L'info culturelle des musiques d'hier et d'aujourd'hui
CHANSON

CLAUDE FRANÇOIS, LA CLOCLOMANIA ET L'AVENTURE DISCO

À chaque déplacement, que ce soit devant chez lui, sur scène ou sur les plateaux de télévision, une nuée de fans suit les moindres faits et gestes de l’artiste. Claude François comprend alors ce qu’il peut récolter de ce public fidèle. Du fan club aux produits dérivés jusqu'aux magazines, le chanteur va exploiter son succès comme personne... (cette page fait suite à Claude François, portrait d'un chanteur populaire)


LA CLOCLOMANIA DU BUSINESSMAN

Claude François se révèle rapidement comme un redoutable homme d’affaires. Sa façon de gérer les groupies est unique, car il va conduire sa carrière tout à la fois comme un véritable businessman intéressé, mais aussi comme un véritable artiste dévoué à son public.

Ses fans, tous sexes confondus, le trouvent extraordinaire. Ils ont l’âge des lecteurs de Tintin, de 7 à 77 ans. De l’artiste, ils aiment son style, sa voix, la perfection de ses spectacles. Devant son immeuble, veillant jour et nuit, de nombreuses adolescentes sont là, anticipant parfois ses déplacements comme si des messagers de l’invisible les avaient prévenues.

Mais le chanteur est lucide, il sait que la ‘Cloclomania’ n’est que le reflet d’une image dans laquelle certains fans s’accrochent comme à une bouée de sauvetage. C’est une façade qui donne l’illusion d’un homme heureux, toujours en forme, avec le sourire aux lèvres.

Tout en comprenant le phénomène, l’artiste ne peut pourtant pas s’en passer. Claude François n’aime pas être seul. Il a besoin de se sentir aimé et la présence de ses fans dans les studios de télévision ou au bas de son immeuble le rassure. C’est comme une union, un mariage qui n’en est pas un, mais qui lui est devenu indispensable. Un bonjour, un signe de la main, un bisou, une photo, une dédicace et le fan repart heureux pour la journée entière.

Claude offrira aux plus fidèles d’entre eux l’occasion de travailler avec lui et pour lui dans ses bureaux parisiens et dans son magazine Podium. La plupart des fans étaient des collaboratrices, des jeunes femmes qui s’occupaient de monter les dossiers de presse, d’ouvrir les dizaines de lettres que l’artiste recevait chaque jour. Elles répondaient au standard téléphonique et ne comptaient pas les heures passées. Elles étaient heureuses d’être là, de l’approcher tous les jours, même si le penchant tyrannique du patron pointait le bout de son nez de temps en temps. Pour le chanteur, c’était une responsabilité qu’il devait endosser, même s’il trouvait ces relations-là plutôt agréables à vivre.

Pour fidéliser les 45 000 membres de son fan-club, Claude François a l’idée de sortir toute une gamme de produit à son image : affiche dédicacée, sac, stylo, sweat-shirt, pull, parfum jusqu’à la mèche de cheveux pour les gagnants de ses concours ! Mais la véritable arme de guerre sera Podium. Le magazine ne répond pas aux mêmes critères que Salut les copains, car c’est avant tout un magazine destiné à ses fans : Claude François part en tournée, Claude François se fiance, etc. Il savait que quand le doute s’installait, quand son absence créait le manque, le tirage grimpait aussitôt !

Le chanteur a toujours su se transformer en homme d’affaire et vice versa avec une aisance stupéfiante. A la fin de sa vie, l’artiste aura à son actif plus d’un millier de concerts, des dizaines de millions de disques vendus, mais aussi une maison de disques (les disques flèche), deux magazines et une agence de mannequin !


QUAND LA CHANSON SE CONJUGUE AU FÉMININ...

Claude François aimait les femmes et les femmes aimaient Claude François. Le chanteur vivra constamment entouré de leur présence, mais celles qui feront son bonheur, feront également son malheur… Chez Claude François, l’affectif tenait une place importante. Il était en permanence dans un jeu de séduction, dans une histoire de conquête, dans une histoire de revanche. De ses ruptures sont nées de très grands tubes…

Janet est son premier amour. Quand elle s’en ira pour rejoindre Gilbert Bécaud, il criera sa douleur à travers les vers de la chanson Même si tu revenais (1965) : « Même si tu revenais / Je crois bien que rien n’y ferait / Notre amour est mort à jamais / Je souffrirais trop si tu revenais. » Après son divorce de Janet, son rapport avec les femmes change. Les conquêtes sont nombreuses, mais deviennent éphémères. Il renonce définitivement à se remarier, même si son attachement à construire une famille avec des enfants demeure toujours important à ses yeux (Claude François aura deux enfants, Claude et Marc, avec Isabelle Forêt qui partagea sa vie de 1967 à 1972).

