IL ÉTAIT UNE FOIS PINK FLOYD
Fondé à Londres en 1966, Pink Floyd est né de deux groupes d’amis communs. La formation qui réunit Nick Mason (batterie), Roger Waters (basse et chant), Richard Wright (claviers et chant) et Syd Barrett (guitare et chant) évolue rapidement du rhythm and blues traditionnel vers une musique très originale qui sera vite le prototype de la « psychedelic music » des années 1966-1967.
À cette époque, une nouvelle scène underground prend forme et voit la naissance d’un très grand nombre de groupes. Propulsés par une économie en plein boum après deux décennies d’austérité d’après-guerre, l’idéalisme et l’optimisme sont devenus des sources de partage. « Avec la drogue, on était lassé des chansons pop de 2 ou 3 minutes. On désirait des morceaux plus longs dans lesquels s’immerger. Pink Floyd a été la première musique qui nous faisait rentrer dans une conscience sous acide. Ils pouvaient jouer des riffs de 40 minutes sur un seul titre… » racontera Lindsay, l’ancienne amie de Syd Barrett.
Après deux simples relativement conventionnels (Arnold Layne et See Emily Play, mai 1966 et juin 1967), sort un premier album intitulé The Piper at the Gates of Dawn. Celui-ci est enregistré à Abbey Road en même temps que le Sgt. Pepper’s des Beatles. Les Floyd, qui avait signé un contrat avec EMI, pouvaient venir dans un de ses studios afin d’expérimenter tout un tas de choses quand ils en ressentaient le besoin. Même si l’album lorgne outrageusement vers le psychédélique, The Piper at the Gates of Dawn a suscité de multiples comparaisons avec le Sgt. Pepper’s des Beatles en raison de leur sortie simultanée et de leur influence sur le hit-parade britannique. Au tournant des années 70, Pink Floyd incarne, tout comme les Beatles, l’esprit d’une contre-culture florissante.
En 1968, une fois jetées les bases de la carrière du Floyd, Barrett qui conduit le groupe, montre des signes de faiblesses mentales. Sous l’emprise de l’acide, le comportement irascible du chanteur déstabilise de plus en plus les autres membres. Les anecdotes concernant ses agissements sur scène et en dehors sont si nombreuses qu’elles en deviennent caricaturales et grotesques.
Le 6 avril 1968, suite à leur première tournée, le groupe confirme officiellement que Syd ne fait plus partie des Pink Floyd. Le guitariste David Gilmour, ami de longue date de Mason, Waters et Wright, le remplace. L’arrivée de ce nouveau membre va provoquer une émulsion de créativité, mais aussi apporter une stabilité au groupe qui en avait bien besoin. L’influence de Cyd Barrett n’étant plus présente, les compositions écrites par Mason, Water et Wright, à cause de leur structure et de leur densité laissent place à des musiques plus « accessibles ».
PINK FLOYD, DU PSYCHÉDÉLISME AU SYMPHONIQUE
Les Floyd doivent attendre le film More en 1969 pour que le groupe s'impose sur le continent et l'album double Ummagumma en 1970 pour que leur nom se propage outre-Manche.
Ummagumma réunit dans un premier disque enregistré en public les plus célèbres morceaux de la première période du groupe : Astronomy Domine, Careful with that axe, Eugène et A Saucerful of Secrets. L'autre disque, est composé de quatre morceaux nouveaux, reflets de la personnalité de chaque musicien.
Malgré ces deux albums remarquables, le Floyd n'est encore connu que de rares initiés. En surmontant la perte de Syd Barrett, Pink Floyd n’avait que très peu d’identité publique en dehors de leurs albums. Leur manque de charisme et d’esprit rock’n’roll leur ont néanmoins valu de nombreux fans attirés par la nature paradoxale de leur succès.
En 1970, le groupe devient en France l'égal en popularité des Beatles, des Who ou des Stones grâce à leurs concerts et surtout à Atom Heart Mother, approche symphonique des idées musicales du Pink Floyd qui finit par toucher un public amateur de rock jusqu'alors fermé à leur musique.
Sur scène, Pink Floyd cultive un comportement impassible, mais très calculé, pour que leur public se concentre uniquement sur leur musique. Ils mettent à leur service une extravagante technologie qu’ils développent sciemment pour que leur show reflète exactement leur ambition musicale. Une référence, un gage de qualité, que d'autres groupes tenteront d'imiter.
Meddle avec l'inoubliable Echoes, une seconde et une troisième musique de film (Zabriskie Point et La Vallée) amènent en 1973 Pink Floyd à Dark Side of the Moon. Après huit albums, le groupe surfe sur une vague de popularité que peu de musiciens connaissent. Dark Side of the Moon, album primordial à l’histoire de la rock-music, devient l’un des plus acclamés dans l’industrie musicale : 750 000 exemplaires seront vendus en France quelques mois après sa sortie. Ce disque confirme le Floyd comme l'une des toutes premières attractions musicales contemporaines « toutes catégories ».
