L'info culturelle des musiques d'hier et d'aujourd'hui

ROCK, POP, FOLK, ELECTRO...


QU'EST-CE QUE LA MUSIQUE POP ? SES GRANDES ÉTAPES ENTRE HÉRITAGE ET DÉRIVE

Universellement diffusée par le disque, la radio, la télévision puis la vidéo, la musique pop est une production industrielle destinée par nature à toucher un large public. La pop music se confond aussi, par défaut, avec la duplication infinie des productions culturelles modernes, avec leur démocratisation, diront certains, avec leur abâtardissement, diront les autres.


UN PRODUIT BAPTISÉ "MUSIQUE POP"

Au sens général, la musique "pop" pourrait être définie par l'apparition du 45 tours et sa forme matérielle qui a formaté des chansons de courte durée (moins de 3 minutes en moyenne), des chansons ayant pour ambition de se trouver positionner quelques semaines ou quelques jours en haut du hit-parade, fugitif symbole de l'air du temps. De fait, les performances en public des artistes importeront moins que leur enregistrement, la chanson pop s'affirmant d'abord comme une expertise dans la production technique des œuvres (d'où le rôle déterminant des producteurs et des ingénieurs du son). Avec le développement de la télévision et des images en général, l'apparence de ces "artistes pop" finira par l'emporter, du moins autant que la qualité de leurs œuvres enregistrées ; la pop-star incarnant physiquement et plus seulement musicalement, la mode du moment.

© pixabay.com

À l'origine, la musique pop a de multiples racines, qui vont du gospel à la soul en passant par le folk anglo-irlandais et la country. Les choses vont se nouer quand la chanson sentimentale d'avant-guerre - dans le genre Cole Porter et George Gershwin - fusionnera avec l'intensité et la spontanéité de la musique noire afro-américaine. Cette fusion s'opèrera dans les années 1950 avec le rock'n'roll et Elvis Presley, premier exemple de musique pop, sans en porter l'étiquette. Elvis Presley, nourri de gospel et de chants protestants, réadapte la musique noire pour la communiquer à un public blanc.

Peu de temps après, les artistes noirs commencent à habiller leurs lignes de rhythm'n'blues avec des violons comme le font les Drifters, en 1959, sur la chanson There Goes My Baby. Mais ce seront incontestablement les artistes de la maison de disques Tamla Motown des années 60 qui réaliseront au mieux la fusion entre les musiques populaires noire et blanche. Des groupes comme The Temptations, Martha and the Vandelas ou des personnalités comme Marvin Gaye et Stevie Wonder en sont des exemples parmi bien d'autres.

Le producteur Phil Spector poussera le genre à son maximum. Il inventera pour ses groupes de filles (The Ronettes, The Crystals) un son urbain construit entièrement en studio, avec des chansons aux harmonies imparables, soutenues par un rythme puissant. Bref, une synthèse idéale entre la mélodie de tradition européenne et la pulsation de base de la musique afro-américaine.


LA POP ANGLAISE

Ainsi définie, la "pop music" va prendre sa forme définitive non pas aux États-Unis, mais en Europe, avec l'explosion anglaise de la rock-music. The Kinks et quelques autres dont The Beatles seront au centre de ce phénomène. Leurs mélodies, nettes, accessible à tous, en sont le pivot central. En complément, on ajoute l'indispensable voie soliste accompagnée de chœurs aériens, des voix en 'background' chantées en contrepoint. L'instrument de base demeure la guitare. C'est fréquemment elle qui distille les quelques notes douces/amères sur des guirlandes d'arpèges. Petit à petit, on ajoutera des instrumentations plus sophistiquées en même temps que des textes plus ambitieux.

À la base, la chanson pop se caractérise par une gentille mélodie, un rythme entraînant, mais pas trop appuyé, des paroles rigolotes, insignifiantes, contestataires ou visant la poésie. L'album des Beatles, Rubber Soul (1965), peut être considéré comme le pinacle de l'art pop, avec des chansons comme Drive my car, Michelle ou Norvegian Wood. Tout y est : la grâce mélodique, les guitares détendues, la batterie qui soutient juste ce qu'il faut, les textes drôles, mais sans grande prétention (si l'on excepte peut-être Nowhere Man).


