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GEORGE MARTIN, LE MENTOR DES BEATLES

Le 8 mars 2016 disparaissait George Martin à l’âge de 90 ans. Sa mort n'aurait certainement pas produit autant d'écho dans la presse si une grande partie de sa carrière n’avait été rattachée au plus grand groupe pop du 20e siècle, les Beatles. Comme musicien, George Martin avait ses propres références, des références classiques qu'il a su exploiter ingénieusement et avantageusement auprès des quatre de Liverpool et d'autres artistes de la scène rock des années 60/70.


GEORGE MARTIN OU LA PLURALITÉ DU TALENT

George Martin avait pris sa retraite en 1998, à l’âge de 72 ans, après une carrière de 47 ans toute dévouée à la musique. L’industrie musicale britannique lui doit beaucoup, ne serait-ce, bien évidemment, pour avoir produit la quasi-totalité de l’œuvre des Beatles : sept années d’une collaboration intense qui donnera naissance à une multitude de hits, de Penny Lane à Yesterday en passant par Stawberry Fields Forever.

Son talent était multiple. Les études musicales qu’il effectue au sein de la prestigieuse "Guildhall School of Music" font de lui un musicien complet, capable aussi bien de diriger un grand orchestre que de défendre une orchestration ou une composition, et s’il choisit le hautbois, il n’en fera que peu usage, car c’est dans d’autres sphères que sa carrière débute…

George Martin devient durant une courte période un simple employé au département classique de la BBC, avant que la compagnie phonographique EMI ne le remarque et l’engage pour participer à l'enregistrement d'œuvres classiques, notamment baroques. Puis, durant les années 50, il travaille comme producteur et directeur artistique pour Parlophone, un très ancien label devenu une filiale d’EMI, et s'occupe entre autres d'artistes jazz et folk. Rien ne semblait prédestiner ce producteur/ingénieur/compositeur à devenir un élément déterminant dans la carrière des Beatles.

C’est certainement son côté décisionnaire, visionnaire et audacieux qui a guidé sa carrière et qui, en retour, a permis aux Beatles d'avoir la célébrité que l'on connait. Le jour de sa disparition, Ringo Starr et Paul McCartney, les deux seuls survivants du groupe, seront les premiers à souligner toute l'importance artistique de cet homme attachant et réservé.


GEORGE MARTIN ET LES BEATLES

George Martin et les Beatles, c’est surtout la rencontre entre deux univers, un choc frontal entre deux conceptions musicales, la première reposant sur des acquis solides, de l'expérience, et la seconde sur des idées encore balbutiantes, hésitantes et parfois maladroites, mais suffisamment enchanteresses et provocantes pour créer un processus de jumelage.

Au début des années 60, l’essor de la contre-culture fait débat. George Martin n’est autre qu’un jeune directeur artistique qui fait son apprentissage dans les studios londoniens d’Abbey Road. En 1962, sans idée arrêtée, il écoute quelques chansons des Beatles sur une bande et décide de les signer sans avoir pris l’assurance de les rencontrer.

Pourtant, si ces quatre gamins sont remplis d'enthousiasme et de détermination, la musique des débuts est loin d’être parfaite, on pourrait même dire qu’elle possède pas mal de défaut ; et sans l'attention toute professionnelle portée par George Martin à leurs chansons, le groupe n'aurait certainement pas eu la même histoire à raconter. Heureusement pour eux, l'oreille de George Martin a su déceler dès leurs premières compositions et au-delà des imperfections, une certaine originalité et un grand sens mélodique. L’enchevêtrement des voix de Lennon et McCartney ajouté à une fraîcheur dans les paroles et une insouciante jeunesse joueront également en leur faveur.

Le producteur, alors âgé de 35 ans, et bien qu’appartenant à la vieille école, comprend que l’avenir est dans l’épanouissement d’une contre-culture, de ce rock'n'roll tout droit venu des États-Unis, déjà prêt à tout dévaster sur son passage. George Martin, comme tout bon producteur de disques, sait écouter et sait déceler la petite étincelle qui fera la différence. Il relève tel ou tel détail, s’imprègne de la mélodie et des harmonies, puis décide de la marche à suivre. Il est aux avant-postes d’une décennie marquée par la relation étroite qui unit le son, la création et la technologie.

Tout compte, et dans son rapport avec les Beatles, il détient déjà tout un savoir-faire qu’il a sagement mûri lors de son apprentissage, du temps où il officiait comme ingénieur du son auprès des orchestres classiques et des big bands de jazz. Quand les Beatles perdaient pied, George Martin était là pour redresser la barre, déplaçant ici un micro ou utilisant à tel autre moment une nouvelle technique pas encore éprouvée, mais tellement jouissive !

Un jeu aussi créatif que stimulant était né entre les Beatles et George Martin. L’amoureux de Rachmaninov devient le collaborateur efficace, mais aussi le mentor, l'architecte sur lequel repose l’identité sonore du groupe et qui, professionnellement, prend le temps de « nettoyer » les défauts du produit brut jusqu’à l’embellissement final. Les Beatles avaient besoin de ce cadre "professoral" pour définir à leur juste niveau l’inspiration qui les animait et George Martin y veillait.

