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CHANSON

AXELLE RED - "ROUGE ARDENT" INTERVIEW

Sorti en 2013, le dernier album de la chanteuse belge Axelle Red est-il aussi chaud que la couleur annoncée. Rouge ardent, tel est son titre, indique un retour aux influences soul et pop. Comme à ses débuts, la chanteuse alterne entre un esprit 'Motown' et quelques ballades aux tempos langoureux. Pour autant, a-t-elle abandonné la musique folk de ces précédentes productions ? Cela semble être le cas, même si quelques soupçons de country traînent ici ou là. Comment a été conduit le projet Rouge Ardent ? Pourquoi retourne-t-elle si souvent aux États-Unis pour enregistrer ses albums ? Elle s’en explique à travers cette interview conduite par Sébastien Folin.


INTERVIEW AXELLE RED

S. F : bonjour Axelle Red. « Rouge ardent », peut-on considérer cet album comme un album anniversaire, puisque cela fait déjà vingt ans que votre premier disque est sorti ? De quoi aviez-vous envie pour ce projet ?

Axelle Red : c’est quand l’album a été prêt que je me suis dit : « Tiens, cela fait 20 ans ! » Comme dit mon mari, avec qui je collabore artistiquement : « Il est temps que tu réécoutes tes albums. » Je ne le fais jamais. J’ai tendance à sauter des étapes et le public, peut-être, n’arrive plus à me suivre. Seulement, on ne peut pas penser au public quand on crée. Je pense que cet album représente tout ce que j’ai réalisé jusqu'à présent. Il inclue les couleurs de l’album précédant qui avait le son Woodstock.

S. F. : vous avez modifié votre façon de créer sur cet album. Par exemple, l’album précédent (ndlr : Un cœur comme le mien) avait été composé à la guitare, mais cette fois-ci vous avez redécouvert le piano. Pourquoi ce changement de méthode ?

Axelle Red : ce sont des étapes.

S. F. : d’être allé vers le piano ?

Axelle Red : le piano, c’est le premier instrument sur lequel je composais. D’ailleurs, y a des mélodies qui viennent avant le piano. Je suis mélodiste et les mélodies me viennent comme ça. Je les enregistre d’abord sur mon portable et après je vais chercher les accords… Je joue de la guitare depuis seulement quelques années, ce qui explique que mes deux derniers albums étaient basés sur cet instrument. En fait, je me sentais un peu coupable d’avoir laissé le piano. Sur cet instrument, on compose différemment.

S. F : qu’est-ce que ça a révélé au niveau de la création ?

Axelle Red : j’ai toujours été une immense fan de Carole King (ndlr : Carole King compose la majorité de ces titres au piano). C’est elle qui a écrit les plus belles chansons pour Bruce Springsteen et Aretha Franklin. Ce sont des chansons qui sont pop entre parenthèses, car tu peux aussi les rendre soul, jazz ou rock. Pour cet album, j’ai d’abord composé quarante chansons. Puis j’en ai gardé seize, puis dix… Ce qui est frustrant, après en avoir écrit un aussi grand nombre, c'est d'avoir à rejeter un texte ou une idée pour ressentir, finalement, qu’une partie de l’histoire est absente.


AXELLE RED : ROUGE ARDENT

S. F. : vous avez enregistré cet album aux États-Unis, à Memphis. Vous y aviez enregistré plus d’une fois. L’album précédent, c’était à Woodstock avec The Band, les musiciens de Bob Dylan. Qu’est-ce qui vous attire aux États-Unis ? Pourquoi allez-vous là-bas systématiquement ?

Axelle Red : je n’enregistre pas tout là-bas. J’ai enregistré trois albums sur place. Le premier, c’était « A tâtons », et depuis j’ai continué à travailler avec des musiciens de là-bas, même s’il y a des choses que je fais chez moi, dans mon studio, comme Neil Young dans sa « grange » (rires) Il y a une partie du disque qui a été enregistré à New York. C’est le deuxième album que je coréalise avec Mark Plati. Il y possède un petit studio. Plati a travaillé avec Bowie et Bashung. Il ne parle pas un mot de français, mais il connaît toutefois un peu la France… Tout ça pour dire qu’il y a des choses que je trouve passionnante aux États-Unis, comme de combiner plusieurs éléments pour obtenir quelque chose d’original. Un exemple explique bien cela. Je travaillais avec mon batteur Steve Potts. À moment donné, j’ai pris son casque retour et je lui ai dit : « Oh ! Ma voix, elle est vraiment forte dans ton casque. Je pensais que tu l’entendais moins pour avoir le bon groove. » Et il m’a répondu : « Non, sans ta voix, je ne peux pas jouer. C’est ton émotion qui me fait jouer comme ça. » Et je voyais qu’il avait la chair de poule en me le disant… Et puis, je me suis rendu compte qu’à chaque fois il chantait. Sur toutes les bandes, il n’y avait pas que la batterie, il y avait aussi sa voix !

S. F : quel est votre rapport avec la langue française, vous qui avez beaucoup d’influences anglo-saxonnes ?

Axelle Red : j’aime le français, mais j’aime aussi l’anglais. Des gens me disent : « Mais pourquoi tu chantes toujours en français, si tu as toutes ces racines en anglais ? » Cette langue, le français, à force de la travailler, je la connais. J’ai trouvé une méthode pour la travailler. Elle est belle. Elle a sa poésie. Son « son » est très difficile à chanter parce que c’est du fond de la gorge qu’il part, alors que pour l’anglais ou l’espagnol, c’est devant. Pour que le texte sonne et swingue, et que je ne le perde pas, je dois apprendre à le chanter et cela prend du temps. En même temps, je veux que cela sonne très français, et non à l’anglaise, tout en lui gardant un côté « ouvert ». Une fois que j’ai enregistrée et que je suis contente des voix, je trouve alors qu’il y a une valeur ajoutée. C’est beau. Ces « sons », je les aime. C’est romantique.

Transcription Patrick Martial (Cadence Info - 10/2014)



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