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BIOGRAPHIE/PORTRAIT DES ROLLING STONES : LES ANNÉES CULTES

Un fan : « J'ai entendu "I can't get no, satisfaction" par un groupe qui s'appelle les Rolling Stones. C'était en août 1965 et je sais que je ne pourrai jamais plus être comme avant. »


LA NAISSANCE D'UN NOM : THE ROLLING STONES

1961 - Il était une fois un jeune homme du nom de Keith Richard, qui se promenait à Richmond, avec des disques de Chuck Berry sous le bras. En montant dans le bus, il fait la connaissance d'un autre amateur de Chuck nommé Michael Philip Jagger (Mick Jagger). Tous deux passionnés de blues et de rock'n'roll se lient d'amitié et décident de former un orchestre avec un ami commun, Richard Taylor. Les trois grattent un peu de guitare et enregistrent une bande composée de quelques titres blues. (consulter Les Rolling Stones, une histoire d'amitié d'adolescent)

Keith, Mick et Richard sont pauvres et n'ont qu'un vulgaire magnétophone, mais par chance pour eux, la bande parvient aux oreilles d'Alexis Corner, l'un des pionniers du blues anglais. Korner, qui possède un club, les invite à se produire. Ils y rencontrent un tout jeune homme blond au sourire charmant, ami d'Alexis, Brian Jones. Le "blondinet" joue de différents instruments, ce qui n'est pas pour déplaire à Mick et Keith. Un nom est choisi, Rolling Stones, du titre d'un blues de Muddy Waters, leur idole.

Charlie Watts, alors batteur d'Alexis, se joint aux quatre hommes et, quand un piano est disponible, un ami de Brian, Ian Stewart, vient se joindre au groupe. La musique est tout de suite choisie d'un commun accord, ce sera du blues et plus exactement du rhythm'n'blues, tel qu'il existe alors aux "States", mais attention !... adapté selon leur convenance. Le pari est risqué, mais les Rolling Stones ont déjà le courage de leur ambition : développer un style musical personnel à travers des mots simples et un son efficace.

Les Rolling Stones viennent s'installer à Chelsea, un quartier de Londres, dans un appartement où ils connaissent d'abord la misère et la faim. Sans contrats, Mick et Keith devant continuer leurs études, sans argent, c'est la mère de Keith qui prend soin d'eux.

En 1962, malgré un matériel précaire, ils accompagnent le chanteur John Baldry et c'est le coup de foudre pour la scène et le public : jouer sur scène toute leur vie, c'est cela leur but ! Cependant, Mick Taylor s'en va et un nouveau bassiste du nom de William Wyman le remplace.

Giorgio Gomelsky, qui devient leur manager, les fait jouer à l'hôtel de la Gare de Richmond. Les Rolling Stones font ainsi leurs premières armes et connaissent leur premier succès face à un public vierge, ne demandant qu'à se faire violer par cette musique sauvage et dure, jouée par cinq voyous !

The Rolling Stones en 1964 - Ext. Pochette de l'album éponyme

Quelque temps plus tard, un publicitaire de 19 ans, Andrew Loog Oldham, remarque leur prestation scénique au stade municipal de Richmond. Grâce à un ami, Eric Easton, il leur fait enregistrer leur premier disque : Come On de Chuck Berry. Cette première tentative, faute d'être un chef-d'œuvre, démontre toutefois la spontanéité et l'enthousiasme du groupe.

La chance leur sourit lorsqu'un soir de l'hiver 1963, quatre gars de Liverpool, qui ne sont autres que les Beatles, leur rendent visite au Crawdaddy, attirés par leur réputation. John Lennon et Paul McCartney leur proposent d'enregistrer une de leurs compositions, I wanna be your man… le titre rencontre un certain succès et aussitôt après un 45 tours est publié en janvier 1964, comprenant Poison Ivy et Bye Bye Johnny.

L'IMAGE DES ROLLING STONES

La réputation des Rolling Stones s’établit auprès du public grâce à deux tournées effectuées dans leur pays, l'une en octobre 1963 avec les Everly Brothers et Bo Diddiey, et l'autre en janvier 1964 avec les Ronettes. Cinq mois plus tard est publié le premier album, The Rolling Stones, composé de standards du rock et de rhythm'n'blues. Si l'album signe le départ d'une carrière prodigieuse en contenant une succession de titres qui figurent parmi les meilleures ventes de l'histoire du disque, le groupe est déjà sujet à de nombreuses critiques, à des scandales visant autant la vie publique que la sphère privée.

