONROE, SES CHANSONS ET SES FILMS (1)

Marilyn Monroe était la plus grande star du cinéma à l’époque où Hollywood était à son apogée. Les réalisateurs qui l’ont dirigée et les acteurs qui ont tourné avec elle s’accordaient à dire que seule Greta Garbo pouvait égaler l’aptitude de cette actrice à éclairer l’écran avec une telle incandescence. Sa mort prématurée en 1962 bouleversa le monde et marqua la fin d’une époque.


MARILYN MONROE : LE RECADRAGE D'UNE DÉBUTANTE

Libre de son corps, d'une sensualité claire comme de l'eau, Marilyn Monroe l'était autant dans sa vie et dans ses propos. À défaut de la conduire, on lui emboîtait le pas. Parallèlement à sa carrière d’actrice, Marilyn Monroe avait fait usage d’autres talents, notamment en chantant quelques mélodies signées Cole Porter, Gershwin ou Irving Berling.

Aujourd'hui devenues des classiques et de précieux témoignages sonores de la grande époque hollywoodienne, Diamonds are a girl’s best friend, Bye bye baby, I wanna be loved by you ou Do it again, sont parmi les meilleures chansons glamours qui ont existées. Elles sont devenues une source d’inspiration pour d’autres chanteuses contemporaines comme Madonna ou Vanessa Paradis.

Marilyn Monroe possédait un timbre de voix agréable, mais sa tessiture vocale était limitée. Elle savait qu’elle ne pouvait pas rivaliser avec des chanteuses confirmées comme l’était Ella Fitzgerald, sa source d'inspiration. Pour Marilyn, chanter était un vrai plaisir. Elle aimait passer du temps avec les musiciens et ils la considéraient comme une pro. Pourtant, rien ne lui fut épargné. Dans ses premiers films, on douta de ses interprétations et on soupçonna l’utilisation de doublures vocales, ce qui obligea les studios de la Fox à intervenir pour faire cesser les rumeurs.

Marilyn était un être perfectionniste. Son professionnalisme l’a conduite à devenir une chanteuse sophistiquée et accomplie, apprenant à contrôler sa voix dans les moindres détails. La 'Norma Jean Baker' relevait les défis, bravant l’indifférence et les doutes quand son talent de chanteuse était mis à mal. Dès ses débuts, elle a tout connu ou presque : séances photographiques, inauguration de magasins, réceptions, défilés de mode, etc. Elle faisait toutes les apparitions publiques qu’on exigeait d’elle. Les studios avaient réponses à tout, prétextant que les jeunes actrices étaient initiées gratuitement aux techniques cinématographiques, et qu’on leur donnait l’occasion inespérée de prendre des contacts extrêmement précieux pour leur carrière. Quoi qu’il en soit, c’était une vie très dure, et il fallait être solide et déterminé pour y survivre. Tout au long de sa carrière, Marilyn va toujours s’efforcer de prouver ces deux qualités.

Très tôt, elle va suivre des cours d’art dramatique, mais également des cours de danse et de chant qui vont influencer profondément sa carrière. Fred Karger, alors professeur de chant attitré à la Columbia, est un bel homme de trente-deux ans récemment divorcé. Marilyn tombe aussitôt amoureuse de lui et souhaite profondément et désespérément l’épouser. Plus tard, elle en parlera toujours comme de son premier véritable amour. Mais Karger n’y songe pas le moins du monde, allant jusqu’à lui dire qu’elle n’avait pas assez de cervelle. Une considération que ne partagera pas son professeur d’art dramatique Natasha Lytess qui voit au contraire en elle une femme intelligente, dotée de toutes les qualités pour devenir une grande actrice, au point qu’elle quittera son travail à la Columbia pour se consacrer entièrement à Marilyn jusqu’à l’arrivée de Paula Strasberg en 1956. De plus, Lytess l’a initiée à ce que l’on peut appeler la « culture », car Marilyn est déterminée à être plus qu’une actrice sérieuse. Pour ce faire, elle complétera sa « formation » en prenant des cours de mime et se mettra à lire de nombreux ouvrages littéraires avec passion.

Un autre personnage important des débuts de la carrière de Marilyn sera Emmeline Snively. Celle-ci instruisait les « girls » à la carrière cinématographique, à poser devant les objectifs. C’est elle qui a ébauché la transformation de Marilyn dès 1945, alors qu’elle n’avait que 19 ans. Les grandes lignes de ce que sera la future comédienne sont déjà nettement dessinées : la célèbre démarche se perfectionne, les pas chorégraphiques sont étudiés, et elle prouve à son entourage qu’elle sait chanter juste.

Marilyn n'avait de cesse de conduire son travail avec le souci de la perfection propre à l’image hollywoodienne. Chaque chanson enregistrée par elle sera énormément travaillée. L’interprétation portera parfois sur des détails anodins, mais qui révèleront un style, son style. Elle sera souvent imitée par d’autres chanteuses, mais jamais égalée.


