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CHANSON

DANIEL BALAVOINE, BIOGRAPHIE PORTRAIT D’UN ARTISTE ENGAGÉ

Le 14 janvier 1986, Daniel Balavoine perdait la vie à bord d’un hélicoptère sur le ‘Paris Dakar’. Plus de 30 ans après sa disparition, que reste-t-il de ce chanteur engagé qui a souvent flirté avec la politique ? Sa liberté à lui, c’était celle des mots avec ses coups de gueule, mais aussi ses engagements solidaires comme auprès de ‘SOS Racisme’. Avant de disparaître, l’artiste aura eu le temps de nous laisser un patrimoine musical riche de quelques textes et mélodies dignes d’intérêts.


UNE COURTE BIOGRAPHIE DE DANIEL BALAVOINE

Évoquer Daniel Balavoine, c’est surtout plonger au cœur des années 80 avec son chômage, ses actes racistes et terroristes. L’artiste a traversé cette époque avec un certain déchirement, un malaise qui lui collait à la peau. Né en 1952 à Alençon, en Normandie, il passe une grande partie de sa jeunesse à Pau. Pour sa famille originaire du pays Basque, c’est un retour aux sources. Un père ingénieur, une mère antiquaire, Daniel Balavoine est le benjamin de six bambins.

Mai 68. L’ado descend dans la rue et quitte le lycée avant d’avoir obtenu le bac. Un matin, à la radio, il entend les Beatles. Les quatre de Liverpool provoquent le déclic : il sera musicien. Il fait du bal et sort trois ans plus tard son premier 45 tours avec le groupe Présence (Le jour s’est levé). Le disque est un échec. Tant pis, il faut continuer d’y croire. Côté cœur, il tombe amoureux de la chanteuse Catherine Ferry et devient l'un de ses choristes.

Au début des années 70, même si quelques opportunités se présentent à lui, Daniel Balavoine est obligé de faire quelques petits boulots alimentaires, dont celui de disquaire. Une première ouverture sérieuse se présente à lui : l’opéra-rock La révolution française, de Claude-Michel Schönberg. En 1978, Michel Berger qui travaille avec Luc Plamendon à la finalisation de Starmania remarque Balavoine lors de sa première apparition télévisée. Suite à son audition, le chanteur est retenu pour tenir le rôle de 'Johnny Rockfort', l’un des rôles majeurs de la célèbre comédie musicale. Cette aventure va être pour Daniel Balavoine le tremplin des dix ans de carrière qui vont suivre.

© Photographe : Christian D'Aufin - Daniel Balavoine (Midi Première 1980)

Au total, ce sera 20 millions d’albums vendus, une centaine de chansons au répertoire dont une bonne quinzaine de tubes. Balavoine devient ainsi l’un des témoins privilégiés du Top 50 : Mon fils ma bataille, Sauver l’amour, Vivre ou survivre, L’Aziza... seront autant de succès que les plateformes de streaming n'ont pas oublié de conserver en mémoire.


UN REGARD PORTÉ SUR L’HOMME ET SES ENGAGEMENTS

Plus de trente ans après sa disparition, ses chansons sont restées intactes comme au premier jour. Elles ont traversé les générations sans être recouvertes de nostalgies inutiles. Des chanteurs, des troupes amateurs reprennent en chœur ses tubes autant pour la qualité des textes et de ses musiques que pour l’homme qu’il représentait. « Il ne se contentait pas de constater les choses, il ne se contentait pas de les dire, il s’engageait partout, concrètement. » précise Claire, l’une de ses sœurs.

Se taire ou parler ? Sur tous les sujets, Daniel Balavoine trouvait à redire, surtout en politique. Quand il prononce cette phrase : « Tous disent la même chose exactement, et rien, absolument rien ne change ! », l’artiste se posait sans le savoir en visionnaire. « J’ai une grande gueule, c’est vrai, mais en fait, je fais de la continence verbale, c’est tout ! » dira-t-il comme pour se défendre de ceux qui l’attaquaient.

