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INSTRUMENT ET MUSICIEN


AKAI S1000, LE PREMIER SAMPLER DE RÉFÉRENCE

Nous sommes en 1988. La musique assistée par ordinateur envahit depuis quelques années les studios et modifie en profondeur la façon de composer. Akai, une marque connue au départ pour son matériel audio, s’impose dans le domaine de l’échantillonnage ; une technologie encore balbutiante, mais que son nouveau modèle, le S1000, va améliorer grâce à quelques nouveautés distinctives.


L’ACCÈS AU TRÔNE DU S1000

En moins de deux ans d’existence, Akai et son S1000 s’imposent comme le standard du sampler professionnel. Pour l’époque, ses caractéristiques parlaient d’elles-mêmes : un échantillonnage en 16 bits à 44,1 kHz (c'est-à-dire avec la même qualité de restitution sonore que le CD), deux méga extensibles à huit, voire 32 plus tard, plus quelques options indispensables comme les interfaces SCSI, ASCI et des entrées/sorties numériques.

Grâce à son implantation technologique de pointe, le sampleur S1000 va parvenir à un palier important à une époque où l’échantillonnage est en plein essor. Son usage, encore mal défini, est tiraillé entre ses fonctions de “synthétiseur” et de “magnétophone” avec le direct-to-disk.

En attendant une redistribution des cartes et la sortie d’appareils radicalement différents, le S1000 sera considéré pendant plusieurs années comme un outil tourné vers l’avenir avec l’assurance d'obtenir un résultat hautement satisfaisant. Le S1000 a surtout permis à bien des musiciens de reprendre leur respiration après l’achat et la revente de différents échantillonneurs parfois décevants ou trop complexes pour apporter pleine satisfaction.

© Zoë Blade's (wikimedia) - Akai S1000


LA VERSION 2.0 DU S1000

En 1988, les disques durs n’ont pas encore complètement remplacé les disquettes dans le monde de la musique. Avec le recul, nous pourrions dire que les petites/grosses lacunes gravitant autour de la sauvegarde des données n'étaient pas encore apparues à grand monde comme une priorité. Toutefois, la version 2.0 comblera d’aise tous ceux qui s’étaient fait les dents sur la première version.

La nouvelle version remettra le S1000 dans la course avec sa fonction temporelle 'Time Stretch'.

« C'est-à-dire ? »

C'est simple. Quand on échantillonne un 'Do 3' et que l'on joue le Do supérieur ('Do 4'), le son est lu deux fois plus vite, comme quand on lit avec un magnétophone un enregistrement à 9,5 cm/s à la vitesse supérieure (19 cm/s), et ce, quelle que soit la technologie de reproduction employée par le sampler : variation de la fréquence de lecture, fréquence fixe ou interpolation/soustraction des échantillons. Cette incapacité à traiter correctement un échantillon était encore présente sur de nombreux samplers.

L'implantation de la fonction 'Time Stretch' est la grande innovation de la version 2.0 du S1000. À l'aide de cette fonction, allonger ou rétrécir l’échantillon à sa guise devenait un jeu d'enfant. Enfin presque !

Reprenons les explications...

Si vous capturez une phrase musicale dont le tempo est à 100 battements par minute, un 'Time Stretch' réglé à 50 % divisera le tempo par deux, mais sans toucher la fréquence de l’échantillon (hauteur). De plus, si l’on veut garder le même tempo, tout en multipliant la fréquence par deux, il suffit de jouer l’échantillon en question une octave au-dessus. Ce procédé technique rend encore aujourd’hui de grands services aux DJs lors des mix, en mettant plusieurs morceaux différents au même tempo sans toucher à leur hauteur d’origine.

Les autres progrès réalisés par la version 2.0 concernent la partie édition, notamment la possibilité de moduler l’échantillon par la vélocité (une fonction qui était alors réservée au Prophet 2000), et la possibilité d’ajuster le gain de deux échantillons mis bout à bout ou d’atténuer un seul des deux.


LES INSUFFISANCES DU S1000

Si des avancées majeures sont présentes sur le S1000, l’appareil possède encore quelques insuffisances qui seront corrigées peu à peu sur les nouveaux modèles de la marque.

La première faiblesse du système d’exploitation du S1000 est sa lenteur. Il “rame” avant de charger deux mégas de mémoire à partir d’un CD-ROM. La version 2.10 résoudra en grande partie ce problème-là tout en augmentant la mémoire de masse.

© reddit.com - Akai S1000KB.

Relevons aussi la classique enveloppe ADSR présente sur les synthétiseurs, mais trop restreinte pour satisfaire des boucles multiples. Le MIDI, qui sert à connecter et à synchroniser différents matériels électroniques entre eux, et l'implantation multitimbrale seront également revues dans les années qui suivront.


LE S1000KB, LA VERSION CLAVIER

À côté de la version “expandeur” existe aussi la version clavier, le S1000KB. Son premier avantage est d'éviter l'utilisation d'un clavier maître. La firme japonaise avait considéré que la version clavier devait répondre à certaines exigences en proposant un clavier de cinq octaves accompagné de touches lestées - fabrication Fatar côté qualité. À ceci s’ajoutent un pavé numérique avec de solides boutons, des “soft keys” soulignant l'afficheur et des touches équipées de diodes incorporées pour le menu.

Akai aura aussi la bonne idée de laisser en face avant le bouton de contraste, le niveau d’enregistrement et le volume général ; le lecteur de disquette se retrouvant sous les molettes, avec l’entrée du casque. Disposés en face arrière, nous trouvons le bouton de mise sous tension et les entrées enregistrements avec le reste des connexions.

Le KB est également disponible avec disque dur interne 40 méga, et toutes les options du S1000 y sont adaptables. La version 2.0 du système d’exploitation est comprise en standard, figé dans la mémoire morte.


LE POURQUOI DU S1000

Le S1000 est arrivé au bon moment dans la course à l’échantillonnage. Il offrait quelques avantages sur la concurrence, dont celle de proposer en option une banque de sons déjà existante. L'échantillonneur mettait à la disposition de son utilisateur des possibilités d’édition - aujourd'hui dépassées - mais qui, en son temps, satisfaisaient les musiciens exigeants.

Sa possibilité de décupler sa mémoire de masse et d’ajouter des extensions mémoires faisaient du S1000 un échantillonneur évolutif pour un coût raisonnable. Avec un S1000 gonflé à huit mégaoctets (ou plus) couplé à un disque dur amovible 44 mégas, la plupart des musiciens oublieront pendant un certain temps les nouveaux arrivants, surtout quand le détenteur savait le “domestiquer” pour mieux le contrôler !

Par Elian Jougla (Cadence Info - 12/2021)


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