Tout ce mélange détonant contribue à donner une certaine idée des Stones, à créer une image de marque. Ainsi, quand ils apparaissent à la télévision, la grande presse commence aussitôt sa campagne de dénigrement… De toute évidence, les Stones dérangent l'Anglais moyen. Ils apparaissent sales ; leurs cheveux trop longs sont mal peignés ; les vêtements qu'ils portent, débraillés, sont vulgaires et voyants ; leur attitude est celle des voyous. Les Stones sont haïs par les adultes, alors que paradoxalement les Beatles sont considérés mignons malgré leurs longs cheveux ! Fort heureusement pour les Rolling Stones, le fan est à l'image de ses idoles ; il se reconnaît dans ces cinq "zonards" qui hurlent, se déhanchent, grimacent, avec ce besoin physique de s'extérioriser, de se défouler dans le son et l'image.

En juin 1964, lors de leur première tournée aux États-Unis, leur scandaleuse réputation les devance. Les maires interdisent à leurs administrés d'aller voir le spectacle, tandis que Dean Martin, avant de les introduire sur scène au Hollywood Palace, prie le public "de ne pas le laisser seul avec ces singes". Bref, on les boycotte systématiquement. Mais la force des Rolling Stones est de faire entendre la musique des Noirs jouée par des Blancs dans un pays où la ségrégation est encore de mise ; une part d'audace qui sera "entendue" chez les teenagers.


THE ROLLING STONES : MISS YOU (1978 - album Some Girls)
Malgré le succès atteint par le titre, le groupe est alors à un tournant de son existence. À la fin des années 70, il a le choix entre aller de l'avant - quitte à décevoir les fans de la première heure - ou retourner aux fondamentaux, c'est-à-dire le blues et le rhythm'n'blues.

Troisième groupe anglais à ravager les USA après les Beatles et le Dave Clark Five, les Rolling Stones connaissent désormais un triomphal et hystérique succès partout où ils se produisent. Lors de leur passage sur la scène parisienne de l'Olympia, c'est l'émeute. Des centaines de fans enthousiastes cassent les sièges à la fin du show, brisent des dizaines de vitres sur le boulevard. Constat : 150 arrestations et 2 millions d'anciens francs de dégâts sont constatés. Cela n'empêchera pas les Stones de revenir en France régulièrement et même de s'installer en famille sur la côte d'Azur pendant l'année 1971 pour enregistrer un de leurs meilleurs albums : Exile on Main Street.

Pour les Rolling Stones, l'année 1965 commencera bien mal en ayant des démêlés avec la justice pour usage de stupéfiants. Or, si cela ne nuit pas à leur production discographique, cela usera les nerfs ! De quoi justifier le titre (I can't get no)Satisfaction, qui sort en août 1965, et qui apportera une réponse claire jusqu'à devenir le titre de référence pour le groupe.


DES TUBES ET ENCORE DES TUBES

À leurs débuts, en matière de son, les Rolling Stones ne connaissaient pas grand-chose. La définition sonore du groupe n'aurait certainement pas été la même sans l'intervention des différents producteurs et ingénieurs du son qui se sont succédé : Oldham, Phil Spector, Glyn Johns, Jimmy Miller, sans oublier Brian Jones.

Au fil du temps, le groupe va abandonner progressivement les reprises pour se consacrer à des compositions personnelles. Signées au début par Nanker/Phelge, patronymes de Jagger/Richard, naîtront quelque chef-d'œuvres de la Rock-Music : Get off my cloud (1965), As tears go by (1965), Paint it black (1965), Lady Jane (1966), Jumpin' Jack Flash (1968), Honky tonk woman (1969), Angie (1973)... la liste pourrait s'allonger encore !

L'album Aftermath, sorti en 1966, est considéré pour les fans de la première heure comme leur meilleur disque. Toutefois, n’oublions pas le trop discrédité Between the buttons (1967) et ses fameux titres All sold out, Miss Amanda Jones et Something happened to me yesterday ; le sophistiqué et élaboré, mais aussi mal-aimé Their Satanic majesties request - qui devait s'appeler à l'origine Cosmic Christmas - avec sa pochette en trois dimensions, et qui coûta plus de douze millions d'anciens francs !

