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CLASSIQUE / TRADITIONNEL


L’OPÉRA ITALIEN DE ROSSINI ET 'LE BARBIER DE SEVILLE'

Après les heures glorieuses de Monteverdi au début du 17e siècle, lentement l'opéra italien se dégrade. À l'aube du 19e siècle, il ne reste plus grand-chose de la saine conception originelle dans les milliers d'opéras qui naissent chaque année et dont les Italiens font une consommation effarante. Seul Rossini semble alors lui donner une nouvelle santé en le faisant sortir de sa médiocrité…


UN MANQUE DE RESPECT POUR LA MUSIQUE

À l'aube du 19e siècle, on compose un opéra pour faire plaisir à un chanteur. Dès qu'un musicien a sous la main un soprano, un ténor, il fait nouer rapidement une intrigue par un librettiste et compose en quelques jours une œuvre que l'on applaudira évidemment avec frénésie. Lors de l'interprétation, les airs sont défigurés et les chanteurs s'arrogent le droit de les varier, de les parer de fioritures afin de montrer leur virtuosité. De son côté, l'orchestre accompagne sans plus. Réduit au strict minimum, il n’est plus question pour lui de participer à des effets dramatiques. D'ailleurs, on ne l'écoute pas souvent. C'est le règne du « Bel canto » et de la facilité. La décadence est telle que les théâtres italiens refusent les œuvres de Mozart jugées trop difficiles.

L'opera seria et l’opera buffa se partagent les faveurs du public. L'« opera buffa » entièrement chanté (contrairement à notre opéra-comique) a pris place entre les actes de l'« opera seria ». Malgré tout deux compositeurs émergent parmi les centaines de musiciens obscurs qui encombrent la scène lyrique à la fin du 18e siècle et au début du 19e : Paësiello (1741-1816) et Cimarosa (1749-1801).

Décor original créé par Alessandro Sanquirico pour la première de La gazza ladra (La Pie voleuse) en 1817


À PROPOS DE GIOACHINO ROSSINI

Gioachino Rossini fait partie de la génération des préromantiques. Il naît en 1792 (Weber a 6 ans, Beethoven 22, Schubert n'est pas encore de ce monde). Après avoir été en apprentissage chez un forgeron, puis chez un boucher, il aborde sérieusement la musique vers l'âge de 12 ans. En 1810, on représente son premier opéra à Venise (il a 18 ans). Le succès encourage le jeune musicien qui, en 1813, triomphe avec Tancredi (Tancrède). Puis, c'est L'Italienne à Alger. Rossini est alors l'idole de Venise.

En 1816, Le Barbier de Séville commence une carrière triomphale et ouvre à Rossini les portes des théâtres européens. En 1824, il débarque à Paris et assume la direction du Théâtre Italien. En 1829, à l'Opéra, c'est Guillaume Tell, le 38e et dernier opéra du musicien (en français). « J'attends, dit-il, pour composer, que Meyerbeer et Halévy aient terminé leur sabbat. » Mais après avoir écouté le « sabbat » de Meyerbeer, écœuré, il décide de se retirer de la scène musicale. Il n'a alors que 38 ans. Gioachino Rossini meurt d'une crise de catarrhe en 1868, après avoir écrit quelques pages de musique religieuse.

Parmi ses œuvres les plus célèbres citons : Demetrio e Polibio (Démétrios et Polybe) en 1806 ; L'inganno felice (L'Heureux Stratagème) en 1812  Tancredi (Tancrède) en 1813 ; L'italiana in Algeri (L'Italienne à Alger) en 1813 ; Il barbiere di Siviglia (Le Barbier de Séville) e, 1816 ; Otello, ossia Il Moro di Venezia (Othello ou le Maure de Venise) en 1816 ; La gazza ladra (La Pie voleuse) en 1817 ; Armida (Armide) en 1817 ; Ermione (Hermione) en 1819 ; Guillaume Tell (Guillaume Tell) en 1829.



ROSSINI : 'LA PIE VOLEUSE' (ouverture)
Orchestre 'Münchner Philharmoniker' conduit par Sergiu Celibidache (1995)

LES FACETTES ARTISTIQUES DE ROSSINI

C’est dans le premier tiers du 19e siècle que Rossini donne une nouvelle santé à l'opéra italien et le fait sortir un moment de sa médiocrité, sans toutefois le marquer suffisamment pour l'empêcher de retomber dans la voie de la facilité. On peut dire que l'engouement des Français et des Italiens pour Rossini fut dangereux. On ne retint de son œuvre que l'aspect extérieur, c'est-à-dire justement ce qui gâtait encore l'italianisme que lui seul sut manier avec goût.

