ANAIS CROZE : HELLNO KITTY - PORTRAIT DE LA CHANTEUSE

Son troisième album studio Hellno Kitty est un vrai retour aux sources, car pour A l’eau de Javel, sans album précédent, elle avait misé uniquement sur des reprises de chansons peu connues datant des années 30 aux années 60 ; Sombreros et Mantilles étant la chanson la plus célèbre du disque. Hélas, ce véritable défi aux temps passés se révéla un challenge perdant malgré la fantaisie engagée par la chanteuse.

Anaïs, qui a pour habitude de tester d’abord ses chansons sur scène avant de les capturer en studio, nous offre à travers ce nouveau disque le même ton décalé et humoristique qu'à ses débuts. N'utilisant qu'un habillage orchestral minimaliste où la guitare acoustique et les voix prédominent, les chansons de Hellno Kitty ont suivi un long cheminement avant de nous être proposées. Tempo, groove, poursuite de mots au débit variable, rien n'est laissé au hasard. Anaïs prend de la hauteur en ne proposant pas que des chansons « rigolotes » pour ne pas dire futiles. En prêtant l’oreille derrière l’apparente légèreté des rythmes, quelques messages plus profonds surgissent (Slam Collectif et son texte/sketch écolo est certainement l'un des exemples les plus marquants).

Parmi les dix titres que contient l’album (dont deux sont repris sous un autre habillage orchestral), la chanson en initiales DRH possède une douce pulsion reggae et pourrait bien devenir le futur hit de la chanteuse, à moins que cela ne soit What Would We Have Done Without Joni Mitchell ; l'outsider de service avec son rythme léger et entraînant balançant entre béguine et calypso. On écoute et on accroche tout de suite rien qu’avec ces deux titres. Avec leur côté direct, ces chansons sont calibrées pour les passages radio. Et il en faut  !

ANAIS : DRH

Anaïs possède aussi un talent de conteuse qu’elle distille à travers des sujets banals sur un ton enflammé ou ironique. Une Petite Fuite appartient à cette dernière catégorie. Les premières paroles nous donne envie de connaître la suite avec impatience : « Lui, il s’appelle Théo. Il a deux ans. Comme tous les petits garçons de son âge, Théo aime surtout jouer. Ce matin, Théo mange du caca dans le bac à sable avec son ami Mathis quand soudain il se met à pleurer. Sa mère accourt. Elle le prend dans ses bras et comprend vite le problème… » Suite à plusieurs scénarios du possible, la petite fuite bien innocente du départ peut-être aussi celui d'une tragédie, d'une catastrophe. Finalement, la morale de cette chanson est bien évidemment de défendre une position écolo.

En dehors de tout discours élogieux, le talent d’une chanteuse peut se mesurer simplement en l’écoutant chanter. Les premières secondes qui introduisent la chanson Oublie-Moi avec le re-recording de la voix qui rythme les paroles tout en les décalant progressivement force le respect ; d’autant plus quand la voix d'Anaïs bascule soudainement avec des intonations bluesy à la Janis Joplin !

EN CONCLUSION

Pour les personnes qui ne connaissent pas encore l’univers d’Anaïs Croze, Hellno Kitty est un disque qui résume assez bien sa personnalité. Sans prétention, Hellno Kitty regorge de petits détails musicaux qui peuvent sembler anodins, mais qui reflètent en réalité une somme de travail considérable (L’Autotune, Oublie-Moi). L’autre point fort d’Anaïs sont ses paroles. Elle y évoque l’amour avec de jolis mots poétiques qui coulent et virevoltent (J’attends mon Joe). Sa part de sensibilité et ses qualités d'auteur et de compositeur se côtoient sans fausses notes. Que demander de plus !

Par Elian Jougla (Cadence Info - 11/2014)