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MUSIQUE & SOCIÉTÉ

QUAND LES CHANTEURS ET LES GROUPES MISENT SUR UN COME-BACK GAGNANT

Quand une carrière s’essouffle, mieux vaut parfois se faire oublier et revenir quelques années plus tard à la surprise générale. C’est ce que pratique de nos jours un bon nombre d’artistes pour éviter une overdose médiatique coupable. Encore faut-il trouver le bon moment ou les circonstances qui feront du come-back, un retour gagnant !


LE COME-BACK, UN INVESTISSEMENT ET UN PARI ARTISTIQUE SUR L'AVENIR

Quand un chanteur, une chanteuse ou un groupe tente de revenir sur le devant de la scène, c’est avec le secret espoir que cela va payer. Le come-back jackpot, ils en rêvent, mais y parviennent-ils toujours et sous quelles conditions ? Un come-back réussit se résume le plus souvent à des chiffres : nombres d’entrées lors des concerts, nombre de disques vendus, popularité en flèche sur les réseaux, retour sur investissement…

Le come-back fait office de réhabilitation ou de revanche, mais il doit toujours être justifié. Pour cela, la promotion est essentielle et doit agir des semaines, voire des mois à l’avance. L’investissement financier, toujours fluctuant, dépendra de l’aura de l’artiste ou du groupe, de son passé, de l’attente des fans (nostalgie), et de la conjoncture économique. Un style de musique peut ne plus être « in » comme l’artiste ne plus être à la page, ce qui condamnera l’ensemble des efforts consentis. De nouvelles chansons ou un nouveau look peuvent ne pas suffire. Mieux vaut alors laisser les stars déchues où elles sont, plutôt que vouloir faire du neuf avec du réchauffé. Pour les investisseurs, un tel risque porte un nom : la « ringardisation ».

© pixabay.com


DU COME-BACK RÉUSSI AU PÉTARD MOUILLÉ

Il faut bien reconnaître que l’étiquette de « ringard » est loin d’être flatteuse pour n’importe quel artiste. L’ego en prend un coup, surtout pour ceux dont la longue et brillante carrière s’est arrêtée un jour, sans remettre en cause leur intégrité professionnelle. Souvent, l’étiquette colle tellement à leur peau, que le public est dans l’incapacité d’imaginer autre chose. Il faut alors créer un fil conducteur entre passé et présent qui soit en mesure d’éveiller une nouvelle fois la curiosité.

Ces traversées du désert mal vécues, tragiques pour certains, ne peuvent être comparées à une perte d’emploi, même si à certains égards cela y ressemble beaucoup. L’artiste qui a été populaire un temps et qui souhaite revenir sur le devant de la scène doit nécessairement redorer son image ternie par le temps ; la revanche n’en sera alors que plus belle. Souvenons-nous d’Henri Salvador">Henri Salvador avec « Chambre avec vue » et son « Jardin d’hiver » en 2000. L’artiste ringardisé par ses premières chansons humoristiques comme « Zorro est arrivé » ou « Minnie, petite souris » souffrait de ne pas être assez reconnu pour son talent à écrire des chansons d’amour, sensible, belle en somme, alors qu’il avait plus de 80 ans ! Sa disparition nous aura au moins enseigné quelque chose : un come-back réussi n’est pas forcément lié à l’âge de l’artiste !

Mais tous les retours ne sont pas aussi réjouissants ; à l’exemple de Tina Turner qui, en 1978, tente de revenir au premier plan, maintenant qu’elle a divorcé de son bourreau de mari, Ike. De sa gloire passée, il ne lui reste que son jeu de scène extraordinaire. À 40 ans, la star du rhythm and blues aligne les flops. Grâce à quelques amis de la scène rock, comme Mike Jagger ou Rod Stewart qui l’invite sur scène, Tina Turner garde bon espoir. Ce n’est que six ans plus tard que sa ténacité va payer avec le disque « Private Dancer ». Tina Turner, qui approche la cinquantaine, a encore belle allure. Beaucoup plus catastrophique sera le retour de la chanteuse Whitney Houston pour qui la voix de diva n’était plus qu’un lointain souvenir. En 2009, sa prestation à la célèbre émission ‘Good Morning America’ virera au cauchemar. Le cadeau du ciel s’était perdu dans l’alcool et les produits illicites.

D’autres circonstances peuvent aussi pousser un artiste à revenir, simplement pour travailler à nouveau. C’est le cas de Bertrand Cantat, le leader de feu Noir Désir. Nous sommes en 2010 et le chanteur a purgé huit ans de prison pour homicide involontaire. Un disque est prévu. En attendant sa sortie, et pour faire oublier son lourd passé, le chanteur se sentira obligé de tâter le terrain en programmant quelques apparitions scéniques en compagnie de groupes comme Eiffel, Shaka Ponk et Amadou et Mariam. Que l’on aime ou pas Bertrand Cantat à cause de ce qu’il a fait ou de sa musique, cela justifie-t-il le lynchage médiatique qu’il a subi, avons-nous le droit de juger un homme alors qu’il ne cherche en réalité qu’à s’exprimer sur ce qu’il sait faire ?