THE BEATLES : DRIVE MY CAR

Aux États-Unis, The Beach Boys relèvent le défi des Fab Four et conçoivent, en 1966, le fantastique Pet Souds, dont l'auteur principal, Brian Wilson, dira, sans fausse modestie, que c'était « le premier album qui communiquait à la jeunesse du monde de la musique et pas seulement du rock'n'roll sur trois accords ». Quelque temps plus tard, on opposera cette pop légère, mais bien ciselé, non rebelle, au rock pur et dur, violent, contestataire, refusant (en théorie) la récupération par les maisons de disques.


LA MUSIQUE POP CONSUMÉE

À la fin des années 1960, en l'espace de quelques années, les technologies d'amplification et d'enregistrement font une avancée extraordinaire. Les premières boîtes d'effets apparues sur le marché donnent des idées, et si les Beatles sont les premiers à utiliser les moyens sophistiqués du studio avec leur producteur George Martin, c'est au génie de Jimi Hendrix que l'on doit une transformation radicale de la composition rock. Par son utilisation originale et exclusive de la guitare électrique, il intervient sur la structure même du son et ses solos de guitare deviennent une référence chez les virtuoses de l'instrument à six cordes. Malheureusement, l'autre facette du personnage est moins glorieuse, indissociable d'un fléau rattaché aux années folles de l'art pop : la consommation à outrance de stupéfiants.

© MobimanCdn - Jimi Hendrix

La drogue, d'abord considérée comme un moyen d'approfondir la connaissance de soi-même, va faire de nombreux ravages dans tous les milieux artistiques de l'époque. De grands héros de la musique rock vont payer de leur vie cette boulimie de paradis artificiels : Brian Jones (1969), Jimi Hendrix (1970), Janis Joplin (1970), Jim Morrison (1971). Bien que ces disparitions dans la fleur de l'âge aient fait réfléchir, le slogan "Sex & Drugs & Rock'n'Roll", immortalisé par Ian Dury, est celui qui reflète le mieux l'état d'esprit de cette décennie.


VERS UNE POP PÉJORATIVE

Au milieu des années 70, le terme de pop devient progressivement péjoratif, synonyme de variété commerciale, avec des compositions interchangeables et des artistes au talent édulcoré, à l'image des Osmond Brothers ou de David Cassidy. La pop devient universelle et le groupe suédois Abba connaît alors un succès mondial avec sa "powerhouse pop" composée d'un mélange harmonique travaillé et de mélodies "tout terrain". Les Anglo-Australiens The Bee Gees vont apporter, pour leur part, une nouvelle direction à la pop en introduisant derrière leurs harmonies vocales de néo-castrats une rythmique frénétique qui va bientôt s'appeler le disco. La BO du film Saturday Night Fever pour laquelle ils ont participé se vendra à plus de 30 millions d'exemplaires.

En France, la pop, en tant que telle, ne sera bien souvent qu'une adaptation locale des succès anglais, à la Ronnie Bird. On rappellera quand même la dimension pop de l'œuvre de Serge Gainsbourg, avec des chansons comme Qui est in, qui est out  ? ou Docteur Jekyll et Mister Hide (écrites toutes deux en 1966) ou certains éléments de l'album Histoire de Melody Nelson (1971). On pourrait également citer des artistes comme Françoise Hardy, Laurent Voulzy ou Étienne Daho, dont les belles compositions témoignent de l'existence d'une pop française de qualité.


ÉTIENNE DAHO/DANI : COMME UN BOOMERANG (Serge Gainsbourg)

Au cours des années 80, la new wave, pour froide et intellectuelle qu'elle voudra être, ne sera jamais bien loin des canons pop. Et que dire des années 90, sinon constater un réveil de ce qu'on appelle la "brit-pop", c'est-à-dire le retour des jeunes musiciens anglais à la tradition inaugurée dans les années 80, avec des groupes comme Blur ou Pulp qui ressortent toutes les leçons apprises au cours des trois décennies passées. Aujourd'hui, force est de constater que l'emploi du mot "pop" n'a qu'un lointain rapport avec ce qui l'a vu naître. Son côté péjoratif définit tout au plus une musique fort sage construite sur de simples harmonies, elles-mêmes emportées par quelques mélodies sirupeuses.

Par D. Lugert (Cadence Info - 12/2021)

À CONSULTER

LA POP MUSIC : LE MÉLANGE DES GENRES

La grande force de la 'pop music' sera d’exploiter quelques trouvailles mineures en s’appuyant sur des emprunts habiles. C'est la naissance des mélanges musicaux. Musique folk, rock, blues ou jazz cohabitent alors sans fausse pudeur...


RETOUR SOMMAIRE
FB  TW  YT
CADENCEINFO.COM
le spécialiste de l'info musicale