Son empreinte, il la distille notamment à travers les arrangements de cordes pour des chansons comme Yesterday ou Eleanor Rigby. Sur Yesterday, une guitare et un classique quatuor suffiront à imposer la célèbre ballade avec ses couleurs baroques. Point de surenchère gratuite. Juste une petite pointe de raffinement esthétique. C’est tout ! Idem pour Eleanor Rigby qui puise son inspiration dans les staccatos de la musique du film Psychose, signés Bernard Herrmann.

George Martin n’est certes pas un grand compositeur, mais ces interventions arrivent à faire mouche dans l’univers des Beatles. McCartney, Lennon et Harrison en sont conscients. Ils savent que ce touche à tout de génie est capable de préserver leur personnalité tout en leur apportant une dimension sonore d’une grande subtilité.

Cette collaboration va s’amplifier au moment où le groupe décide d'arrêter la scène. Dès lors, l'avenir va se jouer dans les murs d'Abbey Road, lors des séances de studio. C’est le début des expérimentations, du piano qui sonne comme un clavecin, de l'utilisation du Mellotron, de toutes sortes d'effets pour corser les voix (compression, distorsion, écho…), mais aussi des emprunts hérités de la musique hindoue ou concrète, sans oublier la manipulation des bandes (ralentissement, accélération, lecture passée à l’envers…) Du dodécaphonisme aux pastiches, tout y passera ; même une reprise de l’Aria de la Suite n°3 pour orchestre de Bach.

En 1968/69, quand les tensions naîtront dans le groupe, sentant que la fin était proche, George Martin prendra ses distances et n’interviendra que ponctuellement, d’abord sur l’album blanc et ensuite sur leur dernier disque, Let It Be. « Une sale période, dira-t-il. J’avais perdu le contrôle de la situation. Pourtant, l’idée de départ de cet album était excellente : ils voulaient répéter à la perfection leurs nouvelles chansons et les enregistrer en prise directe. John souhaitait un live sans effets, honnête, mais il traversait une crise très profonde. Yoko le dominait. Quand on revoit le film Let it Be, on s’aperçoit que l’atmosphère était à couper au couteau et que répéter était impossible. » Au stade final de sa réalisation, George Martin sera écarté et c’est le producteur américain Phil Spector qui se chargera de créer les parties orchestrales.


HOMMAGE À GEORGE MARTIN
(source : document France 2)

GEORGE MARTIN, L’APRÈS BEATLES…

Après la séparation des Beatles, George Martin continua de collaborer avec McCartney ; Lennon préférant, tout comme Harrison, Phil Spector pour leurs premiers albums solos. On relèvera le travail conduit sur la BO de Live and Let Die, un nouvel épisode des aventures de James Bond en 1973. Excepté la chanson générique chantée par McCartney, le reste de la BO est signé de la main de Martin et laisse entendre une multitude de petits thèmes aux résonances pseudo rock-symphonique. Notons également, sa direction du New York Philharmonic Orchestra pour Uncle Albert/Admiral Halsey sur l'album Ram de Paul McxCartney en 1972.

Par la suite, George Martin sera entre 1974 et 1979 le producteur attitré du trio America, passant ainsi d’une musique pop/rock à une musique nettement plus acoustique et imprégnée de folk et de country-rock. De ce passage, on retiendra des titres comme A horse with no name, Sister Golden Hair ou Tin Man.

Durant sa carrière, Martin collaborera aussi avec Gerry & the Pacemakers, le guitariste Jeff Beck ou le groupe Cheap Trick. Saluons sur la lancée, son entrée dans le "Livre Guiness des records" en tant que producteur du plus grand nombre de tubes de l'histoire, car cet homme si respectueux d'un art qu'il aura servi pendant près d'un demi-siècle, aura produit pas moins de 50 titres classés numéro 1 !


LES ÉTAPES IMPORTANTES DE LA CARRIÈRE DE GEORGE MARTIN

  • Naissance : 3 janvier 1926 à Londres
  • Décès : 8 mars 2016
  • 1947/1949 : Études musicales : Guildhall School of Music
  • 1950 : Il rejoint Parlaphone (groupe EMI) et devient producteur de jazz et de folk.
  • 1962/1970 : George Martin produit les albums des Beatles et participe aux séances d’enregistrement.
  • 1973 : Il compose la musique du film Live and Let Die (James Bond)
  • 1994 : Producteur de Live at the BBC, une compilation de chansons enregistrées « live » par les Beatles.
  • 1995/1996 : Il participe à la sortie d’Anthology, trois albums des Beatles avec des versions alternatives et des enregistrements publics.
  • 1996 : George Martin est anobli par la Reine Elisabeth II.
  • 1997 : Il coproduit la reprise de la chanson Candle in the Wind d’Elton John
  • 2002 : Publication d’un livre de souvenirs intitulé Playback an illustrated memoir.

Par Elian Jougla (Cadence Info - 03/2016)


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