MUSIQUE, TRANSMISSION ET INFLUENCE
Toutes les musiques survivent grâce à l’héritage des grandes figures du passé. Il est difficile pour un interprète de s’abstenir de références pour exister vraiment. Cela existe aussi bien dans les musiques écrites que non écrites. Dans le répertoire classique, les maîtres du passé ont toujours eu un certain poids. Même chez les grands compositeurs, il n’est pas de biographie de Mozart, de Beethoven ou de Chopin qui n’évoquent à moment donné l’emprise ou la répercussion d’un héritage musical, source de perfectionnement ou de renoncement.
‘Les légendes françaises du piano’ proposé par la pianiste et écrivaine Catherine Lechnner-Reydellet nous permet de mieux comprendre comment l’influence laissée par les figures d’hier - celle des pianistes classiques du 20e siècle - a agi chez celles d'aujourd'hui, tant au point de vue de leur carrière qu’au niveau de leur propre trajectoire.
Au fil des chapitres, les « disciples » se livrent et évoquent leur « maître ». Tout en relatant leur carrière, des pointes de nostalgie, d’humour accaparent les propos, la part belle revenant à la pédagogie, science qui ne s’écrit pas vraiment, mais qui se transmet oralement plus sûrement.
Tout ou presque de ce qu’il existait comme maîtres du piano au cours du siècle passé est célébré dans ce livre, même si certains sont plus présents que d’autres. Voici quelques noms que vous retrouverez parmi la cinquantaine d’élus : Pierre Barbizet, Nadia Boulanger, Robert Casadesus, Aldo Ciccolini, Alfred Cortot, Jean Doyen, Samson François, Claude Helffer, Yvonne Lefébure ou encore Marguerite Long et Germaine Mounier.
La plupart des pianistes qui deviennent concertistes ou qui occupent des hautes fonctions dans l’enseignement n’ont pas eu un seul maître, mais plusieurs, et c’est souvent de ce croisement d’idées, de ces relations plus ou moins fusionnelles, de conseils plus ou moins porteurs et parfois dirigistes, qu’éclot la nature profonde d’interprétations personnelles. Dans les souvenirs, la technique y est rarement absente, elle serait même plutôt au centre des propos tenus, surtout par les signes extérieurs qu’elle révèle. Toutefois, avec le recul, nombre de souvenirs ou d'anecdotes prennent parfois des allures édulcorées et qui, enrobés d'un certain tact, dédramatise l'image de l’apprentissage de l’instrument et encourage ceux qui chercheraient à y entrer.
On relèvera aussi, non sans humour, une parité homme/femme qui avantage la gent féminine. C’est assez rare pour être souligné, mais il est vrai aussi, qu’en d’autres temps, le piano faisait partie d’une bonne éducation chez les jeunes filles.
Catherine Lechner-Reydellet
Les légendes françaises du piano (préface de Dominique Merlet)
Éditions 'Aedam Musicae'
Broché 346 pages
Paru le 02/03/2020
Prix : 30 €
Par Elian Jougla (Cadence Info - 05/2020)