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GARNER : EN PLEIN CŒUR

Un an à peine après la sortie de son album Bas Les Armes, Garner revient avec un EP de 5 titres intitulé En Plein Cœur. Des chansons entre pop et électro réalisées avec son complice Philippe Balzé que l'on a déjà croisé avec des artistes comme Renan Luce, Miossec, Joseph d’Anvers, ou Maissiat. Garner conserve ses distances et joue avec son image. Il est, à coup sûr, l'un des secrets les mieux gardés de la scène française.


À PROPOS DE EN PLEIN CŒUR

Torrents de sensations, planches de salut, traversées nocturnes et voyages lointains. Garner a beaucoup appris, dompté la mélancolie, canalisé son incroyable énergie. Pour ce nouvel EP, il choisit un format moins rock et plus électro, un mur de synthés sur lequel il pose ses mots. N'en Abuse Pas, dit-il dans le premier extrait. On va se priver !

La verve du chanteur n’a pas changé et si ce nouvel opus semble en apparence plus léger, il ne quitte pas sa délicieuse ambiguïté. De quoi nous parle-t- il ? D’amour beaucoup, pour ne pas dire essentiellement d’amour. Car en ces temps tumultueux, il était nécessaire d’en parler. Garner est toujours celui qui accepte que l’ailleurs absolu n’existe pas.

Garner

Dans N’en abuse pas, le vraisemblable single de l’Ep, le voilà qui, s’adressant doux-amer à son aimée, sifflote léger derrière un barrage de synthés qui donne le ton, dans un mélange de douceur et de rugosité. Garner trouve l’ailleurs dans une friche à côté d’une usine désaffectée. Ce coin de nature lui suffit. Il peut vieillir avec « elle », « loin des hordes sauvages », il l’aime, oui, mais « qu’elle n’en abuse pas ».

La tranquillité ne dure jamais. Garner le sait. Il n’est pas dupe ! Si la part rock du précédent album s’est estompée au profit de l’électro, on y retrouve aussi des rythmiques presque « funky ». Funky, mais sombre. On ne rigole pas, mais ne nous prenons pas non plus au sérieux.

« Tous ces gens sur la terre sont de trop pour tes nerfs » chante-t- il dans La nuit tu dors. C’est un homme mi-amusé, mi-inquiet qui veille sur le sommeil d’une aimée qu’on devine capricieuse. La nuit, elle dort. La nuit, il peut enfin veiller sa propre solitude. Une inspiration légèrement funky encore dans Les voies sans issues. Un titre poétique comme aime à les écrire Garner.

Poétique et polémique : Garner est-il vraiment revenu de l’ouest de Brest où il nous avait laissé dans son précédent album ? Il a peut-être « plongé dans le bleu-noir des origines », devenu une « étrange bête sous-marine ». On va souffrir, c’est entendu, on finira seul, c’est évident, mais il ne faudrait quand même pas que ça nous empêche de danser, ni de rêver… La vie est un sujet trop grave pour ne pas s’amuser, et ne pas en abuser.

GARNER : N'EN ABUSE PAS

MAIS QUI EST GARNER ?

Garner est jeune encore. Il a certes vécu sa part de zone, mais loin de l’intérêt des caméras. Garner a erré, s’est cherché, seul et au gré des changements de musiciens que tout groupe connaît, et dont certains ne se relèvent pas. Garner a fouiné, fouillé, douté pour finalement s'exposer. De l’effort, de la bourlingue, de la déglingue, d’aucuns en feraient un argument de séduction, de vente, une attitude, mais pas Garner. Ses chansons sont des cartes postales envoyées de chez lui, c’est-à-dire de partout ou de nulle part. L'artiste est un voyageur qui a sillonné l’Inde, le Mexique et l’Amérique centrale, mais le paradoxe est là : il nous parle de Berlin, de Brest parce qu’il conjugue ses mots au présent.

Garner

Christophe Dorémus est le complice des débuts. Garner nous invite dans son univers musical, loin de la complexité facile que la virtuosité de ses musiciens ou le soin apporté à ses arrangements pourraient pourtant lui permettre d’envisager. Garner ne joue pas avec nous, ne pose pas et ose l’inconfort. C’est en cela qu’il touche juste. Voici donc Garner : auteur, compositeur, interprète qui déterritorialise les lieux communs de la sensibilité quand la musique et les arrangements colorent différemment des mots qu’on est habitué à voir vêtus de rose, de bleu ou de gris.

Garner est autant un baroudeur au cuir tanné qu’un gamin, et l’homme garde de son passé un tempérament de joueur invétéré, aimant le goût du risque et la confiance dans le hasard. Sa nature l’incite à miser gros sans aucune garantie de gagner et force est de constater que ça lui a plutôt réussi : voici un artiste qui, n’étant pas issu du sérail, a réussi en l’espace de quelques années à fédérer autour de son projet, d’abord, puis de son premier album Bas les armes, des musiciens aussi talentueux, respectés et différents que Benoît Simon, Tangi Miossec, Vincent Taeger (Poni Hoax, La Grande Sophie, Le Sacre du Tympan), et Ludovic Bruni (Le Sacre du Tympan, Charlotte Gainsbourg, Françoise Hardy, Sébastien Tellier, Alain Souchon, Damon Halbarn…) sans oublier, évidemment, Philippe Balzé (Miossec, Saez, Kaolin), le maître d’œuvre de la réalisation technique de l’album avec qui la complicité de Garner est immédiatement audible.

Sa musique ? On pense bien sûr à Bashung, à Taxi Girl, parfois à Manset, mais Garner nous emporte aussitôt loin des références trop manifestes. Ses chansons ne sont pas de celles qu’on entend puis qu’on oublie. Sa musique et son chant, jusqu’à la déclamation, secouent autant notre corps que nos pensées. Il nous reste à vibrer et observer les secondes suspendues, quand le silence envahit l’espace, le temps d’un poème, scandé comme une urgence.

(Cadence Info - 11/2016)

Garner
Nouvel EP En Plein Cœur
Sortie le 28 octobre chez 'Socket Blues'

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