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JAZZ ET INFLUENCES

LENA HORNE, BIOGRAPHIE/PORTRAIT DE LA CHANTEUSE DE JAZZ

Ancienne danseuse des girls du Cotton Club de Harlem, Lena Horne incarnera la beauté, le charme et l’élégance. Remarquée en raison de son allure féline qui lui vaudra d’être surnommée « la tigresse », la chanteuse aura souvent hésité entre le 7e art, assez frileux à son égard en raison de sa couleur de peau, et la scène de music-hall où sa présence scénique sera remarquable.


UNE DANSEUSE DE REVUE NOMMÉE LENA HORNE

Lena Mary Calhoun Horne grandit dans le quartier new-yorkais de Brooklyn élevée par sa grand-mère, une suffragette qui milite dans le "National Association for the Advanced of Colored People". Sa mère qui, jusqu’à présent, s’était peu occupée d’elle, la pousse littéralement sur la scène du célèbre club de jazz d'Harlem, le Cotton Club, alors qu'elle n'a que 16 ans. C’est dans cet antre du grand orchestre de Duke Ellington que Lena Horne intègre la troupe des girls en 1934.

Dans ce cabaret où pègre, politiciens et stars du moment goûtent aux plaisirs interdits, la jeune fille finit par se produire aux côtés de meneurs de revue comme Cab Calloway. Son charme opère si bien qu'elle devient rapidement la vedette des spectacles du chef d'orchestre. Son charisme indéniable lui permet de sortir du rang et, en 1935, elle devient la vocaliste de l’orchestre de Noble Sissle, sous le nom d’Helena Horne. Sa notoriété s’établit et elle intègre en 1937 la formation de Charlie Barnet. La chanteuse est alors découverte par le producteur John Hammond, ce qui lui permet de se produire en solo au Carnegie Hall de New York.

Lena Horne et Bill Robinson - Stormy Weather film promotion

Grâce à ses diverses apparitions sur les scènes de Broadway, le cinéma la remarque, pour enfin la solliciter. Lena Horne va être une des premières femmes afro-américaines à signer un contrat avec la Metro-Goldwin-Mayer. Dans les années 40, elle tournera dans plusieurs films dont Cabin in the sky de Vincente Minneli (1943), Stormy Weather de Andrew L.Stone (1943) - dont la chanson-titre va devenir son interprétation emblématique -, Broadway Rhythm (1944) ou encore Ziefgeld Folies (1946), puis des années plus tard Meet me in Las Vegas (1956) et The Wiz de Sydney Lumet (1978). Un palmarès de films qui alterne entre le film musical et la comédie musicale, notamment quand elle tournera pour la MGM.


FACE À LA SÉGRÉGATION

Dans ses films, Lena Horne n’a jamais occupé le premier rôle. Dans sa carrière de comédienne, la chanteuse refusera de se voir confier des rôles dans lesquels la femme afro-américaine véhicule des clichés allant à l’encontre de sa dignité. Malgré un racisme évoqué ouvertement par des cinéastes de renom comme Elia Kazan ou Joseph L. Mankiewicz, aux États-Unis la personne de couleur doit toujours être en mesure de développer des qualités exceptionnelles pour exister vraiment sur la toile. Dans un pays encore contaminé par la ségrégation - surtout dans les Etats du Sud – Lena Horne ne deviendra jamais une grande vedette du 7e art.

Pourtant, dans les années 40/50, elle sera une des chanteuses les plus populaires. Son album live Lena Horne at the Waldorf Astoria en 1957 se maintiendra pendant plusieurs mois en tête des ventes aux États-Unis et sa première prestation comme vedette à Broadway dans la comédie musicale Jamaica, lui vaudra d’être récompensée en 1958 par un "Tony Award" de la meilleure actrice dans un musical.

En 1947, elle se marie en secondes noces avec le pianiste Lennie Hayton qui devient son homme à tout faire, de l’imprésario au conseiller jusqu’au chef d’orchestre (en hommage au couple d'amis, Quincy Jones composera en 1961 For Lena and Lennie). Autour d'eux, l’environnement est hostile. Le couple, celui d’un musicien juif marié à une chanteuse de couleur, doit faire face à d’énormes pressions, notamment au cinéma où le mari exerce sa profession d’orchestrateur/arrangeur pour les studios de la MGM. Mais le couple restera uni et fera face aux propos injurieux et diffamatoires.

Dans les années cinquante, la carrière de Lena Horne s’estompe quelque peu à la suite d’une inculpation l’accusant de mener des activités anti-américaines (la chanteuse s’est largement engagée aux côtés d’organisations de défense des droits civiques). Pour autant, elle n’abandonne pas la scène et continue d’enregistrer pour la compagnie RCA. À Broadway, la revue Jamaica la remet en vedette dès 1957, ce qui lui permet de poursuivre une carrière partagée entre la chanson populaire et le cinéma.


LENA HORNE : SUMMERTIME

QUAND LE JAZZ EST LÀ, LA VIE S’EN VA

En 1971, suite au décès de son mari, elle s’installe en Angleterre et enregistre dix ans plus tard, The Lady and Her Music, qui lui permet de recevoir le "Grammy Award" de la meilleure chanteuse de variété. Enfin, après dix-huit années passées dans le monde des variétés, elle enregistre très tardivement plusieurs albums aux couleurs jazz pour le label Blue Note, notamment We'll Be Together Again en 1994 et An Evening with Lena Horne l’année qui suit, et pour lequel elle recevra cette fois-ci un "Grammy Award" de meilleure chanteuse de jazz.

Plus proche de Barbra Streisand que de Sarah Vaughan par sa façon de s'esprimer vocalement, Lena Horne a appartenu à la catégorie des chanteuses dont la sincérité et le grand métier ne vont pas sans quelque affectation. Le public retient d’elle son interprétation de Stormy Weather dans sa robe de voile transparente, une chanson qu’elle avait reprise dix après sa création par Ethel Waters, et une voix au timbre marqué par une diction exemplaire, vision hélas réductrice d’une carrière qu’elle a pourtant conduite jusqu’au bout de ses forces.

Décédé en 2010, à l’âge de 92 ans, la chanteuse aura joué de son charme presque jusqu’à la rupture, et si cela lui permit de s’en sortir avec les honneurs, elle ne put accéder malheureusement, à aucun instant, au royaume éternel des divas du jazz.

Par Elian Jougla (Cadence Info - 09/2016)

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