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SON & TECHNIQUE


ACOUSTIQUE ET SALLES DE CONCERT

Les problèmes sonores liés à l’acoustique ne datent pas d’aujourd’hui. On ne peut en douter en observant l’architecture arrondie des amphithéâtres grecs. Les travaux qui ont été conduits depuis l’Antiquité sur les phénomènes acoustiques nous ont apporté des connaissances approfondies sur notre façon de percevoir les sons. Nous n’avons eu de cesse d’optimiser les conditions dans lesquelles ils devaient être perçus. L’acoustique architecturale a contribué largement à cette prise de conscience.


QUAND LES ONDES RENCONTRENT DES OBSTACLES…

Face à une vaste étendue toute plate comme une plaine, le son se perd à l’horizon. Seuls des obstacles peuvent modifier le comportement des ondes. Ainsi, quand une onde butte contre un mur, elle nous est renvoyée. C’est la nature du terrain, des matériaux, la forme et la taille des obstacles qui déterminent l’amplitude des réflexions ;l’onde incidente étant celle qui arrive et l’onde réfléchie, celle qui repart.

Le son que nous percevons lors d’un concert serait ‘mat’, terne, sans relief si les réflexions n’existaient pas. Elles sont donc utiles, mais sous certaines conditions, car un excès de réflexions nuirait à la qualité du rendu sonore.

Dans un premier temps, le son reçu par nos oreilles est l’onde directe. Elle correspond au trajet le plus court. À ce son vont se rajouter d’autres ondes par vagues successives jusqu’à l’extinction complète du son. Tout ceci se passe à une si grande vitesse que nos pauvres oreilles ont bien du mal à faire le tri. Ces vagues de réflexions produisent un phénomène bien connu, la réverbération.


LA RÉVERBÉRATION DE LA SALLE

Elle peut durer que quelques dizaines de millisecondes, toutefois, elle ne s’arrête jamais brusquement, mais disparaît progressivement suivant une pente plus ou moins abrupte. Heureusement d’ailleurs, car la musique que nous entendrions deviendrait alors désagréable et fatigante !

Le temps de réverbération est proportionnel au volume de la salle et inversement proportionnel au coefficient d’absorption des parois. En effet, toutes les parois n’ont pas le même niveau d’absorption. En fonction de leur revêtement, la faculté de réfléchir l’énergie qui leur parvient est plus ou moins grande. Le matériau d’absorption le plus connu est la laine de verre… mais attention, son utilisation ne répond pas à tous les critères d’une bonne acoustique, car chaque matériau absorbe seulement une plage de fréquences et pas du tout le spectre sonore dans sa globalité.

Dans une salle de concert, un minimum de réverbération est toujours nécessaire, car sa présence apporte à la musique exécutée une plus grande profondeur et moins de sécheresse. Pour nos oreilles, la réverbération joue un rôle flatteur, à conditions bien-sûr qu’elle ne soit pas trop imposante. Deux à trois secondes dans une grande salle suffisent généralement.


L’ÉCHO DANS LA SALLE

Un autre phénomène plus désagréable et impossible à contrôler est bel et bien l’écho. C’est une réflexion unique qui est séparée de l’onde directe par un bref silence. Ce résultat sonore ne doit pas être confondu avec l’écho répétitif qui correspond à des impulsions à caractère périodique. Ce genre d’écho se produit lorsque les parois réfléchissantes sont éloignées les unes des autres. Pour l’ingénieur du son, il n’y a pas grand-chose à faire quand un coup de grosse caisse rebondit en écho. Heureusement, lorsque les spectateurs arrivent et que la salle se remplit, le phénomène d’écho tente à disparaître.


DE LA FOCALISATION A L’ABSORPTION SONORE

On dit souvent que les ondes préfèrent buter sur des surfaces courbes plutôt que sur des arêtes ou des murs plats. Certaines enceintes des marques Elipson et Bose, avec leurs formes arrondis, attestent de cette course à la perfection (le fléau des constructeurs demeurant les ondes arrière créées par les haut-parleurs). Dans les salles de spectacles, c’est pareil ou presque. Il suffit d’observer l’architecture d’une église ou d’une chapelle avec ses formes arrondies derrière l’orateur pour comprendre toute l’importance que peut revêtir l’architecture quand elle est confrontée à des sons.