LES PREMIÈRES CHANSONS DE MARILYN

stockvault.net - Marilyn Monroe (milieu des années 50)

La première occasion qui lui est donnée de chanter en public est lors d’un spectacle de la 20th Century Fox en 1947. Elle y chante I never took a lesson in my life, une chanson popularisée par l’orchestre de Glenn Miller. Mais c’est dans une comédie musicale à petit budget, Les Reines du music-hall (Ladies of the chorus) en 1948, que les spectateurs pourront la voir chanter à l’écran pour la première fois.

Pour Marilyn, le film est important, car il lui donne l’occasion de s’exprimer dans plusieurs registres. Son rôle n’est pas de premier plan, mais elle est là ! Tibor Krebes, le critique du Motion Picture Herald s'exprimera en ces termes : « Une des meilleures scènes est celle de la chanson de mademoiselle Marilyn. Elle est jolie, et avec sa voix agréable et son style, elle promet. » La chanson phare s’intitule Everybody needs a da-dadaddy, une chanson qu’elle chantera souvent tout au long de sa carrière. Deux autres chansons seront également interprétées : la ballade sirupeuse Ladies of the chorus et Anyone can see i love you, une chanson d’amour qu’elle interprète sur scène devant un parterre de messieurs attentif au moindre de ses gestes.

Au cinéma, l’actrice tiendra fréquemment des rôles de chanteuse. Bien que n’ayant pas une voix puissante, elle sera tirer parti de ses faiblesses en développant une technique toute personnelle, et en choisissant des chansons mettant en valeur certains atouts de sa personne. Ainsi, sa démarche sensationnelle permet au public de la découvrir et de lui apporter une crédibilité se traduisant par : « On vous présente Marilyn Monroe ! »

Ses cheveux changent d’apparences et deviennent blonds comme les blés. Sur les photos de magazines, ses lèvres humides sont légèrement entrouvertes ; la pose est provocante et trouvera son écho quelques années plus tard dans l’attitude du chanteur des Rolling Stones, Mick Jagger. Le magnétisme de l’actrice est si grand que sa simple apparition en jeans donne à sa silhouette un côté aguicheur insoupçonné ! Outre sa façon de mettre en avant un corps sculpté et d’avoir une façon bien à elle de s’en servir, Marilyn possède aussi une voix unique au ton rauque et chargé de sexualité, un timbre qu’elle va travailler et améliorer tout au long de sa courte carrière à travers quelques intonations lascives et autres accents brûlants.

La même année que Les Reines du music-hall, Marilyn tourne dans un western auprès de Dan Dailey et Anne Baxter. Dans le film Le petit train du Far West (A ticket to tomahawk), elle tient un petit rôle de chanteuse. Les spectateurs l’entendront chanter Oh what a forward young man you are dans une tenue légère, courte robe jaune aux manches bouffantes ornée de rubans verts !

Pour Marilyn, c’est l’époque du 'calendrier' où elle pose nue, et de sa rencontre avec le photographe Tom Kelley. De cette collaboration naîtront les photos les plus connues de l’actrice. Ce sera également le vrai départ de sa carrière dans des films dramatiques comme Quand la ville dort (The Asphalt Jungle) de John Huston en 1949 et Eve (All About Eve) de Mankiewicz l’année suivante où elle joue la maîtresse d’hommes fortunés. Certes, ce sont encore de petits rôles, mais ceux-ci font impressions à Hollywood, même si la jeune actrice est encore considérée par certains comme une stupide blonde sans aucune classe. À cela, Marilyn répondra : « La vérité, c’est qu’avec tout ce rouge à lèvres, ce mascara et mes rondeurs précoces, j’étais aussi sensuelle qu’un fossile… mais j’avais l’air d’affecter les gens d’une tout autre manière. » Excepté Le démon s’éveille la nuit (Clash by Night) de Fritz Lang en 1952, il s’ensuivra une série de films mineurs et aujourd’hui oubliés.


LES HOMMES PRÉFÈRENT LES BLONDES

Marilyn est devenu rapidement la blonde brûlante, le sex-symbol d’une Amérique encore puritaine, ce qui aux yeux de Hollywood divise et fait hésiter. «  Niagara est le seul film qui mette en valeur le potentiel d’abjection répugnante de la perversité infantile et câline de Marilyn Monroe. Ici, on n’éprouve pas pour elle la moindre affection. » dira la critique Pauline Kael. Pourtant, la majorité de ladite critique l’encense et ceux qui considèrent le cinéma comme un art populaire l’adorent. Film charnière, Niagara contient tout ce que son public, déjà important et fidèle, attend d'elle : sensualité lascive, candeur capiteuse et douceur perverse. De ce film s’échappera une chanson troublante dont le titre résume à lui tout seul le sujet de Niagara, Kiss ; une chanson qui va exercer sur l'héroïne Rose Loomis (Marilyn Monroe) un rôle important.

Si les studios veulent démontrer que dans Niagara Marilyn Monroe est capable de faire sensation dans le monde entier, c’est parfaitement réussi. Cela tombe plutôt bien, car au même moment sort un autre film essentiel dans la carrière de l’actrice, Les hommes préfèrent les blondes (Gentlemen prefer blondes -1953).