La célèbre chanson Comme d’habitude naîtra à la suite d’une liaison avec France Gall en 1967. Elle marquera d’un point final leur histoire. Une fois de plus, la chanson est une transposition idéalisée de la vie de l’artiste : « Je me lève et je te bouscule / Tu ne te réveilles pas comme d’habitude / Sur toi je remonte le drap / J’ai peur que tu aies froid comme d’habitude / Ma main caresse tes cheveux / Presque malgré moi comme d’habitude / Mais toi tu me tournes le dos / Comme d’habitude. » Les paroles et la musique toucheront au but sans que le chanteur prenne conscience qu’en devenant My way, sa chanson allait devenir une des plus belles chansons des années 60. Des dizaines de versions verront le jour à travers le monde ; la plus célèbre étant celle interprétée par Frank Sinatra.

D’autres mélodies auront le cœur plus léger quand le chanteur retrouvera sa joie de vivre. Ainsi sa rencontre avec Hélène, un mannequin suédois, donne naissance à Y’a le printemps qui chante (1972) : « Viens à la maison / Y’a le printemps qui chante / Viens à la maison / Tous les oiseaux t’attendent / Les pommiers sont en fleur / Ils berceront ton cœur. » Un an avant sa mort, il chantera une dernière chanson inspirée de sa vie en compagnie de sa dernière compagne Kathalyn, ce sera ‘C’est comme ça que l’on s’est aimé’ (1977). Ballade sentimentale, s’il en est !


LES CLAUDETTES

Mais sa légende de séducteur, Claude François va surtout la construire grâce à ses danseuses. En 1966, il décide de ne plus chanter seul sur scène. Il s’inspire alors des shows américains, notamment celui d’Otis Redding et de ses danseuses The Reddettes, et invente les Claudettes…

Grâce à leur présence, le sex-appeal de Claude François se trouve métamorphosé, rehaussé. Son côté ‘homme à femmes’ s’impose davantage, tandis que le charme féminin des Claudettes crée la fascination auprès du public. Le chanteur incarne le séducteur tout en révolutionnant le paysage musical de l’époque.

On dénombrera plus de trente Claudettes à avoir dansé avec Claude François sur les scènes et les plateaux de télévision. Chaque chorégraphie demandait beaucoup de travail et de sacrifice. Quant aux tenues vestimentaires, avec juste ce qu’il faut pour ne pas choquer les bonnes mœurs, mais juste assez pour susciter les désirs, elles devaient toujours avoir l’aval du chanteur. Car là, comme ailleurs, rien ne devait être laissé au hasard !


CLAUDE FRANÇOIS PLACE LE DISCO EN TÊTE

Magnolias for ever, Cette année-là, Je vais à Rio, autant de tubes qui font encore danser dans les discothèques plus de 30 ans après leur création. Un étonnant décalage à une époque où la techno semble appartenir au passé. Existe-t-il alors un mystère ? Une recette intemporelle signée ‘Cloclo’ ?

À l’époque, Claude François négocie un virage dans sa carrière. Il n’est pas l’inventeur du Disco, mais il va donner l’élan dans notre pays grâce à sa popularité et à son assise médiatique. En 1977, côté outre-atlantique, c’est Saturday Night Fever qui remporte tous les suffrages. Le Disco est à la mode. Aucun doute à avoir ! Après les reprises pop et soul, Claude François, en avance sur son temps, compte bien donner à cette musique une autre envergure…

Le chanteur, toujours dans un mouvement artistique permanent, tente d’avoir les derniers sons, les dernières tendances musicales. Son côté perfectionniste va, grâce au Disco, frapper les esprits avec Cette année-là (1976). C’est certes l’adaptation d’un vieux titre des années 60 (Oh, what a night), mais une adaptation réussie.

Magnolias for ever devient son second tube Disco. La particularité de cette chanson est d’avoir été composée au téléphone entre le chanteur qui se trouvait alors à Biarritz et son compositeur Bourtayre à Paris. Une première dans le domaine de la musique ! Il ne faut pas oublier non plus les paroles très libres et imagées d’Etienne Roda-Gil qui apporteront un ton tout nouveau dans les chansons de Claude François : « Dites-lui que je pense à elle / Quand on me parle de magnolias / Quand j’entends ces musiques nouvelles / Qui résonnent comme des bruits de combats. »

Oui, 1977 est l’année Disco pour l’artiste qui, en devenant Cloclo, s’émancipe en même temps du Claude François des débuts. Avec ses costumes à paillettes, le chanteur entouré des Claudettes est en perpétuel mouvement, suivant de près le rythme cadencé de la musique. La chanson Alexandrie, Alexandra sera le dernier tube Disco de l’artiste, un succès qui sera malheureusement posthume.


