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AC/DC : HIGHWAY TO HELL, HISTOIRE D'UN DISQUE

Au mois de juillet 1979, des musiciens originaires à la fois d’Australie et d’Écosse électrisent la planète avec leur 6e album Highway to Hell ; un disque qui marque le point de départ de la fulgurante ascension d’AC/DC au niveau mondial. Les frénétiques riffs de guitare qu’il contient résonnent encore aujourd’hui à nos oreilles. De respecté, le groupe de hard-rock allait devenir une institution internationale…


CONTEXTE HISTORIQUE

Alors que les années 70 touchent à leur fin, le chanteur Bon Scott, les guitaristes Angus et Malcolm Young, le bassiste Cliff Williams et le batteur Phil Rudd se distinguent dans l’une des formations les plus teigneuses et les plus originales de hard. Le groupe commence à se faire connaître hors de l’Australie, notamment au Royaume-Uni, ce qui les incite à quitter leur terre natale pour s'installer à Londres.

Leur présence sur le sol qui a vu grandir les Beatles et les Rolling Stones est très appréciée par les fans de rock. Ses maîtres du riff, ses maestros du hard respectés pour leur musique, sont en attente de trouver la même ferveur de l'autre côté de l'Atlantique.

En 1978, après cinq albums et quatre années d’efforts, peu de gens connaissent en vérité AC/DC. Lors de longues tournées, le groupe se produit seulement en première partie des grosses « cylindrées » comme Aerosmith ou Scorpion.

Pour la presse anglaise, AC/DC possède un esprit punk à une période où cette musique connaît au Royaume-Uni un vif essor. Leur musique, pourtant fort éloignée des destructions musicales servies par les Sex Pistols, se voit surtout affublée de cette étiquette par facilité. En effet, le groupe possède la particularité d’être apprécié autant par les hard-rockers que par les punks... et même par ceux qui ne sont pas vraiment rock à cause de leurs ballades. Le groupe a cette rare faculté de transcender les genres et les modes. Et c’est précisément cet aura d’authenticité qui va les conduire à une popularité mondiale.

AC/DC arrive aussi au bon moment. Sur scène, les musiciens ont la fougue, la jeunesse et l’attitude pour séduire le public punk que la maestria musicale, les morceaux et l’héritage requis pour plaire aux fans de Deep Purple ou de Led Zeppelin. AC/DC peut se targuer d’avoir eu à sa tête l’un des chanteurs les plus charismatiques de sa génération : Bon Scott.


LE CHANTEUR ET PAROLIER BON SCOTT

Dans cette période qui court des débuts en 1974 jusqu'à 1981, date de la disparition de Bon Scott, le chanteur fait figure de proue pour le groupe. AC/DC lui doit effectivement beaucoup. Ses textes savaient transmettre une ligne de conduite et son jeu scénique apportait une véritable dimension artistique. Bon était comme un cadeau tombé du ciel. Il captait l’attention partout où il apparaissait. Sa personnalité gaie et souriante définissait à la fois un être chaleureux et simple dans la vie de tous les jours. Il avait les yeux pétillants et de l’ambition, sans toutefois avoir la grosse tête. C’était un joyeux fêtard !

Malgré le chaos dans lequel Bon baignait invariablement, sans compter les problèmes que rencontraient son ami Malcolm Young avec l’alcool, AC/DC ne manquait jamais de faire preuve de professionnalisme dès qu’il s’agissait de musique. Ce qu’ils aimaient le plus, c’était de jouer ensemble. Ils estimaient que cette passion qui les avait réunis devait être pour le meilleur et non pour le pire.

Quand Bon chantait, il croyait dur comme fer à ce que disaient les textes des chansons. Sa présence à enflammer le public, cette impression de venir d’un autre monde le rapprochait des figures emblématiques du rock que sont Mike Jagger, David Bowie, John Lennon et Freddy Mercury. Bon Scott imaginait de devenir une figure influente dans le paysage de la musique rock ; un rêve qu’il finira par toucher avant de disparaître.


L’ENREGISTREMENT DE 'HIGHWAY TO HELL' DANS SON CONTEXTE

Un an avant la sortie de Highway to Hell, la renommée d'AC/DC prend de l’ampleur avec l’excellent cinquième album Powerage. Ce disque-là est une décharge de puissance brute. À l’époque de son enregistrement, le potentiel de créativité du groupe est déjà raffiné, mais encore mal exploité au niveau du son. L’album apparaît comme un chaînon manquant qui ne fera lien avec une approche plus professionnelle qu’au moment de la sortie de Highway to Hell.

