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JAZZ ET INFLUENCES


JACKY TERRASSON 'TAKE THIS'
Un piano jazz aux multiples facettes

Dans son dernier album, le pianiste de jazz Jacky Terrasson met en avant ses racines et ses influences multiples, alliant tour à tour (ou parfois en même temps) musique classique, jazz hard-bop, couleurs antillaises sur des mélodies pop ou des rythmes hip-hop. L’album Take This regorge d’énergie pure, de notes incandescentes et d’inventivités, comme en témoignent les reprises éclatées de Take Five de Paul Desmond et de Come Together des Beatles.


JACKY TERRASSON : ‘PREND ÇA’, NOUS DIT-IL…

Ses flopées de notes vous percutent au cœur. Si l’on excepte les titres Blue In Green et Letting Go qui sont deux lentes ballades, tous les autres titres de Take This mettent un point d’honneur à vous démontrer que le piano est avant tout un instrument de percussion. Chez lui, contrairement à de nombreux pianistes de jazz, le dialogue entre piano et percussion joue les enchères dans le bon sens du terme : les breaks participent à la relance ou provoquent quelques volte-face inattendues. Des réjouissances dans lesquelles le chanteur Sly Johnson - qui rappelle quelque part la virtuosité vocale d'Al Jarreau - trouve parfaitement sa place (Kiff, Take Five).

À ce bouquet rythmique se mêle aussi un souffle lyrique porté par quelques mélodies populaires connues de tous, mais que l’arrangeur pianiste à l’intelligence de camoufler adroitement pour que le discours général du disque reste cohérent. En effet, le piège tendu a été évité : le rythme hypnotique du 5/4 de Take Five est bousculée et la ligne de basse de Come Together, chère à Paul McCartney, est remplacée par un balancement pianistique en forme de calypso.

Avec plus de deux décennies d’expérience scénique, Jacky Terrasson est un pianiste aguerri qui n’a plus rien à prouver, si ce n’est d’apporter du sang neuf dans une musique qui a parfois du mal à trouver de nouvelles fontaines de jouvence. Les improvisations tantôt rythmiques (Kiff, façon Erroll Garner), tantôt fluides (Un poco loco, sans référence au style de son auteur Bud Powell, au piano électrique), ne sont jamais gratuites. Toutefois, bien qu’étant le seul maître à bord, on regrettera peut-être l’étroitesse du dialogue avec les autres musiciens qui se borne essentiellement à une complémentarité rythmique. C’est peut-être là le seul reproche à faire concernant cet album, même si la "com" est exempt de tout reproche.

Nul doute à avoir, Jacky Terrasson place le dialogue musical dans un contexte où le rythme l’emporte sur le reste (si l’on excepte les deux ballades du disque). Les racines africaines et antillaises sont le cœur de Take This ; un album qui ravira certainement les amateurs d'un jazz provocateur en ne manquant ni de générosité ni de formules rythmiques, il va sans dire ! Pour accomplir ce tour de force, le pianiste a réuni des musiciens venant d’horizons divers : le bassiste américain Burniss Travis, Sly Johnson, un chanteur et human beatboxeur virtuose (ex Camille, Eric Truffaz), le batteur cubain Lukmil Perez (Tito Puente) et le percussionniste malien Adama Diarra (Dee Dee Bridgewater, Salif Keita).

Take This est un album dans lequel la « pulsion » s'écoute passionnément.

Jacky Terrasson : Take This (2015 – Impulse)

  • 01. Kiff (3:35)
  • 02. Un Poco Loco (4:12)
  • 03. Take Five (Take 1) (5:12)
  • 04. Come Together (3:23)
  • 05. Dance (3:18)
  • 06. Blue In Green (2:59)
  • 07. November (6:23)
  • 08. Take Five (Take 2) (4:13)
  • 09. Maladie d’amour (3:15)
  • 10. Somebody That I Used To Know (3:34)
  • 11. Letting Go (4:40)

Par Elian Jougla (Cadence Info - 04/2015)


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