À ce stade du discours, il est bon de rappeler quelques faits devenus aujourd'hui historiques et qui témoignent de l'ambiance assez folle qui régnait alors sur scène et même au-delà...

Le premier fait remonte au 6 décembre 1967. Depuis un mois les Stones avaient entamé une nouvelle tournée sur le sol américain malgré les craintes émises quelques mois plus tôt par Jagger : « Nous ne recommencerons plus jamais une tournée aux États-Unis. Le travail est beaucoup trop difficile et vous ne récoltez que tuile sur tuile. Il faut vraiment avoir effectué une tournée là-bas pour se rendre compte à quel point c'est épouvantable. »

Le soir du 6 décembre, les Stones jouent à Altamont en Californie devant un public houleux. Payés par les Rolling Stones pour faire régner l'ordre, quelques "Hells Angels" vont franchir la ligne interdite en rouant de coups des spectateurs et en tuant un jeune noir qui voulait s'attaquer à Jagger. Cette histoire qui est entrée dans les annales de la Rock-Music donnera lieu à un film, Gimme Shelter, où l'on voit la scène tournée et commercialisée un an après le drame.

Le second, d'un tout autre genre, se déroule au mois de décembre 1968, durant un show télévisé nommé le "Rock'n'Roll Circus" - mais qui ne sera jamais montré et même détruit par la suite. Ce jour-là, un véritable vent de folie envahit le plateau pour une farce artistique et surréaliste. Il faut simplement imaginer l'énergie des Stones, la fougue destructrice des Who, et même un super-groupe composé de Mitch Mitchell à la batterie, Keith Richard à la basse, Eric Clapton et John Lennon aux guitares, jouer au milieu d'animaux, d'acrobates et de clowns pour comprendre que le nom du show n'était pas usurpé !


LES ROLLING STONES AU TOURNANT DES ANNÉES 70

Comme indestructible au temps qui passe, les Rolling Stones abordent les années 70 avec assurance malgré la disparition de Brian Jones. Le compagnon de la première heure s'était retiré dans sa maison du Sussex après un séjour dans un hôpital, usé par la vie, les femmes, la musique, les excitants et las de jouer les inutilités au sein du groupe qu'il quittera finalement en juin 1969. Remplacé par le guitariste Mick Taylor, Brian sera trouvé mort dans sa piscine peu de temps après.

Afin de contrôler plus efficacement leur destinée, les Stones changent de maison de disques et se font distribuer par le nouveau catalogue 'Kinney' dont ils deviennent les vedettes tout en créant leur propre marque, ‘Rolling Stones Records’.

En 1972, de retour aux États-Unis, les Rolling Stones font appel à la star de la musique noire, Stevie Wonder pour jouer les parties de clavier. Huit cent mille demandes de billets sont tirées au sort pour occuper les quatre-vingt mille places… un record d'affluence ! (un album pirate témoignera de cet événement, mais ne sera distribué qu'au USA).


THE ROLLING STONES : ANGIE (1973 - album Goats Head Soup)
L'une des plus belles ballades du groupe, d'une douceur exemplaire. Le succès rencontré auprès du public en atteste.

LE JEU SCÈNIQUE DES ROLLING STONES

Les Rolling Stones sur scène, c'est avant tout Mick Jagger. Outrancier, il est l'archétype des chanteurs de rock, même si sa voix par ailleurs unique n'est pas toujours parfaitement juste. Son jeu de scène, le "jagger jive", a ses adeptes. Jagger est devenu également polyinstrumentiste pour l'enregistrement en studio (guitare, harmonica, piano, saxophone).

Keith Richard, quant à lui, est un rythmicien hors pair. Quand il tient un riff de guitare, il ne le lâche plus jusqu'à ce que les trois petites notes atteignent une dimension colossale !

Charlie Watts est un batteur complet qui va à l'essentiel. Il n'est pas très expansif, mais forme avec le bassiste Bill Wyman une base rythmique efficace et solide. Mick Taylor, le dernier venu, n'est jamais devenu un Stones à part entière, intégré dans la "famille". Il quittera le groupe en 1975, mais pas de façon officielle. Son remplaçant, Ron Wood des Faces, sera là pour les tournées, imitant à la perfection le jeu de Mick Taylor.