Après une série de rôles de psychotiques et de secrétaires subalternes, ce film montre enfin l’actrice telle qu’elle va être, avec son innocence sexy, son infaillible sens du comique et ses talents de chanteuse et de danseuse. Le film met surtout en lumière son interprétation très moderne. Face à Jane Russell, elle va avoir ce petit plus indéfinissable et inclassable. Les chansons écrites pour la plupart par Jule Styne et Leo Robin sont parmi les plus célèbres de l’actrice : Diamonds are a girl's best friend et ses multiples rebondissements orchestraux, typique de la comédie musicale made in Hollywood, le langoureux Bye bye baby, la ballade jazzy When love goes wrong et Two little girls from little rock chantée en duo avec Jane Russell. C’est grâce aux conseils et au travail conduit avec le professeur de chant Hal Schaefer que Marilyn parvient à placer sa voix de façon plus juste. Elle se met à écouter assidûment Ella Fitzgerald, ce qui l’aidera à prendre confiance en elle sur sa façon de chanter.

La même année s’achève le tournage du seul véritable western dans lequel tournera Monroe, La rivière sans retour (River of no return), avec Robert Mitchum. Une fois de plus, Marilyn incarne une chanteuse de cabaret, mais aussi une femme à la fibre maternelle, une femme lentement éblouie par la générosité instinctive d'un petit garçon et une certaine vie sauvage à laquelle rien ne la destinait. Quatre chansons sont interprétées dans le film. Parmi elles s’échappent One Silver Dollar à la tonalité dramatique. Loin des orchestrations hollywoodiennes chargées de violons, la présence d'une guitare suffira. Cette sobriété était voulue par la comédienne. L’autre chanson est plus légère, c’est Down in the Meadow, une chanson en forme de comptine qui évoque la nature et qui nous donne l’occasion de voir l’actrice jouer une seconde fois de la guitare. Un vrai bonheur !

Au début de l’année 1954, alors que Marilyn et son second mari Joe DiMaggio sont en voyages de noces au Japon, elle accepte de prendre sur son temps pour se produire devant les troupes américaines en Corée. Plus tard, la comédienne décrira cette tournée comme un des plus grands moments de sa carrière. Certains soldats iront jusqu’à traverser toute la péninsule coréenne pour la voir. Marilyn donnera tous ses concerts en plein air malgré le vent glacial et les rafales de neige, allant jusqu’à porter une robe courte pour interpréter ses chansons les plus aguichantes dont Diamonds are a girl’s best friend.

La même année, l’actrice vient de terminer son travail sur la comédie musicale de Irving Berlin, La joyeuse parade (There's no business like show business). Elle accepte le rôle, pensant que les studios de la Fox vont la choisir pour leur prochain film Sept ans de réflexion (The seven year itch), alors en projet. Elle y incarne, au côté de Donald O’Connor, un rôle de chanteuse de cabaret qui essaye de s’intégrer dans une grande famille du show business. Les chansons sont signées Irving Berling. Lazy, Heat wave et After you get what you want, you don't want it sont une fois de plus remarquables par leur interprétation (version RCA). Certes, les chansons sont mâtinées de bons sentiments et colorées 'rose bonbon', mais Marilyn danse et chante avec une perfection et une apparence d'improvisation inimitables. Dans le New-York Daily Miror, Frank Quin reste son inconditionnel : « Marilyn Monroe chante et joue sur le mode sexy dont elle est coutumière. Le résultat est saisissant. » Curieusement, Les Reines du music-hall et La joyeuse parade, qui sont deux comédies musicales, seront pourtant considérées comme les deux plus mauvais films de Marilyn !


MARILYN MONROE : A FINE ROMANCE

Au cours de l’année 1954, Marilyn Monroe rentre en studio pour enregistrer quatre titres à la tonalité jazzy avec un grand orchestre : She acts like a woman should, When i fall in love, A fine romance, le célèbre standard de jazz de Jerome Kern, et l’inoubliable Do it again de George Gershwin, d’une sensualité à fleur de peau. En se rapprochant du micro, Marilyn joue sur les effets de voix. Ce sont presque des chuchotements qui s’échappent de Do it again. Son interprétation est d’un raffinement et d’une élégance rare, savamment dosée par des ‘boys’ lui répondant en chœur. Un perfectionnisme sensuel qui fera chavirer le cœur de bien des hommes… Ces quatre chansons seront les seules enregistrées en studio, car pour des raisons de contrat avec la Fox, les autres ‘scores’ interprétés par Marilyn ne seront jamais commercialisés.



MARILYN AU SOMMET DE SA CARRIÈRE

2e PARTIE : LA CONSÉCRATION ET LA FIN TRAGIQUE. Marilyn est à sa consécration. Elle humanise l’image de la blonde dont les studios l’ont affublée. Enfin, elle joue au plus près de sa véritable personnalité comme le font les plus grands comédiens...

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