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JAZZ ET INFLUENCES

PEGGY LEE, BIOGRAPHIE/PORTRAIT DE LA CHANTEUSE DE JAZZ

Débutant en tant que chanteuse dans une radio locale avant d’intégrer le big band de Benny Goodman, Peggy Lee poursuivra sa carrière en multipliant les expériences, passant de l’écriture de chansons à la musique de films, jouant dans des comédies et enregistrant des albums conceptuels. Bannie de la plupart des dictionnaires du jazz, Peggy Lee sera pourtant, en dépit de nombreux écarts artistiques, la plus « noire » des chanteuses blanches de sa génération.


DE LA RADIO AU BIG BAND

Peggy Lee, de son vrai nom Norma Dolores Egstrom, est née dans le Dakota du Nord, le 26 mai 1920. Durant son enfance, la musique devient son alliée. Lassée des mauvais traitements que lui inflige sa belle-mère, Peggy quitte le foyer à 17 ans.

© Kate Gabrielle (flick.fr) - Peggy Lee en compagnie de Frank Sinatra

Armée d’une expérience acquise à la radio où elle anime un show radiophonique, elle est remarquée par Benny Goodman qui cherche à remplacer la chanteuse Helen Forrest. L'orchestre du clarinettiste est alors au sommet de son art. Peggy l'intègre et y restera de 1941 à 1943. À cette époque, la vie au sein de l'orchestre n'est pas rose tellement les tournées sont harassantes, sans compter le tempérament lunatique et les exigences de son chef. Ne sachant s'accommoder avec les chanteuses qu’il engageait, Peggy Lee ne fera pas exception et son nom s’ajoutera à la longue liste des vocalistes que l’orchestre comptera dans ses rangs entre 1934 et 1959.

Peggy Lee, Mildred Bailey, Helen Ward, Ella Fitzgerald, Margaret McRae ou encore Frances Hunt, Betty Van et Martha Tilton, toutes d’excellentes interprètes, se succéderont dans l'orchestre comme des pions interchangeables. C’est la grande époque du swing, mais aussi des « canaris », ces chanteuses qui étaient là pour mettre une touche de charme sur scène tout en supportant le machisme des musiciens. À l’exception d’Ella, Mildred et Peggy, toutes les autres seront vite oubliées.


PEGGY LEET ET L'ORCHESTRE DE BENNY GOODMAN : 'WHY DON'T YOU DO RIGHT' (1943)

LA CARRIÈRE SOLO

© Capitol - Pochette de l'album 'Peggy Lee : 'All aglow again !'

Au début de l'année 1941, Peggy Lee enregistre son premier hit avec l'orchestre de Benny Goodman, Somebody Else Is Taking My Place qui sera suivi deux ans plus tard par Why Don't You Do Right ? La chanteuse commence à se faire un nom, même si une grande partie de sa renommée est due aussi à son premier mari Dave Barbour, guitariste de l’orchestre de Goodman, avec qui elle co-signera de nombreuses chansons commerciales qui vaudront au couple le surnom de ‘Mr and Mrs Melody’.

Ce sont ces savoureuses mélodies qui lui permettent de démarrer brillamment sa carrière soliste dès 1944 pour les disques Capitol. Les chansons It's a Good Day et Don't Know Enough About You en 1946, puis l'enregistrement de Mañana (Is Soon Enough for Me) en 1948, confortent sa position de chanteuse de « variété », une orientation musicale que les amateurs de jazz lui reprocheront. Puis, elle quitte Capitol pour Decca de 1952 à 1956 et enregistre durant cette période l’un de ses meilleurs albums, Black coffee tout en continuant de produire quelques hits dont Mr. Wonderful et Lover.

Ses succès dans la chanson lui ouvrent les portes du cinéma à plusieurs reprises. D’abord en 1952, en tournant avec Michael Curtiz dans le remake du film The Jazz Singer, puis en interprétant un rôle dramatique, celui d’une chanteuse de blues devenue alcoolique dans le film Pete Kell’s Blues de Jack Webb et pour lequel elle sera nommée aux Oscars.

Parmi ses autres réussites, on relèvera ses qualités de parolières. On lui doit, entre autres, l'écriture de la chanson du film Johnny Guitar en 1954 et celles du dessin animé La Belle et le Clochard de Walt Disney en 1955. Elle collabore aussi à l’élaboration de musique de films avec des compositeurs prestigieux (Victor Young, Lalo Schifrin, Quincy Jones, Dave Grusin ou Francis Lai). Par ailleurs, dotée d'une certaine clairvoyance et contrairement aux chanteurs et chanteuses de la « vieille garde », elle adoptera le rock'n'roll comme étant une musique nécessaire, si bien qu’elle produira et arrangera, de 1957 jusqu'à son dernier album en 1972, des disques comprenant autant de compositions personnelles que de compositions venant de jeunes artistes rock et pop comme les Beatles, Carole King ou James Taylor.


PEGGY LEE : 'LOVER !' (extrait du film 'The Jazz Singer' - 1952)

FIN DE CARRIÈRE

Dans les années 80, des problèmes cardiaques l’amènent à ménager son drive irrésistible. La chanteuse, connue pour être porteuse d’une voix franche et directe, et dont le léger éraillement pouvait l’assimiler encore plus à certaines de ses consœurs noires, devait se rendre à l'évidence et prendre acte.

À l’aube des derniers jours, alors que sa position assise dans un fauteuil roulant ne pouvait que la diminuer, Peggy Lee continuait de surprendre son public comme les critiques par ses performances. Fragilisée par un diabète tenace, celui-ci aura raison de sa santé et une crise cardiaque l’emportera en 2002, à l'âge de 81 ans.


PEGGY LEE : 'BLACK COFFEE' (1953)

On peut considérer la carrière de Peggy Lee comme étant celle d’une « entertainer », c’est-à-dire une artiste qui a su englober le spectacle dans sa diversité. La chanteuse préférée de Louis Armstrong, d’Ella Fitzgerald, de Judy Garland ou de Dean Martin, a été d’une grande importance dans la filiation entre le jazz et la chanson populaire, puis avec le rock durant son émergence. En 2003, l’hommage rendu au Carnegie Hall sera à la hauteur de ce qu’elle représentait artistiquement. La soirée "There'll Be Another Spring : A Tribute to Miss Peggy Lee" avait tenu ses promesses. Des artistes venus du monde de la chanson et du jazz s’étaient donnés rendez-vous pour saluer l'artiste disparu : Dee Dee Bridgewater, Petula Clark, Chris Connor, Debby Harry, Shirley Horn, Quincy Jones, Marian McPartland, Rita Moreno et Nancy Sinatra.

Par Elian Jougla (Cadence Info - 05/2021)

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