L'enregistrement du digne successeur à Powerage démarre en janvier 1979. La période est tumultueuse pour AC/DC. L’enregistrement de Highway to Hell est réalisé au 'Roundhouse Studios', à Londres. Jusqu’alors, le groupe a travaillé uniquement avec les producteurs Harry Vanda et George Young, le frère aîné d'Angus et Malcolm. Vanda et Young sont tous les deux d’anciens musiciens de la formation australienne The Easybeats (1964/1969). Il est temps de changer d'effectif. Pour les remplacer, Eddie Cramer est choisi, mais l'ancien producteur de Led Zep et de Hendrix abandonne épuisé au bout de trois semaines d'effort et cède sa place à Robert ‘Mutt ‘ Lange, le futur producteur de Def Leppard, Bryan Adams et The Cars, entre autres.

La présence de Robert ‘Mutt’ Lange aux commandes oblige le groupe à revoir sa façon de travailler en studio. Avec l’appui de la maison de disques, le producteur agit de manière à tout contrôler pour conquérir le marché américain. C’est comme une revanche sur le passé, du temps des Easybeats. Lange est un méticuleux, un perfectionniste. Au lieu d’enregistrer le groupe en live comme sur les précédents albums, le producteur devient un forcené qui exige que chaque solo soit enregistré à part, note à note si nécessaire. Cette nouvelle façon de procéder en studio apportera beaucoup au groupe qui cherchera à le reproduire sur leurs autres disques.

N’ayant pas encore livré de chef-d’œuvre digne de ce nom, la sortie de l’album Highway to Hell est attendue avec impatience par les fans, les critiques et la maison de disques. Le disque débarque dans les bacs à l’été 1979. AC/DC démontre alors une capacité à produire une musique originale, intègre, mais également délicate. En plus de grossir le nombre de fans enragés dans leur Australie natale et après avoir séduit le Royaume-Uni, le groupe compte bien faire de ce produit un sésame qui touchera le public américain.


'HIGHWAY TO HELL' PAS À PAS

Il suffit que la tête de lecture se pose sur le vinyle pour que le résultat saute aux oreilles. L’écoute des riffs si distinctifs du titre éponyme qui ouvre l’album ont toute l’apparence d’un hymne taillé pour les stades de foot ! AC/DC serait-il alors prêt à faire son entrée au panthéon des légendes de la Rock-music ?

Comme Smoke and the Waters de Deep Purple, l’introduction de Highway to Hell se caractérise par un riff de guitare surpuissant. Celui-ci se répète encore et encore, produisant à son écoute une tension qui ne cesse de s’intensifier. Highway to Hell a du mordant malgré sa simplicité. On y retrouve déjà le fameux lien inextricable entre le rock et l’enfer, servi par un rythme appuyé et une imagerie plutôt sombre, même si les paroles décrivent un univers bien plus jovial qu’il n’y paraît… ce qui semble normal étant donné que le groupe a toujours revendiqué son sens de l’humour et de la dérision. L’enfer n’est pas ici un purgatoire.


AC/DC : HIGHWAY TO HELL

La seconde chanson, Girls Got Rhythm, aborde le thème du sexe, un sujet porteur pour son auteur Bon Scott. Le chanteur aime les filles et l’exprime. Les paroles racontent l’histoire d’une nana qui est plus habile que les autres à laisser parler son corps. Des gens y ont vu de la misogynie, alors qu'il ne faut rien y voir de graveleux ou de méprisant, ni dans cette autre qu’est Whole Lotta Rosie parue en 1977 dans l’album Let There Be Rock.

Pour Bon, l’inspiration de ses textes repose sur du vécu et une imagination galopante. N’oublions pas que la musique rock a souvent été pourvoyeuse de textes controversés à cause de l’attitude désinvolte des groupes qui les interprétaient !

Après Girls Got Rhythm, l’album se pare d’un aspect beaucoup plus ombre. Le troisième titre, Walk All Over You, dessine un climat de danger et d’insécurité. Les paroles sont dures, voire menaçantes. Elles apportent surtout une réponse à une conduite qui manque de respect envers autrui.

Le morceau suivant, Touch Too Much, est l’unique titre a sortir en single. À ce jour, il reste le préféré des fans. Touch Too Much est empreint de lyrisme avec une bonne dissociation de la voix et des guitares. C’est une tentative pour le groupe d’entrer dans les charts bien que son auteur Bon Scott le conteste avec vigueur. L’approche plus pop de Touch Too Much sonne comme une piqûre de rappel des influences du groupe. Sur la face A du vinyle, l’héritage du côté rock est présent sur le 5e titre, Beating Around The Bush ; le titre étant quasiment un hommage au hard avec ses influences à la ZZ Top.

Pour Shot Down In Flames qui ouvre la face B du disque, les paroles soulignent l’humour lyrique et autobiographique propre à Bon Scott et donne un bon aperçu des pires bouffonneries auxquelles le chanteur d’AC/DC se livrait régulièrement. Proche de Girls Got Rhythm en matière d’énergie, le titre diffère toutefois par le texte de Bon Scott. Dans cette chanson, il se moque de l’homme. C’est l’histoire d’un gars assis dans un bar qui voit une fille qu’il estime être une prostituée. Il va la voir pour lui demander son prix et se fait envoyer sur les roses… pour rester polie !