En automne 1975, l’album Wish you were here, confirmera sa place de leader dans un rock tout aussi planant qu’inspiré. David Gilmour estimera que le succès phénoménal du disque s’explique par l’équilibre musical et la force émotionnelle qui s’en dégage. Mais après Wish you vere here, l’alchimie au sein du groupe faiblit rapidement. L’effervescence du succès de Dark Side of the Moon a fracturé quelque part l’entente entre les quatre musiciens. Le travail solidaire semble appartenir au passé et des désaccords profonds commencent à apparaître.
DERRIÈRE "THE WALL"
L’année 1979 marque la sortie de The Wall. Conçu par Roger Waters, ce double album ambitieux comporte une performance spectaculaire en live ainsi qu’un long métrage novateur basé sur des dessins animés conçus par Gerald Scarfe. The Wall devient rapidement un incontournable essai, aussi excessif que le groupe et ses prouesses scéniques qui demande pas moins de 120 personnes pour tout organiser.
À chaque instant, l’énorme machine est prête à imploser. La cocaïne circule et, en général, cela n’aide pas. Pendant l’enregistrement de The Final Cut en 1983, Roger Waters, qui décide de tout, finit par virer Rick Wright du groupe, le membre le plus positif et le plus paisible des quatre. Le claviériste est dès lors considéré comme un musicien de studio que le groupe appelle à l’occasion pour une session ou deux. Waters contaminé par une sorte d’angoisse existentielle, finissait par traiter très durement les personnes qui l’entouraient. Rick Wright, l’un des fondateurs du groupe, sera le premier à en faire les frais.
Au milieu des années 80, ce qui était en gestation ne tarde pas à éclater au grand jour. Roger Waters et le reste du groupe ne s’entendent plus. Ils voyagent séparément et c’est lui qui impose sa vision à tous les autres lors de l’enregistrement du dernier album studio.
Après le départ de Roger Waters en 1985, les membres du groupe prennent des chemins séparés jusqu’en 1987, année où Gilmour et Mason décident de reprendre les choses en main, en relançant le groupe à travers des concerts, en sortant des albums, et en réintégrant Rick Wright au sein du groupe.
En 1996, Pink Floyd entre au "Hall of Fame" du rock’n’roll américain. Ils reçoivent ensuite le même honneur au Royaume-Uni en 2005. Le 2 juillet 2005, pour la première fois en près de 25 ans, le groupe se reforme pour une ultime représentation au Hyde Park de Londres. Face au public, les tensions encore présentes sont intelligemment effacées. Seule la musique qu’ils jouent ensemble est au-dessus de tout le reste.
La hache de guerre semblait avoir été enterrée et le décès de Rick Wright, survenu en 2008, sonnera le glas de leur extraordinaire aventure. Pink Floyd venait de perdre un souffle de vie, celui d'un être chaleureux, gentil et souriant. Ceux qui lui ont survécu, Gilmour, Mason et Waters, comprennent que leur histoire commune ne sera plus. Depuis, Waters et Gilmour poursuivent une carrière en solo, rejoint à l’occasion par Nick Mason.
Plus de 40 ans après leur premier album, Pink Floyd reste célèbre en particulier à cause de ses apparitions scéniques très étudiées (son quadraphonique, laser, dessins animés, avions téléguidés, projection de diapositives ou de liquides pop-art sur les musiciens, sur les spectateurs ou sur écran, etc.). Pink Floyd a créé une musique parmi les plus acclamés de tous les temps et ont vendu des dizaines et des dizaines de millions d’albums.
DISCOGRAPHIE PINK FLOYD
- The Piper at the Gates of Dawn (1967)
- A Saucerful of Secrets (1968)
- More (1969)
- Ummagumma (1969 - le premier des deux disques du double album est en public)
- Atom Heart Mother (1970)
- 1970, Zabriskie Point, (1970 - musique du film éponyme de Michelangelo Antonioni.
- Meddle (1971)
- Obscured by Clouds (1972)
- The Dark Side of the Moon (1973)
- Wish You Were Here (1975)
- Animals (1977)
- The Wall (1979)
- The Final Cut (1983)
- A Momentary Lapse of Reason (1987)
- Delicate Sound of Thunder (1988 - live)
- The Division Bell (1994)
- P·U·L·S·E (1995 - live)
- Is There Anybody Out There ? The Wall Live 1980-81 (2000 - live)
- The Endless River (2014)
- A Foot in the Door : The Best of Pink Floyd (2011)
Filmographie (sélection)
- · Live at Pompeii d'Adrian Maben (1972)
- · The Wall, d'Alan Parker, avec des animations de Gerald Scarfe (1982)
- · Delicate Sound of Thunder, vidéo de la tournée de 1988.
Par D. Lugert (Cadence Info - 05/2016)