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MUSIQUE DE FILMS

LES BEATLES AU CINÉMA, LA TRADUCTION CINÉMATOGRAPHIQUE D'UN SUCCÈS PLANÉTAIRE

Vous conviendrez très certainement qu'il était délicat pour les Beatles, l'un des plus grands groupes de la « Rock Music », d'échapper aux appels du septième art. Sans avoir de scénario précis en tête, les quatre de Liverpool allaient démontrer au fil de leur participation cinématographique une époque fertile en matière de mode, de mœurs et de conception artistique.


LA "BEATLEMANIA" SUR GRAND ÉCRAN

Les Beatles ont eu un rapport fécond avec le septième art. Mais avant de s'installer en haut de l'immeuble Apple pour le clap final d'une aventure qui a chamboulé la vision de la musique rock, il y eut, derrière le polissage de nombreux titres historiques, quelques tensions irréversibles que le cinéma a exempté comme par magie.

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Sur grand écran, tout démarre en 1964 avec le film A Hard Day's Night (Quatre garçons dans le vent) de Richard Lester. Ce premier essai est une réponse cinématographique à la « Beatlemania », phénomène spontané d'hystérie collective qui ne sera pas sans conséquences sur la destinée du groupe, puisque John, Paul, George et Ringo mettront un terme à la scène quelques mois plus tard.

© Silvercart Milano. Nems Enterpriser London Ltd. (flickr.com).

Si l'on excepte Elvis Presley et l'arrivée du rock'n'roll, la « Beatlemania » était apparue dans le ciel londonien en 1963 comme une réponse au vif engouement des fans à l'égard du groupe. Dans son film, Richard Lester s'est efforcé de traduire cette folie à la façon d'un reportage télévisé, « poursuivant » de sa caméra la vie des Beatles, que ce soit dans la rue, dans le train, au contact des gens, en répétition ou en concert. Les performances scéniques sont parfaitement mises en avant en étant ponctuées de cris et de larmes féminines.

Le film A Hard Day's Night ayant reçu un écho des plus favorables, la même équipe cinématographique se retrouve l'année suivante avec Help!, pour lequel la caméra de Lester s'attarde notamment à démontrer la « science musicale » du groupe mettant par exemple au point les voix dans un studio d'enregistrement. Toutefois, si dans A Hard Day's Night, les Beatles incarnaient leur propre rôle, avec Help! nous avons affaire à une comédie musicale et d'aventure mettant en vedette non seulement les quatre membres du groupe, mais aussi des actrices et acteurs tels que John Bluthal, Eleanor Bron, Patrick Cargill, Roy Kinnear, Leo McKern et Victor Spinetti. Les situations cocasses auxquelles nos quatre héros participent traduisent l'esprit bon enfant du film et le vent de folie qui régnait alors au sein des Beatles. Le synopsis du film, qui vise l'absurde, n'est qu'un prétexte à traduire les nouvelles chansons du groupe, constituant à la fois la BO du long métrage et leur cinquième album studio.


THE BEATLES : "CAN'T BUT ME LOVE" (extrait du film "A Hard Day's Night")
De visibles défauts dans la réalisation qui n'occulteront pas le succès de la chanson.

En 1967, ils participent à un téléfilm pour la BBC, le Magical Mystery Tour réalisé par Bernard Knowles. Réalisé une fois de plus comme un documentaire à la gloire des Beatles, le document sert de prétexte à les montrer en tournée avec un bus de couleur jaune. Diversement apprécié et bien qu'ayant attiré quelque 20 millions de téléspectateurs sur le média anglais, au regard du documentaire, ce sont les chansons qui retiendront l'attention. En effet, l'album homonyme qui sort en novembre 1967 succède à l'envolée de Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band, considéré depuis comme ayant été le sommet de leur carrière discographique. Le disque Magical Mystery Tour se démarque tout particulièrement par les titres The Fool on the Hill, Penny Lane, Strawberry Fields Forever, I Am the Walrus et All You Need Is Love.

Quelques mois après, plus précisément le 17 juillet 1968, sort le film d'animation américano-britannique réalisé par George Dunning, Yellow Submarine, mettant en scène les chansons qui clôturent la période psychédélique pop du groupe et solde définitivement la « Beatlemania » apparue cinq ans auparavant. Comble de l'ironie, pour se déplacer, les Beatles ont troqué leur bus jaune par un sous-marin jaune qui déambule au milieu de poissons colorés, procurant au final une mise en image des plus psychédéliques !


THE BEATLES : "THE FOOL ON THE HILL" (extrait du film "Magical Mystery Tour")
Écrite et chantée par Paul McCartney, les paroles de "The Fool on the Hill" décrivent un personnage solitaire qui n'est pas compris par les autres. McCartney a déclaré que l'idée de la chanson lui avait été inspirée par le collectif de design néerlandais The Fool, qui tirait son nom de la carte de tarot du même nom. Le segment de la chanson issu du téléfilm a été tourné séparément, à l'insu des autres Beatles. On identifera au passage un plan séquence tourné à Nice.

SUR LES TOITS D'APPLE

Le dernier tour de manivelle de la facette cinématographique des Beatles interviendra en 1970 avec le documentaire musical et crépusculaire Let It Be, réalisé par Michael Lindsay-Hogg, et mettant en lumière les différentes phases de l'enregistrement de leur dernier album. La prestation du groupe sur les toits londoniens et chantant Get Back ne peut éluder la toute fin de leur aventure commune. Chacun d'eux avait prioritairement anticipé la suite personnelle de leur carrière pour éviter d'éventuelles querelles internes qui seraient devenues à tout jamais irrémédiables (la trame narrative du documentaire en atteste).

Cette fin, si redoutée par les fans, se fermera définitivement avec la mort de John Lennon en 1980. Toutefois, dans la ferme intention de sensibiliser le téléspectateur à une réalité bien différente qui sous-entendait l'implosion du groupe lors du tournage de Let It Be, un nouveau montage intitulé The Beatles : Get Back, constitué de « roches » inédites du documentaire, sera proposé sous forme d'une mini-série pour la chaîne Disney+ en novembre 2021.


THE BEATLES : "GET BACK" (du documentaire "Let It Be")
Il s'agit de la dernière chanson interprétée par les Beatles sur le toit de leur siège social avant que la police tente de les faire redescendre.

On regrettera, par ailleurs, en dehors de leur dernière performance scénique, l'occasion manquée de les découvrir dans Le livre de la jungle de Walt Disney, un film d'animation dans lequel les Beatles devaient prêter leur voix aux quatre vautours volant au secours de Mogly. Cet épisode, qui n'aboutira pas pour une question de calendrier respectif, aurait été une occasion rêvée pour démontrer, une fois de plus, tout le potentiel du groupe à se diversifier artistiquement.

Reste que l'histoire des Beatles a engendré depuis leur séparation des storytellings et que le septième art, sans leur offrir réellement une qualité artistique irréprochable vis-à-vis de leurs performances, a su toutefois cadrer auprès du public, le souvenir populaire de quatre musiciens toujours prêt à concevoir notre civilisation comme un monde attachant et plein de fantaisie.

Par Elian Jougla (Cadence Info - 05/2024)

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