Les qualités artistiques du compositeur sont nombreuses. Tout d’abord, il a le don de la mélodie allègre, jaillissant avec facilité, tour à tour exubérante ou rieuse, caustique ou séduisante, aimable ou comique. « J’ai toujours été, dit-il, le grand ami du naturel et de la spontanéité. » dira-t-il. Ensuite, dans les morceaux de musique instrumentale, il se révèle brillant orchestrateur. Ses ouvertures, en particulier, sont du plus heureux effet. Il les anime avec sûreté par ces heureux crescendos dont il a le secret, et qui agissent sur les foules. Nous sommes loin des ouvertures du 18e siècle, ramenées à quelques mesures. Rossini fait redécouvrir au spectateur la joie que procure une ouverture bien faite. Il revalorise l'orchestre en lui confiant l’accompagnement des récitatifs, généralement réservés jusque-là au piano. L'orchestre ne limite plus son rôle à celui d'un simple accompagnement.

Rossini met aussi bon ordre aux fantaisies prises avec les airs. Il impose aux chanteurs les ornements ou les roulades qu’il écrit tout spécialement. Le compositeur signe un coup d'arrêt au règne de l'improvisation personnelle.

Rossini en 1865 (détails)

Mozart, duquel il apprit beaucoup à travers ses quatuors qu'il récrivit d'après les parties de violon et violoncelle, lui donna sans doute le goût de la mélodie chantante et bien frappée. D'autre part, nullement impressionné par le romantisme qui ne le toucha que par contrecoup, il sut se garder de l'épanchement sentimental. Juste parfois un peu de fièvre, d'impatience, pour la vie intérieure du chant.

Rossini devait marquer puissamment l'opéra italien. Nulle en Allemagne, son influence dura près de dix ans en France. Très « psychologue », il avait saisi le goût des Français pour les spectacles majestueux, plus longs que les opéras italiens, qui demeurent ses meilleures réussites.

Ses successeurs ne seront que des imitateurs, des disciples de l'effet à tout prix, tous sombreront dans le mauvais goût, exception faite de Bellini (1801-1835). – Un météore dans le ciel de l'opéra italien. Il avait une veine mélodique atteignant au sublime dans ses meilleurs moments. Son dernier opéra composé en Italie, La Norma, est un chef-d'œuvre. – et Donizetti (1797-1848) – Très adroit imitateur de Rossini, il n'eut toutefois ni son envergure, ni la pureté mélodique de Bellini. Il vint à Paris en 1839, où il finit par triompher avec La Fille du Régiment.


ROSSINI : 'LE BARBIER DE SEVILLE' (Air de la calomnie)
Ruggero Raimondi (Versailles, 1980).

LE BARBIER DE SÉVILLE

« Quelle richesse musicale ! Partout une abondance d'airs heureux, de nouveaux modes d'accompagnement, de raffinement dans les harmonies, d'admirables effets orchestraux ; des intentions dramatiques partout réussies » devait dire Berlioz, après avoir assisté à une représentation.

Tirée de l'œuvre de Beaumarchais qu'elle suit très fidèlement, la pièce de Rossini est le modèle de « l’opéra bouffe ». Elle déborde d’une gaieté folle, fait rire sans effort et équilibre avec bonheur la malice et le lyrisme. « S'il n'y eut jamais un homme pour plaire à des Français, c'est Rossini... Rossini, le Voltaire de la musique. » commentera Stendhal.

© Gallica.bnf.fr - Le Barbier de Séville : Scène du mariage (1800)

L’intrigue comprend quatre personnages principaux : Bartolo veut épouser sa pupille Rosine, mais celle-ci aime le comte Almaviva. Figaro, un joyeux barbier, tire les ficelles de cette intrigue amoureuse et réussit « par substitution » le mariage de Rosine et du comte Almaviva à la barbe du vieux Bartolo, qui en définitive prend la chose du bon côté, d’autant plus facilement que le comte renonce à la dot de Rosine.

Deux airs dominent Le Barbier de Séville : la Cavatine de Figaro et l’Air de la calomnie. Dans la Cavatine de Figaro, le barbier Figaro « vante ses propres mérites, son adresse, la vogue dont il jouit, la ruée des clients qui veulent être par lui seul rasés ou saignés ». C'est un air irrésistible, merveilleusement venu et nullement fait pour la virtuosité pure ; en revanche, à travers une virtuosité plaisante, Rossini atteint le but qu'il s'est proposé, celui de rendre le personnage tout de suite sympathique.

Par M.C (Cadence Info - 12/2021)

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