CLAUDE FRANÇOIS… POINT D’ORGUE

Début 1978, le chanteur est au sommet de sa carrière. Sentimentalement, c’est le grand amour avec un ancien mannequin prénommé Kathalyn. Avec elle, il projette des plans sur la comète et évoque peut-être de se remarier… Personne alors ne se doute qu’une fin tragique l’attend…

Claude François avait peur de la mort, du néant. Il la frôlera souvent de près, comme ce septembre 1975 à Londres, lors d’un attentat de l’IRA où quand sa voiture subira plusieurs impacts de balles. De tous ces accidents, il s’en sortira indemne, mais la baraka est tenace… Le 11 mars 1978, quelques heures avant l’enregistrement d’une émission aux Buttes Chaumont avec Michel Drucker, par une belle matinée ensoleillée, c’est le drame…

Un accident bête, comme la plupart des accidents… Comme d’habitude, l’artiste se fait attendre. Il est en train de prendre son bain quand il voit un fil dénudé sortir d’une vieille applique au-dessus de lui. Son côté maniaque, son côté ‘tout doit être parfait’ l’emporte alors. Le fil est dénudé, l’applique est en cuivre. Elle est conductrice. C’est l’électrocution. Un banal accident domestique comme il s’en produit si souvent… L’imprudence sera fatale.

Quand le public apprend son décès, c’est une onde de choc. Ses fans, ses amis, ses collaborateurs, ils sont tous assommés, ne voulant croire à l’incroyable. Les jours suivants, le pays tout entier sera en deuil, pleurant son idole… La fatalité voudra que Alexandrie, Alexandra, son dernier 45 tours, sorte le jour de ses obsèques le 15 mars.

Depuis, la nostalgie a pris les devants. C’est elle qui conduit nos pas vers lui. Le film Cloclo rend hommage à l’artiste, un hommage appuyé qui parcourt sa carrière, mais également les faces cachées de sa vie privée si tumultueuse. Le film ‘Cloclo’ est comme une dédicace lancée à tous ses fans, comme si l’artiste nous invitait à son dernier spectacle… Nous lui devions bien ça !

Par Elian Jougla (Cadence Info- 03/2012)

À CONSULTER

CLAUDE FRANÇOIS : 'COMME D’HABITUDE' ET L'HISTOIRE DE SON ADAPTATION EN ‘MY WAY’

À l'automne 1967, Claude François enregistré la chanson 'Comme d'habitude'. Adapté en anglais par Paul Anka, elle deviendra 'My Way'. Popularisée par Frank Sinatra en 1968, son adaptation sera reprise par des artistes de premier plan. Au compte à ce jour plus de 1 000 versions de cette chanson.

CLAUDE FRANÇOIS : 'BELLES, BELLES, BELLES', L'HISTOIRE DE LA CHANSON

En 1962, Claude François allait se distinguer avec 'Belles, belles, belles', une adaptation du titre 'Made To Love'. Le chanteur aimait tout particulièrement les musiques rhythm and blues et soul pour lesquelles ses reprises lui ont assuré quelques autres grands succès dont 'Si j'avais un marteau' et 'J'attendrai'.

CLAUDE FRANÇOIS DIT 'CLOCLO'. DES ANNÉES PLUS TARD QUE RESTE-T-IL DE L'ARTISTE ?

En mars 1978 disparaissait le chanteur Claude François. Aujourd'hui, que reste-t-il du chanteur, de cet artiste qui a traversé sans fausses notes les années yéyés, mai 68 jusqu'au disco ? Cloclo était l'archétype du chanteur populaire avec Johnny Hallyday et Michel Sardou... Une grande star de la chanson française des années 60/70.

LES FINS TRAGIQUES DE QUELQUES STARS

Janis Joplin, Jimi Hendrix, Jim Morrison et John Lennon. Leur point en commun est d’avoir eu leur destin brisé alors qu’ils étaient en haut de l’affiche. À la surprise générale, ils ont brûlé leurs ailes ou subit un jour ce que réserve parfois les accidents de la vie.


2e PARTIE : CLAUDE FRANÇOIS, MICHEL BERGER ET BALAVOINE. Terrassés à l'aube de la maturité ou partis trop précipitamment, ils sont devenus de véritables légendes...


RETOUR SOMMAIRE
FB  TW  YT
CADENCEINFO.COM
le spécialiste de l'info musicale