Daniel Balavoine avait une énergie de combattant, comme s’il avait une revanche à prendre sur la vie. La création a été pour lui un bon moyen pour épancher sa soif de justice, pour oser dire ce qu’il avait sur le cœur… même s’il s’est toujours défendu d’être un héros : « Je ne suis pas un héros / Mes faux pas me collent la peau / Je ne suis pas un héros / Faut pas croire ce que disent les journaux / Je ne suis pas un héros, un héros » (Je ne suis pas un héros – 1980),

Daniel Balavoine ne manquait pas non plus d’aplomb pour lâcher ses quatre vérités face au futur président François Mitterrand sur ‘Antenne 2’ en 1980…

Ce jour-là, invité à la demande du futur président, Balavoine, ne pouvant s’exprimer comme il le souhaitait, quitte le plateau pour revenir quelques secondes plus tard et balancer sa colère à propos de l’âge des hommes politiques et du regard porté sur les jeunes : « Ce que je peux vous dire, c’est que le désespoir est mobilisateur, et que lorsqu’il devient mobilisateur il est dangereux et que cela entraîne le terrorisme, la Bande à Baader et des choses comme ça ! Il faut que les grandes personnes qui dirigent le monde soient prévenues que les jeunes vont finir par virer du mauvais côté, parce qu’ils n’auront plus de solutions. » dira l’artiste en conclusion. Lucide, mais rageur, Balavoine connaissait le fonctionnement des médias aussi bien que les hommes politiques. Cette altercation quelques mois avant les élections fera date et marquera les esprits des jeunes et des moins jeunes.

En 1981, Mitterrand est élu et autorise les radios libres. Un vent de révolution parcourt les ondes. Balavoine trouve grâce à l'une d'entre elles une tribune pour asseoir ses coups de gueules. Durant trois semaines, il va devenir éditorialiste sur la station ‘Paris Fréquence Montparnasse 95.2’. Les fondateurs de la radio, Robert Namias et Alexandre Marcellin, lui laissent alors une liberté totale pour commenter l’actualité politique : montée de l’extrême droite, racisme, justice... D’une certaine façon, Balavoine devient le porte-parole de la majorité silencieuse et des jeunes.

L’artiste, qui a beaucoup de charisme et le verbe puissant, ne revendiquera jamais une quelconque place de chanteur engagé comme pouvaient l’être Léo Ferré ou Jean Ferrat. Balavoine était plutôt un leader d’opinion comme les humoristes Desproges ou Coluche. Balavoine arrivait surtout suite à une génération de chanteurs issue des années 60/70 plutôt désengagée politiquement. Sa ‘tonalité’ dans les médias était donc toute nouvelle, ce qui donna assurément au texte de ses chansons une tout autre portée.

Ces intentions louables et justifiées, on les retrouve notamment dans son dernier disque « Sauver l’amour » (1985) et dans les paroles de la chanson L’Aziza. Cette chanson porte les traces d’un engagement tout personnel sur la tolérance et le rapport à l'étranger : « Et quand tu marches le soir / Ne trembles pas / Laisse glisser les mauvais regards / Qui pèsent sur toi / L'Aziza, ton étoile jaune c'est ta peau / Tu n'as pas le choix / Ne la porte pas comme on porte un fardeau / Ta force c'est ton droit » . C’est durant cette période créative que le chanteur adhérera à ‘SOS Racisme’.

DANIEL BALAVOINE : L'AZIZA

Début janvier 1986, Balavoine participe à sa façon au ‘Paris Dakar’. Il est là pour fournir de l’aide humanitaire dans le Sahel. C’est suite à une tempête, lors d’un retour vers le bivouac, que le fatal accident se produira. Sa disparition sera un choc, et le sera d’autant plus que l’artiste était alors au sommet de son art. Encore jeune et plein de vie, si le destin n’en avait pas décidé autrement, l’artiste aurait certainement inspiré de nouvelles pages à tout bon biographe. Son sens de l'observation, sa présence médiatique ainsi que ce désir de justice ne pouvaient s'accommoder vraiment avec ce métier de "chanteur de variété" si souvent fabriqué. Seule sa notoriété au service d'une cause pouvait répondre à ses exigences.

Par Elian Jougla (Cadence Info - 01/2018)

À CONSULTER

DANIEL BALAVOINE : "MON FILS, MA BATAILLE", HISTOIRE DE LA CHANSON

En 1980, le chanteur Daniel Balavoine sortait 'Mon fils, ma bataille'. L'histoire de cette chanson évoque le douloureux problème du divorce et de la garde des enfants par le père face à la loi.

LES FINS TRAGIQUES DE QUELQUES STARS

Janis Joplin, Jimi Hendrix, Jim Morrison et John Lennon. Leur point en commun est d’avoir eu leur destin brisé alors qu’ils étaient en haut de l’affiche. À la surprise générale, ils ont brûlé leurs ailes ou subit un jour ce que réserve parfois les accidents de la vie.


2e PARTIE : CLAUDE FRANÇOIS, MICHEL BERGER ET BALAVOINE. Terrassés à l'aube de la maturité ou partis trop précipitamment, ils sont devenus de véritables légendes...


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