Depuis la nuit des temps, l’homme a fabriqué ses instruments à partir de produits naturels tels que le bois ou les végétaux. Parfois, les os d’animaux ou du corps humain, comme le fémur, le tibia et le crâne ont été utilisés pour produire des sons...
Chez les peuples primitifs, l’instrument de musique était lié à des rites, à des célébrations et occasionnellement comme arme de dissuasion grâce aux bruits produits. La religion s’empara évidemment des pouvoirs sonores de certains instruments, tel le schofar (en corne de bélier), qui devient, du temps de la Bible, un instrument utilisé pour les prières juives. Citons également la conque marine, que l’on retrouve sous d’autres latitudes lors des invocations religieuses.
Plus tard, quand la musique s’est auréolée d’un certain savoir et quand l’homme a appris la musique comme on apprend à lire, les instruments primitifs sont devenus plus complexes à fabriquer. Les os, le bois et les végétaux n’ont plus suffi. À l’ère industrielle, les métaux sont venus en renfort pour élargir la palette sonore, et bien plus tard, quand l’électricité est apparue, l’instrument savant est devenu un enjeu économique, produisant chaque année son lot de nouveauté.
Aujourd’hui, heureusement, les musées nous rappellent que l’homme a souvent construit et bricolé des instruments de musique en partant d’idées toutes simples. Pour vous donner un aperçu de sa capacité à innover et à inventer, voici quelques exemples d’instruments qui ont traversé les générations et qui sont encore utilisés de nos jours.
En Afrique, la calebasse (*) intervient dans la fabrication des hochets, des arcs musicaux et des koras. Elle sert également de caisse de résonance au balafon, le xylophone africain. Les maracas, instrument très répandu dans les musiques latines, utilisent une calebasse entière choisie suivant sa taille. Autre instrument, l’instrument à entrechoc qui utilise une calebasse découpée en rondelle et qui est utilisé au Sénégal pour recevoir les hôtes de marque.
(*) : la calebasse est une plante potagère de la famille des Cucurbitacées. C’est son fruit, à l’état sec et évidé, qui est utilisé le plus souvent pour fabriquer les instruments de musique.
Quant à la carapace de tortue, elle est utilisée par de nombreuses peuplades. Chez les Amérindiens, c’est un instrument de percussion qui se transforme sur la lyre égyptienne en caisse de résonance. La carapace de tortue sert également pour fabriquer certains luths d’Afrique.
Longue trompe à la sonorité extrêmement grave, le didjeridoo est un instrument naturel issu de la branche d’eucalyptus. C’est certainement l’instrument le plus connu des aborigènes australiens. Cet instrument était utilisé à la façon d’un appeau pour appeler le kangourou, voire pour imiter le chant du martin-pêcheur.
Excellent support de résonance, le bidon et la boîte de conserve sont devenus rapidement des matériaux de récupération incontournable pour celui qui veut s’adonner à la musique. Facile à se procurer et à utiliser, ils trouvent chez les Africains toutes sortes d’utilisations en devenant avant tout des instruments à percussion, mais aussi, et de manière inattendue, en servant de caisse de résonance à une guitare bricolée, voire à un violon. Pour les cordes, du fil électrique ou du fil à pêche fera largement l’affaire !
Instrument évoquant, dès qu’on l’entend, les îles et les plages ensoleillées, le steel-drum est constitué d’un fût de pétrole façonné. C’est l’instrument emblématique des îles caraïbes et en particulier de l’île de Trinidad. Présent aussi bien dans la musique calypso que dans les musiques folkloriques, la frontière musicale du steel-drum s’est considérablement élargie ces dernières années. Le jazz, la musique de films et même la musique classique se sont emparés de sa sonorité ; ce qui démontre l’énorme potentiel de cet instrument capable de faire vibrer l’âme du musicien comme celle du compositeur.
D’autres instruments cousins sont à mentionner : le cajón, instrument argentin, est une simple caisse de bois frappée avec les mains. Il est utilisé en flamenco. Le 'ka guadeloupéen', instrument de percussion des esclaves, est le symbole de toutes les résistances, Utilisé à bord des bateaux négriers lors des longs voyages, le Ka était un fût de rhum tendu d’une peau de bête.
Ils sont certainement les instruments les plus insolites de la sélection. D’abord le tambour d’eau (ou tambour assakhalabbo) qui, grâce à son concept original lié à sa simplicité de fabrication (une demi-calebasse flotte dans un récipient plus ou moins rempli d’eau), est capable de produire de magnifiques sonorités métalliques non exemptes de réverbération naturelle. Le percussionniste frappe avec une baguette soit sur la calebasse, soit sur le bord du récipient. Le tambour d’eau se rencontre aussi bien en Afrique, qu’au Mexique ou en Nouvelle-Guinée.
Le jaltarang indien : il est composé de dix à vingt bols en porcelaine de différentes tailles et disposés en demi-cercle devant le musicien assis. La note de chaque bol est obtenue grâce à un volume d’eau précis. Aussi simple à construire que le tambour d’eau, cet instrument de percussion mélodique est capable de produire de nombreuses mélodies. Sa sonorité est à rapprocher du glassharmonica. Et enfin, le bouteillophone européen, qui correspond à une sorte de carillon composé d’un jeu de bouteilles accordé selon les niveaux d’eau. Par la suite, une version mécanique et équipée d’un cylindre tournant a vu le jour.
La conception de cet instrument, qui n’a d’autre but au départ que d’être un outil pour scier et abattre les arbres, est une idée géniale ! La scie musicale est l’un des rares instruments qui concilie un matériau de récupération et un outil de musicien, l’archet. La scie musicale doit être longue et large pour vibrer et résonner lorsqu’on la frotte avec un archet de violoncelle ou lorsqu’on la frappe avec un maillet. Des compositeurs séduits par la sonorité qui s’en dégage ont écrit de nombreuses pièces à son intention.
La planche à laver, bien sûr ! Encore utilisée aujourd’hui par certaines formations de New Orleans, le 'washboard' remplace en quelque sorte la batterie et s’utilise avec des dés à coudre que l’on racle rythmiquement sur la planche. Outre la musique jazz, le washboard a été utilisé aux premières heures du blues.
Remis au goût du jour par certains groupes de musique électro, le quijada est une percussion afro-péruvienne utilisée à l’époque des conquistadors. Elle est constituée d’une mâchoire d’âne que l’on gratte.
Par Elian Jougla (Cadence Info - 06-2011)