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CLASSIQUE / TRADITIONNEL


LA MUSIQUE ARABE, HISTOIRE ET SPÉCIFICITÉS

Contrairement à l’histoire de la musique classique Occidentale qui accorde aux écritures une grande importance pour la structurer et l’exécuter, la musique classique arabe prête à la transmission orale et aux modes du « maquäm » une place sensible…


LA MUSIQUE ARABE, PETIT RAPPEL HISTORIQUE

La musique des pays arabes regroupe les caractères communs à tous les pays de la péninsule arabique : Irak, Liban, Jordanie... ainsi que la Turquie et les pays d’Afrique du Nord. La musique est modale et monodique.

À sa source, la musique arabe est de tradition orale, c’est-à-dire que les traces écrites sont rares. En dépit de ses multiples apparences - et sous le couvert d'une musique parfois complexe -, elle présente dans ses formes traditionnelles des interprétations vocales et instrumentales, parfois accompagnées de danse. C'était avant tout une musique de divertissement.

Durant l’époque préislamique (env. jusqu’au 7e siècle après. J.-C.), la musique arabe s’accompagne d’un minimum d’instruments, principalement la flûte nây et le üd (luth). Durant la période de développement qui va de 622 à la prise de Bagdad par les Mongols en 1258 et à celle de Constantinople par les Turcs en 1453, les populations arabes découvrent d’autres cultures.

Les influences helléniques et persanes conduisent à la naissance d’une musique techniquement élaborée et raffinée. C’est l’expédition napoléonienne qui permettra au monde arabe de s’ouvrir à l’influence occidentale. Au 19e siècle, un renouveau musical voit le jour qui se poursuivra au siècle suivant. Grâce notamment aux travaux conduits par le musicien égyptien Abdu al-Hamuli (1836-1901), la musique arabe prend alors un nouvel essor ; dès lors, une renaissance littéraire et musicale nommée le nahda y prospère au début du 20e siècle.


DORSAF HAMDANI ('Festival Au Fil des Voix' à Vaison la Romaine - 2010)

LA MUSIQUE TRADITIONNELLE ARABE ET SES MODES

La musique traditionnelle s’exécute sous la forme du maqâm ; un concept commun aux musiques arabe, perse et turque. Le système repose sur l’organisation de différentes échelles mélodiques. Si au départ le maqâm désignait le lieu où l’on jouait de la musique, l'utilisation du mot fait désormais référence à l’utilisation de certains modes ; et comme tout mode qui existe dans le monde de la musique, il exprime des formules mélodiques qui se déroulent sur différents degrés d’une échelle musicale.

En 715, la théorie est systématisée par le Perse Ibn Misjah. Elle comprend 8 modes appelés « asahi » décrits sous forme de tablature pour luth. À partir du 9e siècle, la théorie musicale se développe en étant influencée par la pensée grecque. Des ouvrages de Pythagore, de Ptolémée et d’Aristoxène sont traduits en arabe. Au 13e siècle, l’octave est divisée en 17 intervalles (contre 12 en Occident) soit 90 centièmes d’un demi-ton et d’un comma (24 centièmes d’un demi-ton). En choisissant entre les degrés de cette échelle, on obtient 12 modes primaires et 6 modes secondaires. Huit modes rythmiques fondamentaux les accompagnent. Si au Moyen Âge les maqâmât (modes au pluriel) étaient au nombre de 300, aujourd’hui il n’en subsiste plus qu’une trentaine environ à être utilisés régulièrement et qui se retrouvent éparpillés en plusieurs déclinaisons : le maqâm arabe, le maqâm cachemiri, le makam ottoman (utilisé en Turquie), le maqôm ouzbek ou encore le dastgâh persan (utilisé en Iran) et le mougham azéri.

La musique arabe peut faire appel à une multitude de rythmes binaires ou pas, basés sur des codes précis juxtaposant des temps denses (dum) et des temps clairs (tak). Les temps denses servent de support métrique à la mélodie : des périodes d’égale durée sont marquées par des frappes ou des battements alternatifs, symétriques ou asymétriques, sourds ou clairs ; l’asymétrie rythmique étant l'un des caractères de la musique musulmane. Globalement, le maqâm se rapproche beaucoup du système des râgas que l’on trouve dans la musique classique indienne. Comme eux, les maqâmât sont associés aux divers moments de la journée et de la nuit, chacun possédant un caractère particulier.

Le maqâm est accompagné le plus souvent par un quatuor comprenant une cithare (psaltérion ou kanoun), plus rarement une vièle, un tambour en calice (darbuka) et de basque (daf), une flûte (nay) ou un violon. Cette musique traditionnelle est toujours enseignée dans les écoles de luth et les églises d’Orient, et constitue le socle des musiques écoutées dans les pays du Maghreb.


LES INSTRUMENTS LES PLUS UTILISÉS

Six instruments représentent au mieux l’univers de la musique arabe.

Concernant les percussions, nous avons : la darbuka, qui est une cruche de terre cuite recouverte d’une peau et le daf (ou duff), un tambour à main d’une trentaine de diamètre, équipé ou pas en fonction des pays de plusieurs paires de cymbalettes.

Les instruments à cordes servent à l’accompagnement et sont au nombre de deux. Nous avons tout d’abord le ûd, un luth oriental muni d’une caisse de bois très fin, piriforme et bombée. Sa particularité est d’avoir un manche très court, dépourvu de frettes et doté d’un chevillier recourbé vers l’arrière. Le ûd possède un son grave comparable à celui du violoncelle et ses harmoniques font penser à la harpe. Le second est le qanûn ou kanoun. C’est une sorte de cithare comportant une caisse de résonance en bois, plate et trapézoïdale, dont un des côtés forme un angle d’environ 45, alors qu’à l’opposé la forme est rectangulaire. Les cordes (entre 70 et 80) sont groupées par trois.

Concernant l'exécution des mélodies, nous avons le violon, mais surtout le nâi (ou ney), le seul instrument à vent qu’ait retenu la musique savante arabe du rituel musulman, tous les autres faisant partie de la musique folklorique. L’usage de la flûte nâi est réservé exclusivement aux hommes. Sa grandeur est variable. Elle est à six trous (modèles arabe et turc) et à sept trous (modèle iranien). Sa pratique est des plus difficiles et demande au musicien une extrême virtuosité qui doit concilier un contrôle de la respiration, une habileté à boucher les trous, de passer d’un mode à l’autre, tout en obtenant des sonorités pleines, chantantes dans le grave et claires dans l’aigu.

Par Patrick Martial (Cadence Info - 07/2020)

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