Sur le septième morceau, Get It Hot, l’album Highway to Hell continue de délivrer sa cadence frénétique et offre une nouvelle série de riffs éternels. Après Shot Down in Flames, la thématique liée aux tourments et aux flammes de l’enfer se poursuivent, comme influencée par la pochette du disque parodique qui montre Angus Young portant un chapeau avec des cornes tandis que le groupe est cerné par les flammes (version américaine de la pochette).

Tout porte à croire que le monde d'AC/DC est lourdement imprégné par les habits du diable et le monde de l’enfer. Or, les sujets abordés par les chansons Shot Down In Flames et Get It Hot ne sont pas aussi sulfureux que ce que l’on imagine et AC/DC sur la pochette donne le change en faisant les idiots. La dérision, une fois de plus !

Au fond, tout ça n’est qu’une question d’interprétation. N’oublions pas qu’au cours de son histoire, le rock, et plus particulièrement le hard, ont marché souvent main dans la main avec Lucifer, ce qui a provoqué par méconnaissance ou par bêtise de nombreux faits imaginaires : messages subliminaux, dissimulations, étranges détails sur des photos, paroles passées à l’envers, etc.

Après Get It Hot, une nouvelle vague percutante et agressive vient balayer l’album : If You Want Blood (You’ve Got It). Il s’agit de sang, de mort et de sacrifice. Une fois de plus, des sujets qui sont des thèmes de prédilection pour les groupes de hard et de metal. Pour If You Want Blood, cela se résume à l’idée du sang qui coule ; une image captivante qui nous répugne ou nous attire. Or, une fois mise en musique, l'outrance devient dès lors plus divertissante.


AC/DC : NIGHT PROWLER

Highway to Hell redécouvre les plaisirs de la terre sur l’avant-dernier morceau, le spontané Love Hungry Man, un titre balançant à la façon d’un blues énergique. Puis, après une série de neuf dépêches venues du front rock le plus dur, AC/DC change radicalement de ton sur le dernier titre, l’inquiétant et dérangeant Night Prowler.

Ce titre qui clôture l’album a été bouclé très vite, les voix ayant été enregistrées au moment du mixage. Night Prowler est un condensé d’une vieille passion : le rhythm and blues, sur un tempo lent et appuyé. Bon Scott propose dans la chanson une longue narration basée sur une histoire fantasmée autour d’un rôdeur noctambule.

Sur les deux albums suivants : Back in Black en 1980 et For Those About to Rock l’année d’après, le son fera encore preuve de puissance tout en étant radicalement modifié dans l'intention de plaire encore plus au marché américain et à un public de masse. Pour AC/DC, il était important de percer sans attendre.


L’ALBUM D’AC/DC EN CONCLUSION

Dès sa sortie, Highway to Hell reçoit de bonnes critiques et bien que le succès escompté par de nombreuses personnes ne soit pas au rendez-vous, l’album se vendra tout de même très bien. Dès lors, l’avenir s’annonce radieux pour AC/DC jusqu’à ce tragique drame du 19 février 1981 qui jette un voile noir sur son accomplissement. Après une soirée trop arrosée, Bon Scott perd connaissance dans la voiture d’un ami et ne se réveillera plus jamais. Il succombe aux effets de l’alcool dans son sommeil. Il avait 33 ans.

La disparition du charismatique chanteur est un énorme coup dur pour le groupe, mais AC/DC doit être réaliste et doit continuer, ne serait-ce que pour la contribution de Bon durant les six années passées. Peu de temps après son décès, le groupe fait appel à un nouveau chanteur. Pour AC/DC, ce sera le début de l’ère Brian Johnson et le début de la gloire internationale.

De nos jours, AC/DC est une institution dans le monde de la Rock-music. Le début de leur irrésistible ascension est marqué par l’inoubliable riff d’introduction de Highway to Hell et l’album exceptionnel qui s’ensuivra à en faire exploser plus d’un haut-parleur : Back in Black. Une page importante de leur carrière venait de s’accomplir.

Par D. Lugert (Cadence Info - 06/2020)

LA LISTE DES TITRES

  • Highway to Hell
  • Girls Got Rhythm
  • Walk All Over You
  • Touch Too Much
  • Beating Around the Bush
  • Shot Down in Flames
  • Get It Hot
  • If You Want Blood (You've Got It)
  • Love Hungry Man
  • Night Prowler

Tous les titres sont signés par Bon Scoot, Angus Young, Malcolm Young

Les musiciens

  • Bon Scott : Chant
  • Angus Young : Guitare solo
  • Malcolm Young : Guitare rythmique, chœurs
  • Cliff Williams : Basse, chœurs
  • Phil Rudd : Batterie

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