The Rolling Stones (tournée juin 2015) - © Jim Pietryga (wikipedia)


EN CONCLUSION

Les Rolling Stones, tout comme les Beatles ont influencé, mais dans un registre différent, de nombreux groupes rocks des années 70 et au-delà. Ils ont contribué, d'une certaine façon, à faire découvrir la musique noire américaine au monde entier. Les Rolling Stones restent encore aujourd'hui la référence, tant au niveau du jeu de scène, imprimé dès les débuts par un Mick Jagger survolté, qu'au niveau des compositions mises en avant par les riffs efficaces et ravageurs de Keith Richards.

Par D. Lugert (Cadence Info - 10/2018)


DISCOGRAPHIE OFFICIELLE DES ROLLING STONES ANNÉES 60/70

  • 1964 : The Rolling Stones (le contenu de ce disque ne comprend que des reprises et aucune chanson originale, au moment même où les Beatles remportent des succès grâce aux compositions de Lennon et McCartney)
  • 1965 : N° 2
  • 1965 : Out of Our Heads
  • 1966 : Aftermath (premier album qui ne comprend aucune reprise et que des chansons originales)
  • 1967 : Between the Buttons
  • 1967 : Their Satanic Majesties Request (l'enregistrement de ce disque fut particulièrement pénible en étant toujours interrompu par des affaires pénales et de courts séjours en prison des membres du groupe)
  • 1968 : Beggars Banquet (après quelques errances psychédéliques - Their Satanic Majesties Request -, les Stones retournent aux sources de leur inspiration musicale : le blues. Beggars Banquet donne le ton des années qui vont suivre)
  • 1969 : Let It Bleed (l'album contient plusieurs standards du groupe comme Gimme Shelter, You Can't Always Get What You Want, Midnight Rambler et Love in Vain)
  • 1971 : Sticky Fingers (premier album réalisé portant le nom de leur propre maison de disques, 'Rolling Stones Records'. L'album se distingue par un son toujours bluesy. On notera au passage l'influence musicale provoquée par le nouveau venu, Mick Taylor, suite à la disparition de Brian Jones)
  • 1972 : Exile on Main St. (consulter notre long article sur l'enregistrement du disque)
  • 1973 : Goats Head Soup (sans jouer la surenchère et suscitant des critiques variées, l'album contient la ballade Angie, un des grands succès de l'année 1973 qui deviendra, à l'égal de Satisfaction, une chanson aussi célèbre)
  • 1974 : It's Only Rock 'n Roll (ce disque-là est le dernier qui voit la présence au sein du groupe de Mick Taylor après cinq années de bons et loyaux services. Ses solos particulièrement inspirés auront contribué à rendre la musique des Stones plus aérienne.)
  • 1976 : Black and Blue (cet album est certainement le plus atypique depuis la création du groupe en faisant appel à de nombreuses influences musicales : reggae avec Cherry Oh Baby d'Eric Donaldson, jazz avec Melody voire funky à travers Hot Stuff et la présence du claviériste Billy Preston.)
  • 1978 : Some Girls (face au remue-ménage provoqué par l'arrivée du punk, les Stones éprouvent le besoin de se démarquer. C'est ainsi que Miss You aux accents disco rencontre du rock solide avec Some Girls ou Respectable. On relèvera au passage la présence devenue indispensable du nouveau guitariste Ron Wood)

À CONSULTER

LA NAISSANCE DU GROUPE ROLLING STONES

C’est dans une école d’art que Keith Richards, encore adolescent, va se lier d'amitié avec Dick Taylor. Par la suite, au hasard d’un concert à Londres, ce sera la rencontre avec Brian Jones...

LES ROLLING STONES : L'HISTOIRE DE 'EXILE ON MAIN STREET'

'Exile on Main Street' est l'un des albums phares de la carrière des Rolling Stones. Enregistré en grande partie dans le sud de la France en 1972, 'Exile on Main Street' est le son d'un groupe banni de son pays et qui renoue avec le blues et le country.

BEATLES ET ROLLING STONES, LA RIVALITÉ MÉDIATISÉE

La légendaire rivalité entre les Beatles et les Rolling Stones, deux groupes de rock issus des années 60 et aussi différents que complémentaires.


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