Ces formes courbes s’appellent la focalisation. C’est un cas particulier de réflexion qui se produit au contact des voûtes. Les ondes sonores viennent réfléchir sur un symétrique du point de départ appelé ‘point focal’. À la différence d’une surface plane, le rayonnement sonore est focalisé, c’est-à-dire concentré dans un espace restreint. Dans ce type de réflexion, le positionnement de la source a donc une portée capitale si l’on souhaite optimiser le résultat sonore.

Enfin, l’air joue un rôle naturel dans l’absorption du son. Si son efficacité est négligeable dans de petites salles, en revanche, quand les distances de propagation sont très étendues comme dans un stade, alors l’air joue un rôle appréciable. Vous remarquerez ainsi que la plupart des scènes (sauf celles des théâtres et amphithéâtres) font toujours face à la partie la plus profonde de la salle. Cette disposition n’est évidemment pas un hasard.


QUAND LES ARCHITECTES BATAILLENT…

De nombreuses salles de spectacle font appel à des méthodes d’acoustique architecturale bien connues. La géométrie est à la base de tout. Elle sert à calculer et à prévoir le trajet que vont emprunter les ondes. Si tout va bien et dans le cas où tout a été calculé correctement, on a peu de chance de créer une mauvaise acoustique, surtout qu’aujourd’hui l’ordinateur est rentré dans la bataille à son tour. Ses programmes sont là pour calculer les bonnes trajectoires à coup de chiffres et de théories toutes faites !

Après la théorie vient la mise en pratique à petites échelles. De petites maquettes sont fabriquées dans lesquelles on projette toute une gamme de sons, qui sont récupérés par des micros et enregistrés pour être ensuite analysés… Et si tout est OK, alors l’étape suivante consistera à faire la même chose, mais grandeur nature.

Le but d’une telle manœuvre est de réduire au maximum les risques d’erreurs. Actuellement, malgré les technologies misent en œuvre et l’utilisation de nouveaux matériaux, des erreurs sont toujours possibles. Cependant, une fois la salle construite, si son architecture s'avère modulable, il suffira de modifier sa configuration pour masquer ou éliminer certains défauts.


L’ACOUSTIQUE, UNE SCIENCE SUBJECTIVE

Si dans les faits la musique rejoint le son pour faire un tout, il n’en est pas de même entre l’architecture et l’acoustique. Je dois même dire qu’il existe encore de nombreuses salles de spectacle où l’acoustique est déplorable. Faute de moyens financiers, faute de temps ou d’un recul suffisant, les problèmes liés à l’acoustique demeure, même si des efforts sont consentis ici ou là pour relever les défis qu’elle provoque.

Pendant longtemps, alors que la musique et le son évoluaient à grands pas, l’architecture des salles de concert a été mise de côté. En France, trop de salles dites ‘de spectacle’ n’ont que l’appellation et sont bien éloignées des qualités acoustiques d’un auditorium. Généralement, elles ne sont pas prévues pour recevoir des concerts, mais plutôt pour tout recevoir sans distinction de costumes, ce sont des salles dites de multiactivités : réunion, sport, musique…

La portée de l’acoustique est sous-estimée ou mal comprise. Une mauvaise acoustique a des conséquences fâcheuses. Outre le fait d’accentuer des phénomènes sonores qui rend le son moins intelligible, elle crée également beaucoup plus de fatigue et de stress chez les spectateurs.

Alors que l’acoustique se veut d’une portée scientifique, la conception de nombreuses salles est déjà totalement dépassée. Les questions fusent et les réponses reposent bien souvent sur des problèmes aussi évidents qu’aléatoires. À ciel ouvert, on incrimine les conditions météorologiques : l’humidité, le vent ou la pluie (danger d'électrocution), alors qu’en salle fermée, c’est le public qui vient ou qui ne vient pas qui influe directement sur le résultat de l’acoustique. À cela, j’aurais pu rajouter le choix des matériaux utilisés ou la hauteur du plafond. Bref, malgré les efforts consentis, l’emploi d’ingénieurs surdiplômés et une technologie toujours plus efficace, l’acoustique demeurera encore pendant longtemps un domaine subjectif, tout comme la musique d’ailleurs !

Par Elian Jougla (Cadence Info - 09/2013)


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