Bien souvent, le come-back prend la forme d’une simple tournée de reformation éphémère, une sorte de fond de retraite d’un nouveau genre qui ne court pas après le risque, tel le groupe Police qui se contentera de rejouer sur scène tous ces tubes lors de sa tournée « One Shot » en 2007, sans autres nouveautés, ni arrangements.

Enfin, il existe aussi des retours espérés, mais qui ne verront jamais le jour. Le meilleur exemple est celui des Beatles. L’espoir a duré des années jusqu’au jour où John Lenon fut assassiné par un fan déjanté, Mark Chapman, en 1980. Fort heureusement, tout ne finit pas aussi dramatiquement. En France, après presque 30 ans d’absence, le retour du groupe Téléphone est annoncé. Devenus Les Insus en 2015, sans Corinne à la basse, le groupe reprendra notamment tous ses grands succès à travers une tournée hexagonale.


HISTOIRE DE FAIRE UN BREAK...

Faire un break, des artistes y pensent, d’autres le font. C’est le cas de la chanteuse Sade (Adu) qui programme à l’avance chaque nouveau retour comme des « espaces spatio-temporels ». Adepte du « Break à durée indéterminée », celle qui fut au top dans les années 80 a volontairement ralenti la cadence. Prémonition, peur d’être dans l’incapacité de se renouveler, toujours est-il que la chanteuse sème ses albums au compte-gouttes : « Love Deluxe » (1992), « Lovers Rock » (2000), « Soldier of Love » (2010). Le prochain sera-t-il aux alentours de 2020 ? Le dernier en date (« Soldier of Love ») était attendu comme les précédents et s’est très bien vendu aux États-Unis comme en France. On ne peut reprocher à Sade une telle attitude. Ne pas lasser, surprendre, voire se renouveler ne doit pas faire oublier qu’il est parfois utile à un artiste de vivre sa vie en dehors du feu des projecteurs : fonder une famille, faire du cinéma, écrire, voyager…

Quand on est artiste dans sa tête, on le demeure encore loin des studios et des plateaux. Le temps n’a jamais été un frein à cela. Faire un break devient nécessaire lorsque le métier est synonyme de saturation, de lassitude. C’est humain. C’est une question de pression, de stress qui fait qu’un jour l’artiste ne répond plus aux sollicitations, qu’il a l’impression d’avoir tout essayé. Face aux nombreux sacrifices et exigences de la profession, à son côté dur et imprévisible, il faut vraiment que la passion soit intacte comme au premier jour pour s’impliquer dans chaque nouveau projet. Un come-back réussi ne peut fonctionner sans cela, sans le plaisir de reconstruire… ce qui est essentiel !


QUAND LA NOSTALGIE NOUS PREND PAR LA MAIN...

Avec aujourd’hui plusieurs générations de fans en demande d’idoles et de concerts, le ‘nostalgie business’ est devenu une offre qui bat son plein et nourrit la machine à rêve du come-back. À partir d’un certain âge (disons 40 ans), le public est impatient de réécouter les tubes de sa jeunesse. Cette attente est aussi renforcée par le manque de renouvellement de la musique, un phénomène qui prend de l’ampleur même auprès des plus jeunes qui se tournent de plus en plus vers la musique de leurs aînés.

La musique se vivrait-elle dans le rétroviseur ? Aurait-elle besoin d’un retour aux fondamentaux ? Les classiques de la chanson sont tendances, comme le rock ou la pop des seventies. Les ados partent à la découverte des grands groupes. The Beatles, certes, mais aussi des vétérans comme The Beach Boys - qui continuent à se produire - ou pour les plus téméraires The Mothers of Invention de Frank Zappa. Sur le fond, il y a matière. Si musicalement, il y a richesse et diversité, socialement, les groupe de rock des années 60/70 ont joué un rôle essentiel en devenant des repères, des porteurs de messages pour la jeunesse d'alors. Aujourd’hui, ils créent un pont entre passé et présent, et c’est aussi pour cela qu’ils sont autant écoutés et appréciés.


QUELQUES COME-BACKS D’ARTISTES

Une petite liste d’artistes accompagnée de l’année de leur come-back.

  • Jane Birkin (1998)
  • Henri Salvador (2000)
  • Indochine (2002)
  • Christophe (2002)
  • Janet Jackson (2004)
  • Pixies (2004)
  • Mariah Carey (2005)
  • Guns N’Roses (2006)
  • Kylie Minogue (2006)
  • George Michael (2007)
  • Britney Spears (2007)
  • Police (2007)
  • Spice Girls (2007)
  • Catherine Ringer (2008)
  • Blur (2009)
  • Rihanna (2009)
  • Sade (2010)
  • Section d’assaut (2010)
  • Jennifer Lopez (2011)
  • Gérard Lenorman (2011)
  • Garbage (2012)
  • Shuril’n (2012)
  • Orelsan (2013)
  • Johnny Hallyday (2014)
  • Téléphone – Les Insus (2015)
  • NTM (2017)

Par Elian Jougla (Cadence Info - 10/2017)

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