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MUSIQUE DE FILMS

ENNIO MORRICONE PORTRAIT : SES MUSIQUES DE FILMS EN CONCERT

Pour le moindre amateur de musique de films, le nom d’Ennio Morricone résonne comme une légende. Vulgarisateur d’un style musical contrasté qui est resté longtemps méprisé par de nombreux compositeurs classiques, Ennio Morricone, c’est avant tout une réussite artistique qui a su mélanger mélodie populaire et orchestrations audacieuses. Approchant les 90 ans, l’homme possède toujours une santé surprenante et s’apprête à sillonner l’Europe accompagné d’un orchestre comprenant près de deux cents musiciens. Une occasion rêvée pour découvrir ou redécouvrir ses plus belles musiques.


LA MUSIQUE DE FILMS : UNE CONCEPTION HORS-NORME

Ennio Morricone est un homme courtois qui raconte ses expériences artistiques avec simplicité. Si le compositeur est célèbre pour ses musiques de films (il en a composé 500 et a vendu à ce jour 70 millions d’albums), son cheminement est d’abord celui d’un compositeur de chansons populaires. Ennio Morricone : « Quand j’ai composé ma première musique de films, je travaillais pour une maison de disque, la RCA. Je faisais des chansons pour le grand public, mais de qualité, des grands succès. On utilisait la guitare électrique, alors j’utilisais la guitare électrique… L’expérience accumulée a été essentielle. Il faut tout essayer. C’est comme ça que l’on peut faire ce que l’on veut. »

Affiche de la tournée mondiale

Le célèbre compositeur romain est surtout celui qui a élevé la musique de films au rang de la musique classique en raison de la dimension populaire qu’il a obtenu. On pense bien sûr aux musiques écrites pour les westerns de Sergio Leone et sa série « Il était une fois… » L’utilisation d’instruments inusités dans le style influencera durablement les écritures d’autres compositeurs, et pas uniquement dans les westerns « spaghettis ». Ennio Morricone : « Avec Sergio Leone, on ne parlait pas beaucoup. C’était le réalisateur que je craignais le moins. Quand on se voyait, je lui faisais écouter les morceaux au piano... Et même s’il doutait de son choix, et vous le faisait réentendre plusieurs fois, à chaque fois, il était très content. »

La puissante lenteur des séquences provoquée par Leone permettra au compositeur d’explorer et de mettre en avant sa musique dans des situations où s’affronteront l’image et le son d’une façon absolument inédite pour l’époque. C’est cette musique-là, lyrique à souhait, puissante comme un drame shakespearien, qui contribuera à marquer les esprits et à glorifier le compositeur. Cependant, résumer la carrière de Morricone à ses BO de westerns, ce serait masquer bien d’autres audaces…


DE LA « MUSIQUE APPLIQUÉE » À LA « MUSIQUE ABSOLUE »

De formation classique, si le compositeur est arrivé presque par accident dans la musique de films, l’écoute de ses œuvres de jeunesse comme de celles qui suivront dénotent sans contexte de grandes ambitions. Sa carrière est parsemée de nombreuses musiques de chambre et d’orchestre aux contours souvent avant-gardistes (Concerto pour orchestre -1957, Concerto pour flûte et violoncelle - 1983, Cantate pour l'Europe - 1988, Concerto pour trompette en Ut –1991, Voci del Silenzio – 2002).

Son œuvre sous-entend une opposition qu’il traduit en termes de « musique appliquée » et de « musique absolue ». Ennio Morricone : « La musique appliquée, c’est-à-dire celle du cinéma, sert le film. Elle participe à sa création comme un ingrédient, comme dans une idée wagnérienne qui réunit tous les arts en un seul… Et le cinéma correspond à cette idée. La « musique absolue » naît de la volonté du compositeur. Elle n’est pas au service du réalisateur, de son film. La « musique absolue » est au service des idées du compositeur. »

À partir des années 70, quand la fièvre du western spaghetti retombera, le compositeur renouera avec des orchestrations plus conventionnelles. Cependant, en fonction des commandes, il glissera à l’occasion quelques mélodies que le public retiendra : Here's to you que chante Joan Baez pour Sacco et Vanzetti, la musique angoissante de Peur sur la ville, ou encore le fameux Chi Mai qui servira pour mettre en valeur le valeureux commissaire Jean-Paul Belmondo dans le film Le Professionnel (la popularité de cette musique sera si grande qu'elle sera récupérée et exploitée comme musique publicitaire pour "Royal Canin").


ENNIO MORRICONE : IL ÉTAIT UNE FOIS DANS L'OUEST (Concert)

Si la musique d'Ennio Morricone puise dans les mélodies de chansons napolitaines et traditionnelles (par exemple Le clan des Siciliens – 1969) elle a aussi un certain pouvoir : celui de faire rencontrer art populaire et art élitiste. Morricone considère avant tout la musique comme un art difficile dont l’aboutissement n’est jamais écrit par avance. Ennio Morricone : « Lorsqu’elle est écrite par le compositeur, elle n’est pas grand-chose. Lorsqu’il la confie à un orchestre pour qu’il la joue, elle n’est encore rien, elle n’existe vraiment que lorsque le public l’écoute. Ces trois étapes sont inévitables. Un tableau, on le voit tout de suite en un instant, alors que la musique existe jusqu’à la dernière note. »

Pour Morricone, cette future tournée est peut-être plus essentielle à ses yeux que la moindre musique de films, car c’est souvent lors des concerts que la composition originale se découvre sans l’apparat de l’image, nue, se livrant sans pudeur : « L’émotion d’écouter ce que l’on a écrit est très forte. Je ne pleure pas, mais je ressens quelque chose de très fort à l’intérieur. ». Le compositeur sera en France pour quelques dates qui s'étalent de mars à juillet 2015. Si vous aimez les musiques de Il était une fois dans l'Ouest, de La Califfa ou de Sacco et Vanzetti, le rendez-vous est incontournable.

Par Elian Jougla (Cadence Info - 02/2015)


À CONSULTER

ENNIO MORRICONE/SERGIO LEONE : LE BON LA BRUTE LE TRUAND

Le grand public retient surtout du compositeur sa collaboration avec le metteur en scène Sergio Leone, lui-même associé au western spaghetti. Pour ce cinéma-là, Morricone a composé des scores d’un genre tout nouveau dans lequel s’inscrit 'Le bon la brute le truand', véritable film épique à la maîtrise rare et dans lequel sa musique fait merveille.

ENNIO MORRICONE AU-DELÀ DES FILMS DE SERGIO LEONE (ENTRETIEN)

Ennio Morricone a rarement accordé des interviews. Le voici en 1979, dans un libre échange avec son ami Sergio Miceli. Le compositeur aborde ses débuts dans la profession, sa relation avec les metteurs en scène ou encore ce qu'il retire de ses différentes expériences passées dans le cinéma.


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